Le président de la République a-t-il atteint les limites de la formule magique qui a fait sa fortune politique : le « ni droite, ni gauche » ou le « à gauche et à droite »… en même temps ? Son discours devant les hauts dignitaires de l’Eglise, où il a affirmé qu’il fallait réparer les relations entre les catholiques et l’Etat, suscite l’ire de la gauche, qui voit dans cette main tendue une entorse à la laïcité.
L’opinion considère – selon les sondages – que l’équilibre a été rompu par la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et l’augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG). Les deux mesures n’ont pas de rapport entre elles, mais la concomitance de l’annonce d’un cadeau fiscal de plusieurs milliards d’euros aux plus riches et de l’alourdissement, sans compensation, d’une charge sociale pour les retraités à revenus moyens, voire faibles, a brouillé le message qui, aux yeux de certains, n’était qu’une posture, voire une imposture électorale… La théorie du ruissellement selon laquelle, débarrassés d’une charge fiscale, les détenteurs de capitaux investiront et relanceront ainsi la croissance, ce qui profitera à tout le monde, ne convainc personne, même pas les économistes, y compris les plus libéraux.
Les limites de cet équilibre commencent à pointer leur nez dans le champ social et médico-social. Dans la même semaine, on a assisté à deux événements contradictoires. D’un côté, une grande opération de communication politique orchestrée par le Premier ministre pour annoncer la stratégie nationale pour l’autisme (voir page 6). Avec 344 millions d’euros mis sur la table, des mesures multiples et variées, un délégué interministériel et des objectifs ambitieux, le retard français en matière de détection de l’autisme et d’inclusion scolaire, sociale et économique des autistes sera rattrapé, parole d’Edouard Philippe…
De l’autre, la présentation (voir page 12) du projet de loi « évolution du logement, de l’aménagement et du numérique » (ELAN), qui prévoit que seuls 10 % des futurs logements neufs devront répondre entièrement aux normes d’accessibilité pour les personnes handicapées. Les 90 % ne devront l’être que partiellement. Le gouvernement justifie cette disposition en expliquant que ces normes, qui ne concernent qu’une minorité de la population, constituent un handicap – si l’on peut dire – à la relance de la construction et du secteur du bâtiment. Cela fait le bonheur des promoteurs et des entreprises de BTP mais pas celui des associations, qui sont vent debout.
C’est surtout un message contradictoire de la part d’un gouvernement qui affirme sa volonté de mettre fin à toutes les discriminations et envisage de renforcer les obligations des employeurs en matière d’emploi des personnes atteintes d’un handicap.
Ces deux exemples montrent qu’une clarification s’impose. A l’heure du bilan de la première année de son mandat, Emmanuel Macron peut se rassurer en constatant qu’il a évité bien des écueils avec des réformes difficiles, comme celles du droit du travail, de l’éducation et même de la SNCF, dont le projet est soutenu par l’opinion. Mais son exercice de funambulisme politique pourra-t-il durer éternellement ? Il arrive que les funambules tombent… à droite ou à gauche…