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EHPAD : la disparition programmée du préposé

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Les établissements publics hébergeant des personnes âgées ou des adultes handicapés dont la capacité d’accueil est supérieure à 80 places autorisées ont l’obligation légale de désigner un mandataire judiciaire, préposé d’établissement. Mais faute de financement, cette obligation n’est pas toujours respectée.

Les mandataires judiciaires à la protection des majeurs (MJPM) préposés d’établissements sanitaires et médico-sociaux sont-ils en voie de disparition ? Selon une enquête de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), les effectifs ont baissé de 25 % entre 2009 et 2011 et cette dégringolade se poursuit, année après année. Actuellement, les MJPM préposés d’établissements ne prennent en charge que 5 % des mesures confiées à des professionnels, contre 8 % en 2011. Si la loi de 2007 indique que la désignation d’un MJPM est obligatoire dans un établissement médico-social public à partir d’un seuil de 80 places autorisées, certaines structures peinent à y répondre faute de financement.

Inégalité de financement

Contrairement aux autres opérateurs tutélaires, les préposés d’établissements ne bénéficient pas d’un financement d’Etat basé sur des indicateurs d’activité. Leur rémunération est ponctionnée sur la section « hébergement » pour les établissements médico-sociaux.

« Cette inégalité de financement entre les services de protection des majeurs entraîne une inégalité de traitement des citoyens devant la loi : les personnes protégées suivies par un service de protection juridique de droit privé n’ont pas de frais supplémentaires à payer alors que celles qui sont suivies par un service de protection des majeurs de droit public rattaché à un établissement ou service médico-social doivent payer dans leur tarif hébergement le coût lié à ce service », dénonce la Fédération hospitalière de France (FHF), qui chaque année dépose une proposition d’amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour faire évoluer la situation.

« Le législateur multiplie les obligations pour les établissements publics mais sans leur attribuer des ressources supplémentaires pour les mettre en œuvre. La protection des majeurs n’est pas mentionnée dans le socle minimal de prestations des EHPAD », explique Annie Lelièvre, responsable du pôle « autonomie » à la FHF. « La solution de certains départements a été de majorer le tarif hébergement pour les personnes âgées qui ont un mandataire judiciaire. »

Selon une étude réalisée par la Fédération hospitalière de France et l’Association nationale des mandataires judiciaires à la protection des majeurs (ANMJPM), 90 % des directeurs d’EHPAD interrogés considèrent que l’existence d’un mandataire judiciaire à la protection des majeurs exerçant au sein de l’établissement représente « une plus-value pour les personnes personne âgées sous protection ». Ce n’est donc pas un manque de volonté mais bel et bien un manque de moyens. « 36 % des MJPM exercent dans le cadre de coopérations entre établissements [1] mais la mutualisation n’est pas toujours possible quand il y a une grande distance géographique entre les structures », souligne Annie Lelièvre.

Fabienne Dutoit, MJPM au centre hospitalier intercommunal de Wasquehal (Nord) et déléguée régionale Haut-de-France et Haute-Normandie au sein de l’ANMJPM, intervient sur 13 établissements dans le cadre d’une convention et gère 54 mesures « majoritairement de personnes âgées en EHPAD et de personnes atteintes de troubles psychiatriques qui vivent désormais en EHPAD ».

« Nous remplissons un rôle essentiel dans le lien entre la personne protégée et l’établissement. Le préposé d’établissement a pour atouts la proximité avec les résidents, les familles, les équipes soignantes, sa connaissance des problématiques propres aux structures d’hébergement, des pathologies du vieillissement. Il participe au projet de vie de la personne âgée en EHPAD et assiste aux conseils de la vie sociale », égrène-t-elle. « C’est un avantage indéniable pour le majeur protégé d’avoir quelqu’un à demeure. Et nous sommes totalement indépendants de notre hiérarchie », insiste-t-elle.

Hétérogénéité

Dans son rapport en 2016, le défenseur des droits pointait du doigt « une grande diversité de grades et de statuts » entre les préposés d’établissements, « alors même qu’ils exercent un métier à niveau de responsabilité équivalent ».

« Certains de mes collègues sont en catégorie C, d’autres en catégorie B. Compte tenu des missions confiées, la responsabilité engagée mériterait un positionnement en catégorie A. La commission des mandataires judiciaires à la protection des majeurs protégés des établissements publics hospitaliers (COMAJEPH) du Nord-Pas-de-Calais a établi une fiche de poste mais elle n’est pas reconnue », précise Fabienne Dutoit. « Faute de moyens alloués aux établissements pour nous engager, faute de statut, j’ai la crainte qu’à un moment le MJPM en établissement ne disparaisse alors qu’il apporte un supplément d’âme aux majeurs protégés. »

Notes

(1) Convention, groupement de coopération sociale ou médico-sociale, groupement de coopération et plus récemment les groupements hospitaliers de territoire.

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