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La Société coopérative d’intérêt collectif, une solution pour le secteur social et médico-social ?

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Le ministère des Solidarités et de la Santé a publié une ordonnance1, prise en application de la loi du 26 janvier 2016 qui donne la possibilité aux centres de santé de se constituer en Société coopérative d’intérêt collectif (SCIC). Mais quel est ce statut, en quoi consiste-t-il ?

Cette entreprise d’utilité sociale au service d’un territoire est une conception reproductible et montre qu’il y a autre chose en dehors des associations et des sociétés classiques.

Alors que le sentiment des personnes ne cesse de croître en faveur des entreprises qui prennent en considération l’être humain, la coopérative peut représenter un modèle d’entreprise porteur d’avenir. D’ailleurs, les chiffres montrent bien l’intérêt croissant des porteurs de projet sur ce type de statut. Depuis 2012, le nombre de SCIC a doublé passant de 278 à 627 en 2016. Les 627 SCIC sont réparties dans toute la France et en outre-mer.

Pour 68,1 %, ce sont des créations ex nihilo. 23,6 % sont des transformations d’associations ou de coopératives, 7 % sont des transmissions de sociétés saines et enfin seulement 1,3 % représentent des reprises d’entreprises en difficulté.

Les SCIC participent au développement territorial. Un tiers des SCIC ont une ou plusieurs collectivités à leur capital dont 69 % détiennent la présence d’une commune au moins, 42 % une intercommunalité, 22 % une région et 9 % un département.

Les domaines d’activité des SCIC sont assez variés : le conseil, la formation, les prestations pour les entreprises et territoires arrivent en tête du classement et représentent 167 SCIC, 93 font partie du commerce et de la restauration, 86 exercent dans le domaine des services et 81 sont tournées vers la culture, les médias, le patrimoine, le tourisme, le sport et l’animation. Elles sont également présentes dans les secteurs des énergies renouvelables (48) et de l’environnement (48).

Le taux de pérennité des SCIC à 5 ans est de 79 % contre 60 % au plan national2.

Les valeurs et principes coopératifs répondent à ceux qui cherchent à concilier l’impératif de rentabilité avec les règles de démocratie et de partage équilibré du profit tout en s’inscrivant dans l’économie concurrentielle. Les trois règles fondamentales de la coopérative (« une personne, une voix », des réserves impartageables et la répartition équilibrée des bénéfices) constituent les atouts qui assurent aux coopératives des performances économiques et sociales particulièrement exemplaires.

La coopérative apporte une contribution originale : permettre aux personnes d’exercer leur métier et développer leurs compétences dans le cadre d’une entreprise collectivement partagée.

La SCIC met en place des services qui répondent aux besoins collectifs d’un territoire par la meilleure mobilisation possible de ses ressources économiques et sociales.

Comme dit plus haut, elle respecte pour cela les règles coopératives :

• la répartition du pouvoir sur la base du principe « 1 personne = 1 voix » ;

• l’implication de tous les associés à la vie de l’entreprise et aux décisions de gestion ;

• le maintien des résultats dans l’entreprise sous forme de réserves impartageables qui en garantissent l’autonomie et la pérennité tout en fonctionnant comme toute entreprise soumise aux impératifs de bonne gestion et d’innovation.

La coopérative s’inscrit dans une logique de développement local et durable ancré dans un territoire, et favorise l’action de proximité et le maillage des acteurs d’un même bassin d’emploi. Ainsi, nous voyons de plus en plus souvent apparaître des services à la personne sous le statut de SCIC. Elle présente un intérêt collectif et un caractère d’utilité sociale garanti par sa vocation intrinsèque d’organiser, entre acteurs de tous horizons, une pratique de dialogue, de débat démocratique, de formation à la citoyenneté, de prise de décision collective. Que les intervenants à domicile et les personnes accompagnées soient sociétaires du service à domicile peut être un avantage, notamment en termes de fidélité de la clientèle et réduction du turnover.

Définition et statut juridique de la SCIC

Une coopérative est un ensemble autonome de personnes volontairement réunies pour satisfaire leurs aspirations et besoins économiques sociaux et culturels communs au moyen d’une entreprise dont la propriété est collective et où le pouvoir est exercé démocratiquement. Ces personnes sont appelées « associés ».

