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La sédation forte ou l’euthanasie cachée

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Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a adopté un avis sur la fin de vie plaidant pour le droit à « une sédation profonde explicitement létale ». Le rapport met aussi en évidence l’insuffisance de l’offre de soins palliatifs et ses inégalités territoriales.

Appelant à « affronter le tabou », et « l’urgence de la situation », le Conseil économique, social et environnemental (CESE) s’est immiscé dans le débat – particulièrement sensible comme en témoigne l’intérêt de l’opinion pour l’emblématique affaire « Vincent Lambert » – de la fin de vie.

Le CESE s’est prononcé favorablement sur la légalisation de l’euthanasie tout en évitant scrupuleusement l’usage du terme. L’assemblée préconise d’ajouter « aux droits aujourd’hui reconnus à la personne malade par la loi celui de pouvoir demander au médecin, y compris à travers la rédaction de directives anticipées ou la désignation d’une personne de confiance, de recevoir, dans des conditions strictement définies, une sédation profonde expressément létale ». Cet avis, intitulé « Fin de vie : la France à l’heure des choix », a été adopté à 107 voix pour, 18 contre et 44 abstentions.

Mourir dans la dignité

Pour Jean-Luc Romero, auditionné en qualité de président de l’Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD), ces préconisations vont dans le bon sens. « On meurt mal en France, et l’accès universel aux soins palliatifs n’est absolument pas appliqué », constate-t-il. « Ce n’est pas normal que dans le pays des droits de l’Homme, des citoyens soient obligés de fuir comme des parias pour mourir », s’indigne Jean-Luc Romero, pour qui cet avis fait avancer considérablement le débat.

La loi « Claeys-Leonetti »(1), adoptée le 2 février 2016, qui établit notamment l’interdiction de « l’obstination déraisonnable » du corps médical et de la « prolongation artificielle de la vie » du patient et qui précise le protocole de sédation continue, ne tranche pas explicitement la différence entre le fait d’endormir un patient jusqu’à son décès et celui d’accélérer sa mort. Pourtant, selon les estimations de l’Institut national d’études démographiques faites en 2010, l’euthanasie active représente 2 000 à 4 000 décès par an en France. Pratiqués dans la plus absolue clandestinité, ces actes induisent, selon le CESE, « des inégalités » et conduisent à des abus. « Près de deux tiers de ces euthanasies clandestines seraient décidées par les équipes soignantes sans consentement de la personne », précise le texte.

Par ailleurs, le rapport souligne l’insuffisance de l’offre d’accès aux soins palliatifs en raison du manque de moyens ou des freins moraux ou juridiques. Chaque année, de nombreux concitoyens vont chercher l’apaisement ultime en Suisse, en Belgique, au Luxembourg ou aux Pays-Bas, qui ont tranché la question. Un phénomène que le Conseil économique, social et environnemental épingle comme une inégalité face à la fin de vie. En parallèle, le projet d’avis rappelle l’importance d’entériner la liberté de choix du corps médical en proposant d’« introduire dans la loi une clause de liberté de conscience ».

Inégalités territoriales

Selon les chiffres du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie, en 2013, sur 518 673 décès (de personnes majeures) enregistrés, 311 000, soit 60 %, auraient eu besoin de soins palliatifs. Par ailleurs, la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs indique que 70 % des lits en unité de soins palliatifs étaient, en 2012, concentrés dans cinq régions (Ile-de-France, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Rhône-Alpes, Bretagne, Hauts-de-France).

Alors que le suicide assisté ou l’euthanasie sont toujours interdits par la loi, être libre de pouvoir choisir le moment et le lieu de sa mort est considéré par un grand nombre de Français comme un droit fondamental. En 2017, selon un sondage IFOP, 95 % se disaient d’ailleurs favorables à l’euthanasie.

Notes

(1) Voir ASH n° 2946 du 5-02-16, p. 36.

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