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L’audit social, objectifs et mise en pratique

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Issu du milieu des entreprises commerciales, l’audit social externe se démocratise, depuis quelques années, dans les structures et les associations des secteurs des services à la personne et de l’aide, de l’accompagnement, des soins et des services à domicile. Docteure en droit social, avocate, Alison Dahan explique en quoi cet outil de gestion des ressources humaines et juridique permet de favoriser l’encadrement et le développement du travail social. Et détaille les étapes et les méthodes de sa mise en œuvre.

« Très développé en matière commerciale, l’audit social externe est entré dans la pratique lorsqu’il est lié aux grandes transformations dans la vie des entreprises. On parle alors des “audits d’acquisition” dont le caractère est indispensable, et qui interviennent notamment lors de fusions ou d’absorptions(1). Mais, ces derniers années, l’audit social tend à se démocratiser et entre dans les pratiques des entreprises et des associations. Il est défini par l’Institut international de l’audit social comme “forme d’observation qui tend à vérifier qu’une organisation a effectivement réalisé ce qu’elle dit avoir fait, qu’elle utilise au mieux ses moyens, qu’elle conserve son autonomie et son patrimoine, qu’elle est capable de réaliser ce qu’elle dit vouloir faire, qu’elle respecte les règles de l’art et sait évaluer les risques qu’elle court”(2).

Dans un premier temps, c’est l’audit interne qui s’est développé. Mais deux écueils majeurs ont rapidement pu être déterminés : le manque d’indépendance, donc d’objectivité, et l’étendue de la mission confiée. L’auditeur interne connaît la difficulté d’intervenir par la suite dans la prise de décision et la mise en œuvre d’éventuelles actions correctrices, ce qui peut le conduire à limiter ses préconisations ou à manquer d’objectivité. L’audit externe, dès son émergence, est alors apparu comme un remède à ces difficultés, et son utilisation tend aujourd’hui à se démocratiser.

L’audit en matière sociale n’est pas réservé à une analyse de la productivité et de la rentabilité. Il doit être également l’occasion de valider les pratiques existantes, de favoriser le développement et l’encadrement du travail sur des bases saines et stables. Il est question d’un bilan et d’une analyse tant en matière de gestion des ressources humaines et juridique que du climat social de la structure auditée. Il ne se limite pas aux entreprises. Il a également toute sa place dans les associations.

Points de contrôle et intérêt pour le secteur

Outil de gestion des ressources humaines, l’audit social peut avoir plusieurs objectifs, comme vérifier et valider les pratiques sociales et juridiques actuelles, ou encore favoriser une croissance saine de la structure. Il doit être réalisé périodiquement, pour prévenir et anticiper les risques sociaux.

Les points de contrôle classiques peuvent être divisés en deux catégories : la sécurisation des pratiques en matière juridique et dans le cadre des ressources humaines, d’une part, et le développement des emplois, de la formation et des relations sociales, d’autre part. Dans un troisième temps, on peut envisager des rencontres de responsables de secteurs et de salariés travaillant sur le terrain pour confronter la vision de la direction et celle des travailleurs salariés afin d’évaluer la perception des ressources humaines.

Quels sont les points de contrôle spécifiques aux secteurs de l’aide, du soin et des services à domicile et des services à la personne ? Les secteurs de la branche “aide, accompagnement, soins et services à domicile” et de la branche “services à la personne” connaissent tous deux des spécificités qui doivent faire l’objet d’un contrôle renforcé. A ce titre, les conventions collectives applicables contiennent des dispositions qui peuvent être parfois dérogatoires au droit commun(3).

Ces secteurs sont très marqués par le temps partiel : une attention particulière doit être portée à l’analyse des contrats et des avenants pour éviter notamment le risque de requalification en temps plein, dont l’incidence financière serait catastrophique pour la structure. Si la mention des horaires de travail est normalement rendue obligatoire par les dispositions du code du travail, certaines structures du secteur peuvent bénéficier d’aménagements(4). La question de la durée et de l’organisation du temps de travail soulève également, que le contrat soit conclu à temps plein ou à temps partiel, des difficultés. L’auditeur doit ainsi étudier avec précision, par exemple, les temps de trajet des intervenants qui se déplacent d’un bénéficiaire ou d’un client à l’autre, ainsi que leur rémunération.

