« L’idée est partie d’une enquête menée en hiver 2016, raconte Thomas Baude, éducateur spécialisé au SAMU social de Paris, en charge de la mission Interface qui vise à orienter et accompagner les sans-domicile fixe dans des structures adaptées. Elle a mis en lumière le fait que 16 % des sans-abri rencontrés en centres d’hébergement ont plus de 60 ans et que la grande majorité d’entre eux souhaitaient aller en EHPAD. »
Car avec une espérance de vie de 49 ans(1), contre 82 ans pour le reste de la population, les sexagénaires représentent en réalité la part des sans-abri les plus âgés. Ils sont souvent concernés par des maladies qui se développent habituellement beaucoup plus tard et leur perte d’autonomie peut être importante. Or, les centres d’hébergement d’urgence ne leur sont pas adaptés.
Mais faire accepter le dossier d’une personne sans-domicile fixe par un EHPAD n’est pas facile : « Il y a une réelle appréhension de la part du personnel des établissements, poursuit Thomas Baude. Ils craignent l’arrivée d’une population souffrant de troubles du comportement, ou d’addiction à l’alcool. Il faut faire en amont tout un travail sur les stéréotypes. » Un suivi est également mis en place pour les cas les plus difficiles : « J’interviens régulièrement auprès des personnes placées, pour certains depuis l’été 2017. »
Sur les 83 personnes accompagnées par la mission, seules 12 ont trouvé une place, en EHPAD ou en résidence autonomie, 13 sont en attente. Une démarche qui commence à porter ses fruits, mais qui ne peut concerner tout le monde : environ la moitié des sans-abri vieillissant rencontrés en centres d’hébergement sont sans papiers. « Sans titre de séjour, ils ne peuvent avoir d’aide sociale, ni entrer en EHPAD, dénonce Thomas Baude. Un référent se charge de leurs démarches administratives, mais en attendant, je ne peux rien faire peur eux. »
(1) Estimations du collectif Les Morts dans la rue.