Les directeurs d’établissements et de services pour les personnes âgées ont répondu présent à l’occasion du 33e Congrès de la Fnadepa qui s’est déroulé les 4 et 5 juin à la Cité des Congrès de Nantes. Dans une ambiance décontractée mais empreinte des fraîches annonces constituant la feuille de route d’Agnès Buzyn, les quelque 450 participants ont planché sur la notion d’« innovation » dans le secteur médico-social.
Robot d’assistance ménager, d’aide aux déplacements ou encore compagnon émotionnel numérique… Depuis quelques années, les outils de plus en plus technologiques ont peu à peu envahi les maisons de retraite et les domiciles des personnes âgées. Tantôt gadget, tantôt véritable bâton de vieillesse, la gérontechnologie, qui représente des parts de marché considérables, fera bientôt partie du quotidien de la prochaine génération du troisième âge. Des avancées qui questionnent également l’éthique.
« Ces outils peuvent à la fois aider à vaincre l’isolement, à prévenir des fugues, des troubles de la mémoire et en même temps à rassurer les aidants familiaux », expose Valérie Bernat, directrice du Gérontopôle des Pays de la Loire. Un côté pile et un côté face : l’intrusion dans leur vie quotidienne de ces nouveaux colocataires n’est pas toujours pour rassurer les personnes âgées. « Mais le risque, c’est de noyer la personne sous des capteurs de surveillance et de ne plus s’en occuper réellement », prévient-elle.
Objet de recherches poussées, la domotique est aujourd’hui capable d’anticiper les besoins. Des capteurs installés dans chaque pièce du logement permettent, d’une part, de commander, grâce à la voix du propriétaire, l’ouverture des rideaux, la fermeture des portes mais aussi de le rappeler à l’ordre si une casserole a été oubliée sur le feu. Dautre part, d’autres outils détectent les chutes éventuelles via des micros qui, au besoin, préviennent les secours ou la famille. « Encore faut-il que ces innovations soient faciles à utiliser pour les seniors et qu’ils envisagent ces outils comme des aides », tempère Marc-Eric Bobillier-Chaumon, pour qui ces technologies auraient permis de sauver des vies durant la canicule meurtrière de 2003.
Selon Marc-Eric Bobillier-Chaumon, la gérontechnologie peut se révéler extrêmement délétère dès lors qu’elle devient source de stress pour les personnes âgées et de perte de sens pour le soignant. « L’outil technologique doit soulager la personne sans pour autant la priver d’activité valorisante », précise le professeur de psychologie du travail et de psychologie ergonomique à l’université Lyon-Lumière. Une personne âgée qui aime faire la cuisine ne doit pas en être privée tout comme une autre qui a pour habitude de faire, chaque soir, le tour de sa maison pour vérifier la fermeture des portes. L’important est de mettre l’accent sur les capacités que possèdent encore les personnes et non celles qu’elles ont perdues.
Des inquiétudes qui touchent aussi les professionnels. Dans l’audience, on questionne les intervenants sur la destruction créatrice que pourraient entraîner par exemple les robots aides-soignants qui existent déjà dans des pays comme le Japon. Car lorsque ces humanoïdes acquis par les établissements seront rentabilisés, qui pourra alors garantir qu’ils ne remplaceront pas définitivement les infirmières et les aides-soignantes ?