Les Assises nationales annuelles de la Fédération du service aux particuliers (FESP), qui se sont tenues le 25 juin à Paris, ont été l’occasion de débattre sur les moyens de donner un second souffle au secteur des services à la personne, 13 ans après le plan « Borloo », de développement des services à la personne (SAP).
Malgré 2, 7 millions de bénéficiaires, 1,4 million de salariés, une évolution démographique favorable, un soutien des pouvoirs publics avec les dispositifs de crédit d’impôt, le secteur des services à la personne n’a pas atteint son rythme de croisière, notamment en termes de gisements d’emplois, et reste confronté au travail non déclaré, estimé par la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) à 25 % des heures prestées.
Dans son discours d’ouverture des assises, Maxime Aiach, président de la FESP, a rappelé que le secteur des services à la personne a été « durement éprouvé ces dernières années » par « une instabilité fiscale et réglementaire ». En ligne de mire : la suppression du forfait pour les entreprises mandataires, la mise en œuvre « difficile » de la loi d’adaptation de la société au vieillissement, la suppression ou la réduction de plusieurs exonérations, les augmentations de TVA.
« Globalement, notre secteur représente un potentiel de 2 milliards d’heures prestées. A 20 € de l’heure, cela représente 40 milliards d’euros. Dans une vie économique normale, un secteur avec un tel potentiel devrait attirer toutes les convoitises. Mais, ce n’est pas ce qui se passe », a déploré le président de la FESP. Et d’ajouter pour convaincre : « Un euro investi dans les services à la personne rapporte 1,9 € quand il est utilisé par le client d’une entreprise, 1,3 € en emploi direct et 1,6 € par le client d’une association. »
« Pour redonner les conditions de la confiance » au secteur, Maxime Aiach réclame « une stabilité réglementaire » et appelle de ses vœux la mise en œuvre de « la contemporanéité du crédit d’impôt », c’est-à-dire, la suppression du délai de remboursement du crédit d’impôt aux ménages consommateurs de services à la personne. « Cette mesure devrait permettre la création de 200 000 emplois en 12-18 mois, et nous rapporterons entre 800 millions d’euros nets et 1 milliard d’euros à l’Etat », a-t-il argumenté.
Lors de ces assises, plusieurs représentants des ministères ont pris la parole pour rassurer les participants sur la prise en compte par le gouvernement du potentiel économique des 21 métiers que compte le panel du champ des services aux particuliers. Ainsi, tout en rappelant que le secteur des services à la personne est le secteur le plus pourvoyeur d’emplois dans les années à venir, Antoine Foucher, directeur de cabinet de Muriel Pénicaud, ministre du Travail, a précisé que « des études, des réunions, des diagnostics, des documentations sur l’effet emploi de la contemporanéité du crédit d’impôt » étaient en cours. « Le sujet est vraiment pris au sérieux dans la sphère étatique », a-t-il assuré. Il y a toutefois peu de chances que cette mesure voie le jour tout de suite. Jo-Michel Dahan, sous-directeur des entreprises de services et des professions libérales de la direction générale des entreprises (DGE) au ministère de l’Economie et des Finances, a souligné la nécessité d’un travail préalable sur les systèmes d’information globaux de l’Etat et des services fiscaux, afin que la mesure d’un crédit d’impôt à effet immédiat soit mise en œuvre « sans heurts et sans accrocs ».
Redonner une nouvelle dynamique au secteur des SAP ne passe cependant pas que par des dispositions fiscales. « Si le secteur des services à la personne a un fort potentiel en emplois, il peine toutefois encore à recruter », a rappelé Gilles Dumont, chef de la mission interministérielle des services à la personne (MISAP) à la direction générale des entreprises (DGE). « Des mesures fiscales ont été prises, et pour un développement plus rapide du secteur il y a la possibilité d’un crédit d’impôt contemporain », a-t-il reconnu, tout en listant également trois leviers possibles : la formation, l’attractivité du secteur, la rémunération des personnels. Le contrat de filière « services à la personne », signé en février 2017, devrait permettre aux acteurs d’avancer sur ces volets.
Pour sa part, Olivier Redoules, directeur des études économiques du Medef, juge que le second souffle des services à la personne passe « à moyen et long terme » par les filières d’avenir. « Avec le numérique, le vieillissement de la population, la simplification de l’économie, le secteur des services à la personne est amené à devenir un moteur à part entière de l’économie. Pour cela, il faut que les acteurs, entreprises comme associations, puissent innover, investir, monter en gamme, grossir. Ce qui nécessite un cadre réglementaire et fiscal qui soit à la fois compétitif et stable pour que les acteurs puissent se projeter vers l’avenir », a-t-il exposé. Selon lui, l’inaction risque de conduire à l’augmentation du travail au noir et « au développement de plateformes Internet comme aux Etats-Unis qui prennent le marché ». Et donc… à une ubérisation du secteur.
En 2019, le secteur des services à la personne sera concerné par de nombreuses dispositions réglementaires : la mise en œuvre du prélèvement à la source, la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et du crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires (CITS) (pour le secteur associatif) en baisse de charges pérennes, la réforme de la formation professionnelle et de l’apprentissage, le projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises (Pacte) – qui passera devant le Parlement en septembre prochain – et qui comprend notamment des mesures pour les TPE et PME. Sans oublier, le débat sur le financement de la dépendance.
Lors des Assises nationales annuelles, Maxime Aiach, président de la FESP, a exprimé son inquiétude concernant la suppression du CICE et les risques liés à la taxation des contrats courts très utilisés dans le secteur des services à la personne.