Korian, le leader européen des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), a annoncé début mars son entrée à hauteur de 70 % au capital d’Ages&Vie, une société franc-comtoise née en 2008. Forte d’une trentaine de sites et présente dans cinq départements de la région Bourgogne, Ages&Vie développe un concept novateur : la colocation de personnes âgées, sur le modèle de la « coloc » entre étudiants ou jeunes urbains.
Mais plutôt que de colocation, Cindy Schwehr, chargée de plusieurs maisons Ages&Vie, préfère le terme de « domicile partagé », une nuance à ne pas sous-estimer. « Chaque maison peut accueillir sept locataires, du moins dépendant au plus dépendant », détaille-t-elle. Chaque résident possède une chambre de 25 m2 à 30 m2, dotée d’une salle de bain et de toilettes privatives. Une grande pièce de vie commune est réservée aux repas et aux activités. Dans chaque maisonnée, des assistants de vie se tiennent aux côtés des personnes âgées, assurent la préparation des repas et épaulent les locataires dans leurs tâches du quotidien, comme la toilette, le coucher et le lever, tout en veillant au suivi de leur traitement médical. Un cadre et une qualité de vie qui tranchent avec ceux des maisons de retraites traditionnelles, dont le modèle semble à bout de souffle.
« L’idée d’Ages&Vie, c’était de créer un lieu de vie dans lequel on peut se projeter. Nous avons pensé à ce que nous voudrions comme structure pour nos proches », retrace Simon Vouillot, cofondateur du groupe. Avec ce lieu de vie intergénérationnel à taille humaine, à contre-courant du modèle actuel de l'EHPAD surchargé et surmédialisé, Ages& Vie détonne.
Du côté de Korian, ce mariage de raison a un intérêt stratégique. Sophie Boissard, directrice générale du groupe, écrit dans un communiqué de presse que « le concept des maisons Ages&Vie est tout à fait complémentaire de l’offre actuelle de Korian. Il va nous permettre d’élargir nos services de manière innovante vers des personnes plus autonomes ». En clair, il s’agit d’anticiper l’évolution vers une diversification des modes de prise en charge des personnes âgées selon leur degré de dépendance, alors que le système actuel est binaire entre le domicile et le tout-établissement.
De son côté, Charles-Antoine Pinel, directeur général du pôle « seniors » chez Korian, nous confirme que cette acquisition est l’assurance de mettre le pied sur un marché porteur tout en « apportant nos expertises et nos moyens financiers pour un développement national rapide ». L’objectif affiché est d’accueillir 3 000 nouveaux résidents et de créer 2 000 emplois d’ici six ans au sein de ces « silver colocs ». Les entrepreneurs franc-comtois n’ont pas d’inquiétude face à ce partenariat avec le géant européen. Simon Vouillot l’assure : « Cela ne change pas notre nature, mais cela nous permet d’être plus ambitieux. Korian possède la force de frappe qui va nous permettre de nous développer plus vite à l’échelon national, sans perdre de vue notre identité. »