Méthode et déroulement

L’audit social doit permettre de prendre une photographie de l’état de la structure. Il s’agit d’obtenir un regard objectif grâce à un intervenant extérieur. Un bon auditeur analyse les pratiques existantes, répond aux questions soulevées et, lorsqu’il identifie un problème, apporte des pistes ou des propositions de solutions. La mission de l’auditeur se déroule en trois phases.

• La préparation

Classiquement, en amont de son intervention, l’auditeur fournit à la structure une feuille de route comprenant les différents points qui vont être examinés pendant la mission sur place. Il est important que le responsable de l’entreprise ou de l’association étudie minutieusement le plan d’audit et échange avec l’auditeur pour préciser les points qui vont être analysés. En effet, c’est la structure qui décide toujours du périmètre et des limites des missions de l’auditeur. L’échange avant le début de l’audit permet d’identifier ses besoins et ses attentes, donc d’adapter le plan d’audit.

Dans le même temps, il convient de déterminer qui seront les interlocuteurs de l’auditeur. Il peut s’agir du dirigeant de l’entreprise, du directeur des ressources humaines ou du directeur opérationnel. Un échange précis doit aussi permettre de maîtriser le coût de l’audit pour la structure.

Enfin, il est nécessaire de prévoir un espace de travail sur place pour l’auditeur, qui aura besoin d’accéder aux documents sociaux de l’entreprise – au format informatique ou au format papier.

• Le travail « in situ »

La mission sur place de l’auditeur débute régulièrement par une réunion d’ouverture. Dans un premier temps, l’auditeur intervient en qualité d’observateur. Puis il échange avec le représentant de la structure. Il s’agit habituellement de vérifications visuelles, notamment en ce qui concerne les affichages obligatoires, puis par échantillonnages ou sondages aléatoires(5). L’auditeur doit avoir accès à toute la documentation de l’entreprise ou de l’association pour la vérification des contrats de travail, du registre du personnel ou encore des plannings. Il est indispensable de consacrer du temps à l’auditeur pendant le déroulement de l’audit sur place. Cette phase se termine par une réunion de clôture, qui est l’occasion de tracer les grandes lignes des investigations menées et d’échanger avec les audités au sujet des résultats obtenus.

• Le rapport

Quelque temps après l’audit, un rapport final est remis à l’entreprise ou à l’association. Il donne une image des pratiques actuelles de la structure et fait état de l’intégralité des points abordés lors de la mission et des échanges sur place. En revanche, dans la mesure où le rapport doit reprendre les éléments de la mission confiée, sa structure devra évoluer en fonction de la nature et de l’étendue de l’audit. Quoi qu’il en soit, il s’agit d’un document synthétique, habituellement sous forme de tableau, qui sera utilisable par l’entreprise ou l’association dans sa pratique quotidienne. Enfin, le rapport doit proposer des pistes d’amélioration, des recommandations qui invitent la structure auditée au progrès.

L’audit social est un concept encore récent, mais qui connaît un réel essor depuis quelques années. Indispensable au bon fonctionnement de l’entreprise comme de l’association, il tend à devenir un outil essentiel dans la gestion des structures et semble promis à un avenir certain. »

Notes

(1) Voir Florence Mercade-Choquet, « L’audit social n’est plus la dernière roue du carrosse », dans Les cahiers du DRH n° 83, 2003.

(2) Aline Scouarnec, « L’intérêt de l’audit social. Audit social : mais de quoi parlons-nous ? », dans Management et avenir n° 56, 2012, p. 170. On note toutefois que la définition classique de l’audit est déterminée par la norme ISO 9000 de 2000 qui précise : « Processus méthodique, indépendant et documenté permettant d’obtenir des preuves d’audit et de les évaluer de manière objective pour déterminer dans quelle mesure les critères d’audit sont satisfaits. »

(3) Convention collective nationale de la branche de l’aide, de l’accompagnement, des soins et des services à domicile du 21 mai 2010 et convention collective nationale des entreprises de services à la personne du 20 septembre 2012.

(4) Code du travail, art. L. 3123-14.

(5) La question des méthodes choisies par l’auditeur, qu’il s’agisse d’échantillonnages ou de sondages aléatoires, renvoie à la problématique de la fiabilité de l’audit et du rapport remis par la suite. Il est important que l’auditeur précise ses méthodes lors de l’audit. Sur la question de la preuve par échantillonnage et sondages aléatoires, voir notamment Martine Combemale et Jacques Igalens, L’audit social, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2012.

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