La Société coopérative d’intérêt collectif, créée par la loi du 17 juillet 20013, est une société commerciale et donc soit :

• une sociétés anonyme (SA) ;

• une société par actions simplifiées (SAS) ;

• ou une société à responsabilité limitée (SARL) ;

inscrite au Registre du commerce et des sociétés.

Avant 2012, pour être reconnu coopérative et donc reconnu d’utilité sociale, cette structure devait être agréée par les services par la Préfecture. Désormais, suite à la promulgation de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012, la principale modification concernant les SCIC porte sur la suppression de l’article 19 terdecies de la loi 47-1775 du 10 septembre 1947, c’est-à-dire la suppression de l’agrément préfectoral.

Cette suppression simplifie la création et la transformation en SCIC. Elle permet notamment aux collectivités publiques de participer dès la création au capital de la SCIC.

La suppression de l’agrément n’a aucune incidence sur l’obligation pour la SCIC de faire procéder à une révision coopérative tous les cinq ans.

En quoi consiste la révision coopérative ?

Il faut savoir que la SCIC doit, obligatoirement, tous les 5 ans, faire examiner sa situation en tant que société coopérative par un « réviseur ».

Ce « bilan de santé » de l’entreprise porte sur la situation financière, le fonctionnement coopératif, l’organisation, la stratégie et la conformité juridique. Ce rapport est ensuite présenté aux associés lors de l’assemblée générale.

Les réviseurs sont indépendants et doivent être choisis sur une liste. Cela peut être un expert-comptable agréé ou un représentant de la confédération générale des Scop.

Évidemment cela a un coût : pour une SCIC ou Scop d’une quinzaine de salariés il faut compter environ plus d’un millier euros HT pour un jour et demi d’audit.

Le rapport de l’audit est ensuite remis aux sociétaires et la synthèse doit être envoyée à la Préfecture. Cette dernière au vu des résultats peut décider de transférer le dossier à la Direccte.

L’objet de la SCIC

Les SCIC ont pour objet la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent un caractère d’utilité sociale. Concernant l’ordonnance du 12 janvier 2018 sur les centres de santé il y a une précision. Il est possible de créer un centre de santé sous forme de SCIC dès lors que leur caractère non lucratif est affirmé et respecté.

Un multi-sociétariat

Plusieurs partenaires peuvent être associés :

• des salariés de la coopérative (catégorie obligatoire) ;

• les personnes qui bénéficient habituellement à titre gratuit ou onéreux des activités de la coopérative (catégorie obligatoire) ;

• toute personne physique souhaitant participer bénévolement à son activité ;

• des collectivités publiques et leurs groupements ;

• toute personne physique ou morale qui contribue par tout autre moyen à l’activité de la coopérative.

La Société coopérative d’intérêt collectif doit comprendre au moins trois des catégories d’associés mentionnées ci-dessus, parmi lesquelles figurent obligatoirement des salariés de la SCIC et des bénéficiaires de son activité.

Selon l’ordonnance du 12 janvier 2018, les seules personnes morales pouvant être associées de la SCIC sont des organismes à but non lucratif, des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale, des établissements publics de santé, des personnes morales gestionnaires d’établissements privés de santé, à but non lucratif ou à but lucratif. Ces personnes morales sont les seules à pouvoir créer et gérer les centres de santé.

Bien évidemment, chaque associé peut librement se retirer du capital de la SCIC. Toutefois, un délai de remboursement de 5 ans pourra être mis en place afin de s’assurer de la santé financière de la société.

