Les directeurs d’EHPAD (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) et les journalistes sont à couteaux tirés. Les premiers s’inquiètent du « sensationnalisme » dont font preuve les seconds, s’agissant de la couverture médiatique de la crise qui secoue le milieu. Les journalistes, eux, reprochent aux directeurs de leur mettre des bâtons dans les roues quand ils tentent de franchir les portes de leurs établissements pour raconter ce qu’il s’y passe. L’exposition médiatique serait-elle un cadeau empoisonné ? Les intervenants de l’édition 2018 des Assises nationales des EHPAD ont tenté de répondre à cette question à travers quelques exemples.
L’histoire des salariées des Opalines à Foucherans (Jura) aurait pu passer inaperçue. Mais c’était sans compter sur l’une des aides-soignantes, qui appelle alors Florence Aubenas, plume du Monde, afin qu’elle couvre le mouvement social. Intitulée « On ne les met pas au lit, on les jette », l’enquête de la reporter met le feu aux poudres en pointant les dysfonctionnements de l’établissement. On y découvre les conditions de travail éreintantes des aides-soignantes, qui ont 15 minutes pour effectuer la toilette, l’habillement, le petit-déjeuner et qui, malgré elles, malmènent les pensionnaires.
Pour Claude Jarry, président de la Fnadepa (Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées), la couverture par des médias nationaux des mouvements comme celui de Foucherans est un mal nécessaire. D’un côté, il permet « que le débat soit posé durablement », mais, de l’autre, « il faut prendre garde à ne pas faire fuir les familles ». Par ailleurs, l’image écornée des EHPAD, comparés parfois à des « mouroirs » dans la presse, est « difficile à vivre pour les soignants mais aussi les directeurs qui y investissent beaucoup d’énergie », estime Claude Jarry, dont la fédération a apporté son soutien au mouvement social en cours.
Serge Gainsbourg pourrait dire à propos des relations entre les EHPAD et les médias que c’est « Je t’aime, moi non plus ».
(1) Les Assises se sont tenues les 12 et 13 mars – Voir ASH n° 3052 du 16-03-18, p. 6 à 9.