Après deux manifestations inédites des personnels des EHPAD (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), les 30 janvier et 15 mars derniers, pour dénoncer un manque criant de moyens et une baisse de la qualité de l’accompagnement des personnes âgées, la crise que traverse ces établissements pourraient bientôt trouver une porte de sortie. Dimanche 15 avril, interrogé sur BFMTV, le président de la République a affirmé prendre « l’engagement solennel » de s’atteler au chantier de la dépendance afin d’en « construire un financement pérenne » dont les bases devraient être posées fin 2018-début 2019. « C’est la collectivité nationale qui va devoir prendre ce financement en charge », a-t-il précisé.
Une annonce saluée par l’Association des directeurs au service des personnes âgées (ADPA). « Le président de la République annonce lui-même que l’amélioration des services à la personne est une nécessité pour notre société, et ce, avec un calendrier assez court. C’est un sérieux motif d’espoir », affirme Romain Gizolme, directeur de l’ADPA. « Mais tout n’est pas réglé. Il faut savoir maintenant quelles seront les modalités de financement, souligne Stéphane Landreau, secrétaire générale de la Fédération de l’aide à domicile (Fnaafp). Nous ne voulons pas passer par le secteur privé avec les assurances, comme l’a suggéré Agnès Buzyn. Et tout dépend de ce qu’on décide d’englober : est-ce qu’on va prendre en charge l’hébergement ? Les besoins risquent d’être conséquents. »
Plusieurs pistes ont été évoquées par le président, dont celle, déjà présentée par la ministre de la Santé jeudi 12 avril, d’instaurer une deuxième « journée de solidarité », journée travaillée non payée. Celle-ci a rapporté près de 2,5 milliards en 2017. Une somme qui reste pourtant bien loin des besoins selon Stéphane Landreau : « Les études qui se sont penchées sur le coût de la dépendance, l’estime au-delà de 10 milliards par an. » Même son de cloche du côté de la Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées (Fnadepa) : « Si elle pourrait constituer un premier pas important, seule, cette piste de financement ne suffira pas. » D’autant que le secteur, particulièrement sous-tension devrait bientôt connaître un « choc démographique », selon l’expression même du président. Il devrait y avoir, selon les projections de l’INSEE, 5 millions de personnes de plus de 85 ans en 2040 et 2,3 millions en situation de dépendance à l’horizon 2060.
Autre piste avancée par Emmanuel Macron, l’instauration d’un cinquième risque dédié à la dépendance au sein de la sécurité sociale, aux côtés des quatre branches existantes (maladie, accidents du travail, retraites, famille). Loin d’être une nouvelle proposition, la création d’une cinquième branche avait été promise par Nicolas Sarkozy lors de sa campagne de 2007. Maintes fois repoussée, la mesure avait finalement été abandonnée en raison de son coût.
Mais les choses pourraient cette fois-ci être différentes, selon Romain Gizolme, qui évoque un réel changement de paradigme. « On ne parle plus de “charge” mais d’une “chance” pour l’avenir de notre société, et notamment d’une opportunité économique avec des centaines de milliers d’emplois potentiels. Emmanuel Macron a affirmé que nous n’aurons “pas d’autres choix” que d’investir. Nous serons là, organismes, professionnels et associations pour le lui rappeler. »
Pour l’heure, rien n’est encore arrêté, souligne-t-on à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Une concertation, qui se veut large, devrait s’ouvrir prochainement.