Il faut inscrire l’aide à domicile comme un acteur central de la réussite de la stratégie nationale de santé. Elle ne peut être menée à bien si les acteurs de santé que nous sommes ne sont pas parties prenantes pour aider à sa mise en œuvre. Je pense, par exemple, au virage ambulatoire voulu par cette stratégie : dans les zones où il n’y a pas de services d’aide et de soin à domicile quand les patients sortent d’hospitalisation et ont besoin de professionnels pour se maintenir chez eux, on observe de nombreuses ré-hospitalisations en urgence. Sur le volet de la prévention, les services d’aide à domicile sont également présents. En agissant auprès des 80 000 femmes qui souffrent de dépression post-partum après un accouchement, on évite les ruptures professionnelles. Ces bénéfices se comptent en termes de coût global pour la société. Or, alors que nous sommes des acteurs déterminants pour engager la transformation au sein du système de santé et de l’offre médico-sociale, nous disparaissons. Depuis trop d’années, les pouvoirs publics n’investissent plus suffisamment dans les services. Aujourd’hui, une grande partie d’entre eux fonctionnent à perte, avec des emplois qu’on n’arrive plus à rémunérer correctement et des problèmes majeurs d’attractivité. Lors de la dernière campagne « emploi », 5 000 postes étaient à pourvoir pour les quatre fédérations d’aide à domicile à but non lucratif, sur un total de 220 000 salariés. C’est assez significatif.
A l’assemblée nationale de l’UNA, Mme Cluzel, secrétaire d’Etat aux personnes handicapées, a annoncé que les acteurs du domicile vont enfin intégrer le chantier Serafin-PH. C’est une décision que nous saluons, étant donné que nous le réclamions depuis le lancement du chantier, en 2014. Mme Montchamp, présidente de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), a, elle, évoqué la question des deux fonds de 50 millions d’euros prévus pour 2019 et 2020, en indiquant qu’elle était favorable à ce que leur gestion soit réalisée de la manière la plus transparente possible. A l’UNA et à la Fédération française des services à la personne et de proximité (Fedesap), nous demandons qu’elle soit bien pilotée par la CNSA et que les parties prenantes soient copilotes de son bon usage.
Il faut que nous soyons sûrs que l’argent aille aux services qui en ont le plus besoin, là où leur présence est à la fois la plus indispensable et la plus en difficulté. Les expériences précédentes ont en effet démontré que les fonds, qui passent par les départements, ne sont pas toujours utilisés pour l’aide à domicile mais plutôt pour équilibrer les budgets départementaux. En Ariège, ils viennent de décider, à partir du 1er juillet, qu’il y aura un reste à charge de 4,50 € en moyenne sur la prestation de compensation du handicap (PCH) ; dans le Nord, le financement de l’aide à domicile va baisser de 3 €… On peut énumérer ainsi un bon nombre de départements qui, aujourd’hui, bien qu’ils soient financés par la CNSA, diminuent leurs financements sur les services d’aide à domicile. Sans parler du fait que cette enveloppe est en réalité bien trop faible et aura un impact réduit sur le sauvetage de l’offre actuelle de l’aide à domicile qu’elle soit lucrative ou non. Rien que pour l’aide à domicile non lucrative, le besoin de financement est de 1,7 milliard d’euros par an pour retrouver une attractivité des emplois et couvrir les coûts des services. Ce plan n’est donc pas à la hauteur des enjeux. Avec 100 millions d’euros sur deux ans, nous sommes loin du compte. Emmanuel Macron a cependant ouvert le chantier du « 5e risque », nous ne désespérons donc pas d’obtenir l’année prochaine des financements complémentaires qui permettront enfin de couvrir les coûts de revient des services.