Les collectivités territoriales partenaires de la SCIC

Sur ce point, il faut être extrêmement prudent. Concernant les collectivités territoriales, elles peuvent soutenir financièrement les SCIC dans le cadre des règlements d’exemption européens sans obligation d’en informer la Commission européenne, mais elles ne peuvent pas détenir plus de 50 % du capital de la SCIC. Encore faut-il avoir une aide financière… Ces éventuelles aides financières ne sont pas prises en compte pour le calcul de l’intérêt versé aux parts sociales par la coopérative. L’avantage pour les collectivités territoriales est de prendre des parts sociales au lieu de verser des subventions. Il est impossible de récupérer une subvention si elle est dépensée, au contraire d’une part sociale…

Une personne = une voix

L’un des principes fondamentaux de la SCIC est que chaque associé dispose d’une voix à l’assemblée générale ou, s’il y a lieu, dans le collège auquel il appartient, indépendamment du capital souscrit. En effet, la particularité importante de la SCIC, et qui la distingue des autres coopératives, est qu’elle est la seule coopérative à pouvoir pondérer le résultat des votes par sous-groupes d’associés (appelé « collège ») librement définis par les statuts de chaque SCIC. Pour ces collèges, ils peuvent avoir un nombre égal de voix, sauf si les statuts prévoient un autre système de répartition des voix. Le plus important à savoir est qu’un collège ne peut pas avoir plus de 50 % des voix du total des droits de vote ou que sa part dans le total des droits de vote ne peut pas être inférieure à 10 % de ce total.

L’apport en capital ne peut pas, et ne doit pas, constituer un critère de pondération.

Les réserves impartageables

Ces réserves sont le résultat de l’affectation d’une partie ou de la totalité des excédents (bénéfices) ; elles constituent le patrimoine commun de la SCIC, et ne peuvent être partagées. Elles garantissent son indépendance et sa pérennité. Le minimum de ces réserves est de 57,5 % mais rien n’interdit que cela soit de 100 %. L’avantage est que la SCIC pourra ainsi plus facilement conventionner avec des organismes qui auront pour critère la non lucrativité…

Les élections

Les associés élisent parmi eux leurs mandataires (gérants) chargés de la gestion quotidienne. Ainsi les gérants fondateurs peuvent ne pas être reconduits malgré le fait qu’ils soient à l’origine du projet… Ce pouvoir démocratique par excellence de l’assemblée générale des associés qui peut désigner, révoquer ou maintenir son ou ses mandataires peut avoir une image négative et freiner certains dans leur projet de création ! Mais, après tout, c’est souvent le cas des présidents fondateurs d’association…

Conclusion

Ce statut juridique bien particulier offre des avantages non négligeables. Sous statut SCIC, la coopérative est une réponse pour :

• impliquer les salariés ;

• sécuriser la démarche entrepreneuriale des individus ;

• entreprendre dans un cadre économique collectivement partagé ;

• créer une dynamique d’entreprise au service d’une logique d’utilité sociale.

La coopérative permet d’associer autour du même projet des acteurs multiples : les salariés, les clients, les collectivités publiques, les porteurs du projet, les bénévoles et tous types de bénéficiaires et de personnes intéressées à titres divers. Ce qui est un avantage par rapport à une association ou d’une société de services à domicile. Il est plus facile d’intégrer une collectivité territoriale au sein d’une SCIC qu’un maire au sein d’une association sans risquer, pour cet élu, d’être accusé pour conflit d’intérêts voire, pire, de prise illégale d’intérêt (nous reviendrons dans un autre billet sur cet aspect).

En outre, une coopérative est plus démocratique qu’une association. Autant un gérant et un président d’association peuvent être nommé à vie… autant le gérant d’une coopérative ne peut avoir un mandat que de 6 ans maximum. Le mandat est cependant renouvelable. En outre, au sein d’une association, un bénévole n’est pas obligatoirement adhérent d’où l’impossibilité pour lui de prendre part au vote lors d’assemblée générale. Alors, qu’au sein d’une coopérative, vous avez la parole du moment que vous êtes sociétaire et vous « valez » une voix… autant que le gérant ou la collectivité territoriale.

Il faut savoir qu’une association ou société peut très bien devenir une SCIC, mais l’inverse est très difficile voire impossible.

Enfin, dernier point important, si vous êtes gérant… il est impossible de vendre une coopérative. Vous pouvez vendre vos parts sociales, mais cela s’arrête là.

Notes

(1) Ordonnance n° 2018-17 du 12 janvier 2018 relative aux conditions de création et de fonctionnement des centres de santé

(2) Source : Confédération générale des Scop

(3) Loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d’ordre social, éducatif et culturel

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