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La feuille de route manque d’épaisseur

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Présentée le mercredi 30 mai comme ayant « la double vocation d’améliorer dans l’immédiat la qualité de vie des personnes âgées et d’anticiper la perte d’autonomie », la « feuille de route » de la ministre des Solidarités et de la Santé exprime, selon les acteurs du secteur, une volonté, mais les moyens financiers ne sont pas à la hauteur.

Après deux jours de grève des salariés des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et de l’aide à domicile, du jamais vu dans ce secteur, les attentes étaient grandes. Dans ce contexte, Agnès Buzyn a présenté, le 30 mai, une quinzaine de mesures immédiates, majoritairement axées sur les EHPAD. Ainsi, pour répondre aux besoins croissants en soins dans ces structures, une enveloppe de 360 millions d’euros a été débloquée sur trois ans de 2019 à 2021 pour recruter des personnels soignants. 217 millions étaient déjà prévus sur cette période, l’effort supplémentaire n’est donc que de 143 millions d’euros.

Pour pallier les difficultés des nuits, « une astreinte infirmière mutualisée entre plusieurs établissements d’un même territoire » va être mise en place afin de réduire les « hospitalisations en urgence évitables » qui ont un impact négatif sur l’état de santé des personnes âgées. Ce dispositif ne constitue pas en soi une nouveauté, une enveloppe de 10 millions d’euros lui avait déjà été allouée lors de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018. Néanmoins, cette mesure le pérennise en débloquant 26 millions jusqu’en 2020 pour sa généralisation.

Parallèlement à cela, la ministre des Solidarités et de la Santé entend apporter « l’expertise au plus près du patient ». Ainsi, le nombre et les effectifs des équipes mobiles de gériatrie seront renforcés, grâce à 16 millions d’euros qui seront versés d’ici 2022, afin d’appuyer les EHPAD et les professionnels.

Aucune baisse des dotations

Agnès Buzyn s’est également engagée à ce que la réforme de la tarification des EHPAD ne conduise à aucune baisse des dotations, ni en soins ni en moyens relatifs à la dépendance pour 2018 et 2019. Cette mesure sera mise en œuvre par les agences régionales de santé, en lien avec les conseils départementaux, avec une enveloppe de 47 millions d’euros.

Dans cette feuille de route, le cadre de vie a également été pris en compte, un plan de soutien à l’investissement en EHPAD d’au moins 100 millions d’euros par an à partir de 2019 a été annoncé. Cela doit permettre en principe de répondre aux besoins de rénovation dans les établissements les plus anciens.

Malgré ces annonces et d’autres, notamment sur la télémédecine, la création de 1 000 places d’hébergement temporaire en EHPAD pour les personnes en fin d’hospitalisation, ou encore le développement de l’habitat inclusif, les fédérations, associations et syndicats du secteur sont nombreux à ne pas être totalement convaincus. L’accueil est pour le moins mitigé, certains dénonçant une vision qui n’est pas la hauteur des enjeux. « L’effort supplémentaire de 143 millions d’euros ne permettra pas aux établissements de sortir de la situation critique dans laquelle ils se trouvent. » L’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux (Uniopps) ajoute : « Au-delà du renforcement des personnels soignants que prévoit cette enveloppe, la vraie ambition consisterait dans l’accroissement du personnel dédié à l’accompagnement des personnes pour renforcer leur qualité de vie au quotidien et dans la valorisation du secteur. »

Un programme en demi-teinte

Effectivement, dans cette feuille de route, aucune mesure n’évoque les missions d’accompagnement social plus que nécessaire pour que les résidents ne perdent pas leur autonomie, leurs capacités intellectuelles et physiques, sans parler de la notion de « lien social ». Du côté de la Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées (Fnadepa), cette feuille de route est en demi-teinte. « Les mesures immédiates ne font que répondre partiellement aux besoins les plus urgents. […] Trop de mesures restent au stade de grands principes sans chiffrage », regrette-t-elle.

Pour la CGT des EHPAD et services d’aide, d’accompagnement et de soins à domicile, « le compte n’y est pas ». La mesure qui instaure une astreinte infirmière mutualisée entre plusieurs établissements d’un même territoire cristallise leur mécontentement : « Ces mesures ne répondent pas aux attentes et aux revendications des salariés pour l’amélioration de la prise en charge des personnes âgées. […] La ministre préconise la présence d’une infirmière mutualisée d’astreinte de nuit sur plusieurs établissements alors que nous réclamons une présence 24h/24 dans tous les établissements. » « Le montant des dotations supplémentaires est très insuffisant et ne correspond en rien aux besoins », ajoute-t-elle. Le compte n’y est pas pour la CGT, qui réclame un ratio d’un professionnel pour chaque résident alors que ces mesures ne permettront déjà pas d’atteindre le ratio de 60 soignants pour 100 résidents, préconisation de la mission d’information parlementaire menée par les députées Monique Iborra (LRM) et Caroline Fiat (LFI) en mars dernier(1).

Notes

(1) Voir ASH n° 3052 du 16-03-18, p. 10.

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