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Réforme : les sénateurs prennent le train

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Suspendre la réforme tarifaire, étendre le droit de prescription des médecins coordonnateurs et développer les résidences autonomie. Telles sont les principales propositions d’un rapport sénatorial rendu public le 7 mars. Revue de détails.

Peut-on encore parler de « train de sénateur » ? La commission des affaires sociales du palais du Luxembourg a devancé celle des députés au sujet des EHPAD. Alors qu’à l’Assemblée, Monique Iborra (LREM, Haute-Garonne) doit livrer ses conclusions le 14 mars – complétant sa récente « mission flash »(1) –, le sénateur Bernard Bonne (LR, Loire) a rendu sa copie ce mercredi, après un mois de travaux. Le Sénat a publié ses préconisations dans la foulée.

Alors que le gouvernement maintient la réforme controversée de la tarification des EHPAD lancée en janvier 2017, malgré les assouplissements annoncés par Agnès Buzyn (voir encadré), Bernard Bonne plaide pour l’« interrompre » le temps de la « réorienter ». Il ne conteste pas le cœur du dispositif, c’est-à-dire la « redéfinition des dotations aux soins et à la dépendance des établissements sur des critères objectifs ». Mais il juge « indispensable » de mener une enquête sur la situation de la minorité d’EHPAD, publics pour la plupart, dont la réforme réduit les dotations. Surtout, la réforme tarifaire souffre d’une « coordination insuffisante » avec l’obligation faite aux établissements, là aussi depuis 2017, de signer un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) avec l’agence régionale de santé et le département. Or, ces nouveaux contrats laissent aux gestionnaires « une plus grande liberté », en leur permettant de faire passer des crédits d’une section du budget à une autre, mais aussi de réutiliser les excédents dégagés en fin d’exercice. Bernard Bonne suggère de faire redémarrer la réforme tarifaire une fois que les CPOM auront atteint une « couverture suffisante ».

« Crise profonde » des personnels

Cela dit, se focaliser sur la tarification comporte un « risque d’occultation de problèmes plus profonds », avertit le rapporteur. Il invite d’abord à se concentrer sur les ressources humaines en EHPAD, face à la « crise profonde » du secteur et à ses symptômes : « épuisement, absentéisme, perte de vocation des personnels ». Il suggère notamment de doter le médecin coordonnateur d’« une capacité de prescription individuelle », au-delà des interventions en urgence actuellement permises… Une idée déjà avancée sous plusieurs gouvernements, mais jamais mise en œuvre, car contestée par les médecins libéraux. Le médecin coordonnateur, en revanche, ne pourrait plus cumuler sa fonction avec celle de médecin traitant. Bernard Bonne rouvre d’autres dossiers polémiques, comme l’idée de déléguer certains actes infirmiers aux aides-soignants ou celle de développer « des cycles de travail fondés sur des journées en 12 heures », avec des temps de récupération.

Plus largement, le rapporteur souhaite soutenir une réflexion sur « l’EHPAD de demain ». Il plaide en particulier pour que les établissements proposent des parcours « moins médicalisés » et « plus intégrés » entre EHPAD, services à domicile et hébergement intermédiaire. Il avertit en effet que « l’ehpadisation de l’hébergement du grand âge se fait […] au détriment des formes alternatives de l’accueil de jour ou de l’hébergement temporaire ». Il décrit comme un « modèle d’avenir » les « résidences autonomie » (nouveau nom des logements-foyers), qui accueillent des résidents moins dépendants que ceux des EHPAD. Pour Bernard Bonne, il faudra « élever les crédits alloués au forfait autonomie », qui finance des actions de prévention dans ces structures. Le sénateur se dit prêt à « relancer le débat » sur le financement de l’aide aux personnes âgées, en jouant davantage sur le levier fiscal et moins sur les crédits de l’assurance maladie – mais il ne se prononce pas sur l’ampleur de l’effort nécessaire. Il propose par ailleurs d’« autoriser les établissements à pratiquer des prix différenciés en fonction du niveau de ressources des résidents, afin de diminuer le reste à charge des plus modestes ». Une autre piste citée serait de « développer le recours au patrimoine privé » pour financer la prise en charge de la dépendance (par exemple en développant l’incitation fiscale aux ventes en viager).

Les parlementaires Les Républicains étant majoritaires au Sénat mais minoritaires à l’Assemblée, le gouvernement ne devrait pas suivre l’ensemble des préconisations de ce rapport. Il contribuera cependant aux débats de ces prochaines semaines, qui seront marquées par la grève du 15 mars dans le secteur de l’aide aux personnes âgées. Quant à la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, elle compte présenter d’ici à la fin mars sa « future feuille de route relative à l’accompagnement du vieillissement ».

Agnès Buzyn adoucit la réforme

« Il faut que nous trouvions un mécanisme qui, sans remettre en cause les fondements de la réforme [de la tarification], qui était vertueuse dans sa conception », permette d’en « neutraliser les effets négatifs, par exemple en compensant, pendant une période à déterminer, un an ou deux ans, les pertes de recettes pour les EHPAD en difficulté. » Agnès Buzyn, la ministre des Solidarités et de la Santé, a fait cette déclaration, mercredi, devant la commission des affaires sociales du Sénat. Et a fait une annonce qui interpelle : « de 20 % à 25 % » des EHPAD sortiraient de la réforme en 2023 avec « une recette globalement réduite », car ils peuvent perdre plus de crédits sur leur enveloppe « dépendance » qu’ils ne gagneront sur leur dotation « soins ».

Notes

(1) Voir ASH n° 3025 du 15-09-17, p. 5.

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