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Christine Meignien : « Le retard est abyssal pour les adultes »

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Pour la présidente de la Fédération française Sésame Autisme, la stratégie nationale pour l’autisme ne va pas améliorer la situation des adultes mais porte des avancées pour les enfants.
Quel regard portez-vous sur ce quatrième plan « autisme » ?

Nous sommes favorables à tous les axes concernant l’école, nous les réclamions de longue date. Pour cette génération qui va avoir accès à un diagnostic et à une prise en charge précoce et qui bénéficiera d’une scolarisation effective, c’est un motif d’espoir : nous savons que plus ils sont pris en charge tôt, plus leurs parcours sont simplifiés. Et le changement des mentalités passera par l’école : plus on y verra des enfants autistes, plus la société sera prête à les intégrer. Nous sommes en revanche particulièrement inquiets pour les adultes. Rien n’est prévu pour eux, alors qu’on sait que la demande est forte : dans de nombreux départements, il y a des listes d’attente de plusieurs centaines de personnes pour des foyers de 30 places.

Quel est l’état actuel de leur prise en charge ?

Beaucoup d’adultes autistes sont en attente de réponse pour une place en établissement, beaucoup sont hospitalisés à tort et beaucoup sont pris en charge par leur famille vieillissante. Nous faisons face à un retard abyssal en France, avec de plus en plus de personnes qui s’exilent pour être prises en charge en Belgique et avec un tiers, voire la moitié, des pensionnaires d’instituts médico-éducatifs qui ont dépassé 30 ans alors que ces établissements sont réservés aux enfants.

L’accent mis sur le repérage ne va-t-il pas changer les choses ?

Sur les 700 000 autistes que compte la France, seuls 75 000 ont été diagnostiqués : les autres, on ne sait pas où ils sont. Ce problème a été pris en compte par le gouvernement, à travers le repérage précoce chez les enfants et l’idée de mieux repérer et diagnostiquer les adultes, dans les hôpitaux psychiatriques notamment. Or les hôpitaux psychiatriques viennent déjà régulièrement vers nous parce qu’ils prennent en charge des autistes depuis des dizaines d’années, mais faute de place ailleurs ils y restent. Et une fois qu’on les sort des hôpitaux, qu’est-ce qu’on en fait ? Après des années passées dans un enfermement parfois terrible, certains n’ont plus l’habitude de s’habiller, d’avoir des activités extérieures. Il faut qu’ils se réapproprient des gestes anodins du quotidien. Les en sortir est donc une bonne chose, mais il faut les accompagner à la hauteur de leurs besoins et ça, c’est loin d’être évident.

En finir avec la tradition de forte institutionnalisation de la prise en charge, est-ce une bonne chose ?

Les 8 000 enfants naissant chaque année avec un trouble du spectre autistique n’auront pas tous besoin d’un accompagnement 24 heures sur 24, mais ce sera quand même le cas pour une majorité d’entre eux. Or la stratégie nationale n’annonce rien de plus quant à leur prise en charge. On a peur aussi de voir émerger de véritables ghettos en favorisant l’inclusion de tous ceux qui peuvent travailler et en laissant tous les autres en établissement. Et contrairement à ce que dit le gouvernement, la sortie des « plus autonomes » ne permettra pas de libérer énormément de places. Au sein de nos établissements, nous accompagnons les personnes vers le travail et aussi parfois vers le logement, mais cela ne représente que 10 % de nos effectifs.

Quid du répit pour les familles ?

Pour ce qui touche au répit, je reste sceptique. Depuis la parution d’un décret l’été dernier, on demande aux établissements d’offrir la chambre de chaque résident parti en week-end dans le but de permettre aux familles d’avoir un court répit. La chambre d’un résident n’est pas une chambre d’hôpital, certains ont fait une demande d’aide personnalisée au logement reversée aux établissements : ça devient leur chez-eux personnalisé, et il faut donc qu’ils acceptent de partager leur lit avec des inconnus. On ne peut pas avoir cette politique hospitalière dans un foyer. Surtout que, le week-end, quand certains résidents sont partis, les éducateurs peuvent proposer des sorties aux personnes autistes qui restent, leur offrir une meilleure qualité de vie que ces dernières ne pourront plus avoir avec cette logique de flux tendu et de budgets réduits au maximum.

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