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Pr Didier Sicard : « Le dépistage prénatal est la porte ouverte à l’eugénisme »

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Quelle est la différence entre le dépistage prénatal et le diagnostic préimplantatoire ?

Le diagnostic préimplantatoire est le diagnostic sur l’embryon issu de la fécondation in vitro. Concrètement, au laboratoire, on regarde les embryons nés de la fusion des gamètes mâles et des gamètes femelles afin d’observer s’il y a des anomalies, que ce soit sur le plan génétique ou sur le plan chromosomique. L’analyse se fait donc avant d’implanter l’embryon pour être certain qu’il n’est pas porteur de la trisomie 21 ou d’autres anomalies. Le dépistage prénatal se fait dans le sang de la mère enceinte qui héberge des cellules fœtales. On va regarder si ce fœtus est porteur d’anomalies. Ce dépistage peut aussi se faire par une aiguille en traversant le placenta de la mère en ponctionnant directement le sang du fœtus. Le premier est appelé « dépistage prénatal non invasif » (DPNI) et le second est l’« amniocentèse ». Le problème est que l’amniocentèse comporte des risques de fausse couche ou d’accouchement prématuré.

L’an dernier, la Haute Autorité de santé a préconisé la généralisation du DPNI. Ce qui a suscité quelques remous dans la communauté scientifique. Pourquoi et qu’en pensez-vous ?

L’amniocentèse est habituellement effectuée entre la quinzième et la dix-septième semaine de grossesse. Or, alors que l’avortement pour raisons personnelles est complètement libre jusqu’à la douzième semaine de grossesse, on peut désormais faire une recherche de cellules fœtales dans le sang dès le douzième ou quinzième jour de grossesse. On peut donc transformer l’avortement pour des raisons personnelles en un choix qui est lié à l’état médical de l’embryon. Même si ce jugement peut paraître excessif, c’est donc ouvrir une porte à l’eugénisme : on interrompt une grossesse non plus pour des raisons personnelles mais parce que l’embryon n’est pas conforme à ce que les parents voudraient. Le débat n’est pas simplement entre une maladie génétique ou une maladie chromosomique comme la trisomie, mais peut aller jusqu’à la sélection entre un garçon ou une fille. A partir du moment où le diagnostic est fait sur une goutte de sang avant la quinzième semaine, cela ouvre, en tout cas intellectuellement, la porte à tous les dépistages voulus par les parents et plus simplement à des dépistages médicaux.

Selon vous, jusqu’où peut-on dépister la trisomie 21 ? Y a-t-il des limites à poser ?

Ce n’est pas comme cela qu’il faut poser le problème. Le sujet, c’est le regard que la société porte sur les enfants et les adultes trisomiques, que je trouve dévastateur. Il y a une espèce de déshumanisation de la personne trisomique. Dans les facultés de médecine, on considère qu’il faut dépister la trisomie comme l’on dépiste le VIH ou certains cancers. A savoir comme quelque chose qu’il faut éradiquer. Cela veut dire que l’on éradique des êtres humains. Je ne dis pas qu’il ne faut pas dépister la trisomie, mais en faire une généralisation, une sorte d’obsession, me paraît être une déshumanisation de la personne trisomique.

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