Nice. Un ingénieur homosexuel est retrouvé sauvagement assassiné dans sa villa. Crime sexuel ? C’est l’hypothèse de la police. Pas celui de Ghjulia Boccanera, Diou pour les intimes, une détective privée haute en couleur aux origines italo-corses à qui Dorian, l’amant de la victime, a fait appel pour retrouver le criminel. Sur fond de cabaret kitsch et de travestis, réfugiés syriens et fachos, promoteurs et « prom’ » des Anglais en berne, vieux costumes en tergal et lèvres botoxées, vieilles ruelles niçoises et vendeuses de poissons, libéralisme et clin d’œil à Charb et Wolinski… Boccanera va mener l’enquête de main de maîtresse. Autant que l’intrigue, très mouvementée, c’est elle qu’on aime. Elle qui, malgré les discours convenus et moralisateurs, a osé se faire ligaturer les trompes pour ne pas avoir d’enfant et qui, du coup, s’est fait larguer par Jo, son compagnon : « J’aime les enfants, les enfants des autres, tous les enfants de la terre mais je ne me suis jamais sentie en droit ni en capacité de devenir mère. Même pour l’homme le plus drôle, le plus gentil et le plus attentionné de la terre. » Elle qui, à la cinquantaine, porte des Dr. Martens coquées et roule en Vespa rouge – sa « guêpe », comme elle l’appelle. Elle qui est insomniaque et accro au café comme aux somnifères. Elle qui connaît sa ville comme sa poche et qui a la nostalgie des vrais gens et du port ouvrier où son grand-père l’emmenait pêcher quand elle était petite… Elle qui n’est jamais du côté du manche et toujours prête à en découdre avec les cons et les prêts à tout pour réussir… Elle encore qui nous donne un peu l’impression d’être notre copine ! Y aurait-il dans Diou quelque chose de l’auteure, Michèle Pedinielli, qui, après avoir été journaliste et formatrice pendant quinze ans, signe son premier polar ? Possible. Une chose est sûre : c’est un roman qu’on ne lâche pas, au style direct, vivant, sans prise de tête. Profondément humain. Et ça fait du bien. Boccanera est née, Nestor Burma n’a plus qu’à aller se rhabiller…
Boccanera
Michèle Pedinielli – Ed. de l’Aube – 17,90 €