Il faudra mener « une politique à la fois humaine et exigeante quant au respect du droit et de la loi », mais aussi « efficace, avec un objectif de réduction durable du nombre de bidonvilles dans les cinq ans à venir ». Ce message est délivré aux préfets de région et de département par sept ministères (Intérieur, Justice, Affaires étrangères, Cohésion des territoires, Solidarités et Santé, Travail, Education nationale) et un secrétariat d’Etat (Egalité femmes-hommes) dans une instruction du 25 janvier.
Elle vise, selon son titre, à « donner une nouvelle impulsion à la résorption des campements illicites et des bidonvilles ». Elle « prolonge », sans l’abroger, une circulaire du début du quinquennat Hollande, datée du 26 août 2012(1). Les deux textes posent une méthode assez similaire : mobiliser les acteurs concernés, établir un diagnostic, mettre en place un accompagnement (social, éducatif, sanitaire…).
Le gouvernement décrit des bidonvilles situés « principalement dans les grandes agglomérations », « implantés illégalement sur des terrains ou dans des squats », « habités en majorité par des migrants intra-européens pauvres » (le texte évoque des origines « roumaines et bulgares », notamment). Ils vivent « dans des conditions indignes présentant des risques pour leur santé et leur sécurité, et pouvant créer des tensions avec le voisinage et des troubles à l’ordre public », selon l’instruction.
« Malgré des évacuations répétées au cours de ces dernières années, le nombre de personnes occupant ces bidonvilles n’a pas sensiblement baissé », restant compris, depuis 2012, « entre 15 000 et 19 000 personnes », selon des recensements de la délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement (DIHAL). La France compte actuellement « près de 570 bidonvilles où vivent 16 000 personnes ».
Le gouvernement invite à s’inspirer d’« actions conduites dans certains territoires » (sans plus de précision), qui « ont permis de réduire significativement le nombre de ces bidonvilles […], voire de les résorber complètement ». Les ministres entendent « dépasser l’approche centrée sur les évacuations » et inscrire l’intervention « dans une dimension plus large » alliant logement, formation, emploi, scolarisation des enfants…
Il est « essentiel » que, « le plus tôt possible » et « si possible dès l’implantation », une action « de repérage et diagnostic » soit conduite, ce qui demande une « affirmation de la présence de la puissance publique » sur ces campements. Cela doit ouvrir la voie à une « sécurisation des conditions de vie » (ramassage des ordures, accès à l’eau, notamment), mais aussi à un « encadrement » de l’organisation du campement (« contrôle du site, engagement contractuel des occupants, action de médiation pour l’accès aux droits, relations avec le voisinage »).
Sur cette question « complexe », l’approche « pertinente et efficace » est « celle de la lutte contre la grande précarité », souligne le gouvernement, « ce qui exclut notamment une approche ciblée sur l’origine et la culture réelles ou supposées des personnes ». Mais l’instruction appelle aussi à « des réponses différenciées » en fonction des situations individuelles, notamment en matière de droit au séjour, et elle appelle à une « coopération transnationale avec les pays d’origine ».
Un « partenariat » entre « tous les acteurs concernés » sera nécessaire : régions, départements, communes, associations, bailleurs sociaux, Pôle emploi… sans oublier « les occupants eux-mêmes », lit-on dans le document.
Le gouvernement demande à chaque préfet de lancer des travaux pour finaliser une stratégie territoriale « dans le courant du premier semestre 2018 », sous l’égide d’un « comité de pilotage local ». A l’échelle nationale, le suivi de la mise en œuvre de l’instruction est confié au directeur de la DIHAL, Sylvain Mathieu, qui doit mettre en place « une commission chargée de rendre compte des progrès enregistrés ».
Pour ces actions, une enveloppe spécifique du budget de l’Etat, de 3 millions d’euros, est mobilisable, ainsi que d’autres crédits qui relèvent de nombreux organismes publics français ou du Fonds européen de développement régional (FEDER) et du Fonds social européen (FSE).