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Florence Arnaiz-Maumé « L’avenir est aux hébergements mixtes »

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Pour la déléguée générale du Syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées (Synerpa), le développement des structures intermédiaires est une évolution indispensable pour répondre aux nouveaux besoins de prise en charge.
La prise en charge des personnes âgées dépendantes est très organisée autour des EHPAD – ehpado-centrée –, comme le système de santé est hospitalo-centré. Le vieillissement de la population va créer une demande diversifiée en fonction du degré de dépendance. Or, actuellement, le choix est entre le domicile et l’établissement. Ne faudrait-il pas décloisonner ce système et diversifier les modes de prise en charge en instaurant un parcours allant du domicile jusqu’à l’établissement en passant par des structures intermédiaires ?

C’est ce qui se fait actuellement. Depuis 2010, énormément de groupes d’EHPAD [établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes] se sont développés sur le champ de l’aide à domicile. Se sont structurés également des groupes assez importants de résidences services seniors. Et il y a de plus en plus de projets d’hébergements mixtes, avec de l’EHPAD, des services à domicile, de l’hébergement non médicalisé… C’est à performer, puisqu’on a 7 000 EHPAD pour 500 résidences services seniors. Il y a encore à faire dans le champ du non-médicalisé, mais ça se développe grandement.

En quoi consistent ces résidences seniors ?

Contrairement à l’EHPAD, où l’on est dans une chambre individuelle, on dispose ici d’un appartement avec une cuisine. Au rez-de-chaussée, il y a une série de services : restauration, blanchissage, animations… Ils permettent d’être dans des situations sans accompagnement soignant, même si on peut recevoir des soins à domicile.

Voyez-vous des évolutions possibles ?

C’est difficile à dire, car c’est un modèle nouveau, qui va s’adapter aux générations futures, pour des gens qui auront vécu pendant les Trente Glorieuses, avec une certaine volonté d’avoir des services sans trop d’intrusion. Beaucoup de choses seront faites pour maintenir l’autonomie de la personne. Il faut rappeler que seulement 20 % des plus de 85 ans vont en EHPAD, les autres n’en ont pas besoin. La résidence services seniors va donc naturellement trouver sa clientèle, qui va avoir envie, après 75 ans, de retourner dans un appartement avec des services accessibles, en laissant la maison avec de grandes surfaces, comme le jardin, difficiles à entretenir.

De même qu’il y a des hôpitaux de différents niveaux – du local au centre hospitalier régional –, ne faudrait-il pas instaurer une hiérarchie des EHPAD en fonction du degré de dépendance ?

Beaucoup d’établissements se sont spécialisés dans l’accompagnement de la maladie d’Alzheimer, qui est spécifique, puisque les personnes ont des comportements particuliers : déambulation, fugue, agressivité… Sinon, que ce soit dans le public ou dans le privé, il y a peu ou prou le même type de résidents et donc le même niveau de perte d’autonomie : quand on rentre en EHPAD, il est assez sévère (GIR 1-2). Il y a 15 ans, quand j’ai commencé à travailler dans le secteur, dans un établissement de 100 lits, il y avait encore 10-15 personnes qui étaient totalement valides. Aujourd’hui, il n’y a plus aucun résident totalement valide, car la possibilité de rester à domicile existe. Les EHPAD se sont, de fait, spécialisés progressivement dans la grande perte d’autonomie. Il y avait aussi, à l’époque, des unités de soins de longue durée [USLD] qui n’accueillaient véritablement que des populations GIR 1-2. Les EHPAD ont l’avantage d’avoir une mixité dans l’accueil des personnes atteintes de perte d’autonomie en hébergeant des retraités GIR 3-4, ce qui permet, à l’inverse des USLD, d’en faire des lieux de vie.

Cette évolution vers le parcours n’implique-t-elle pas une profonde réforme du financement, qui irait non plus à la structure mais à l’activité, voire à un forfait patient ?

Je ne sais pas si on ira jusqu’à la tarification à l’activité et s’il faut y aller. Il s’agit quand même de pathologies longues, pas d’actes chirurgicaux qui peuvent se faire en « one shot ». La tarification du secteur médico-social est en train de changer : elle était discutée établissement par établissement, sous forme d’approbation budgétaire. C’est maintenant un forfait dépendance calculé en fonction de la capacité, de la dépendance et du niveau de soin. On passe d’un système où tout se discutait avec les pouvoirs publics, notamment les agences régionales de santé [ARS] et les conseils départementaux, à un système où l’on est soumis à une équation tarifaire.

Il y a un conflit entre la Fédération hospitalière de France et le gouvernement sur la réforme de la tarification qui se met en place actuellement pour faire converger tous les établissements vers une norme de financement. En 2023, chaque établissement rejoindra la norme, soit en récupérant un septième de dotation, soit en le rendant. Certains vont gagner des crédits, d’autres, notamment des établissements publics, vont en perdre. Pour les plateformes de services (hospitalisation à domicile, résidences services…), toutes les activités existent mais ne sont pas financées de la même manière. Si on fait des processus mêlés, il faudra peut-être travailler à un autre processus de tarification, mais cela se fait déjà dans les départements. Dans le cadre des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens qui remplacent les conventions tripartites, on a plus de latitude pour proposer des choses et avoir des tarifications adaptées.

Les métiers médico-sociaux sont difficiles, mal rémunérés et peu attractifs. Dans les EHPAD de demain, les robots remplaceront-ils les personnels soignants ?

Les nouvelles technologies aident les salariés à mieux aider, facilitent le travail, les processus, mais ne peuvent en aucun cas remplacer l’acte apporté par le salarié. Les métiers du soin, l’aide à la toilette, au repas, ne peuvent pas être correctement réalisés par des robots. En revanche, toute la connectique créée autour de l’EHPAD, du domicile, toutes les nouveautés de la « silver économie » facilitent grandement le lien social, avec les familles, l’accompagnement…

Un peu de science-fiction : les transhumanistes promettent un allongement de l’espérance de vie jusqu’à 200, 300 ans, voire plus. Les établissements pourront-ils accueillir des patients de 150 ou 160 ans pour une longue période de 30 ou 40 ans ?

Rien ne dit, dans cette logique, à laquelle il faut quand même adhérer pour commencer à y réfléchir, que si l’allongement de la vie va jusqu’à 150 ans, on tombera en dépendance sévère à 80 ans. On peut espérer que ce soit plutôt la période de vie sans dépendance qui soit plus longue, autrement l’utilité du dispositif est assez minime. Si les organismes sont plus robustes, on pourra à vue de nez aller jusqu’à 100 ans sans déperdition physique. Aujourd’hui, les établissements ne sont pas organisés pour accueillir les gens pendant 40 ans, car ce ne sont que des chambres, et il est difficile d’envisager une période de vie aussi longue avec une forte dépendance. En tout cas, nos infrastructures ne sont pas prévues pour.

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