C’est la première organisation syndicale à s’exprimer sur le sujet. La fédération Force ouvrière de l’action sociale (FNAS-FO) dénonce, dans un communiqué du 6 décembre, la teneur de l’article 29 du projet de loi « pour un Etat au service d’une société de confiance »(1). Si le contenu de ce texte est résumé habituellement par le « droit à l’erreur » qu’il entend instaurer au profit des administrés, l’organisation syndicale souligne qu’il contient aussi des dispositions dérogatoires à la législation du travail, qui visent à permettre la mise en œuvre du « baluchonnage » ou « relayage ».
Ce concept venu du Canada consiste à permettre un répit de plusieurs jours et nuits aux proches aidants d’une personne nécessitant une surveillance permanente, en mettant en place un service à domicile 24 heures sur 24. Cependant, dans le cadre actuel de la législation sur le temps de travail, une telle prestation nécessite de faire alterner les intervenants auprès de la personne aidée, ce qui ne se révèle pas toujours compatible avec son besoin de stabilité. C’était en tout cas l’un des constats posés par Joëlle Huillier (PS), lorsqu’elle était députée, dans son rapport sur le sujet publié en mars, qui l’avait poussée à réclamer une « juste adaptation du droit du travail »(2). L’article de loi dénoncé par FO vient répondre à cette préconisation.
A titre expérimental pour trois ans, ce texte permet aux établissements et services, lorsqu’ils réalisent des prestations à domicile de suppléance du proche aidant pendant ses périodes d’absence, de recourir à des salariés volontaires « qui ne seront soumis ni à [une série d’articles du code du travail](3), ni aux stipulations relatives aux régimes d’équivalence, aux temps de pause, aux durées maximales quotidienne et hebdomadaire de travail, aux durées maximales quotidienne et hebdomadaire de travail de nuit et à la durée minimale de repos quotidien prévues par les conventions et accords collectifs applicables aux établissements et services qui les emploient », selon l’article 29. Des dispositions équivalentes sont prévues pour les salariés de particulier employeur.
L’article du projet de loi précise en outre que la durée d’une intervention à domicile ne peut excéder six jours consécutifs et le nombre de journées d’intervention, 94 jours par an et par salarié. La totalité des heures accomplies ne peut excéder 48 heures par semaine, calculées en moyenne sur une période de quatre mois consécutifs, ce qui, en pratique, permet par exemple d’alterner des semaines de 96 heures (4 jours) et des semaines sans travail. Autre dérogation : la période de repos de 11 heures consécutives dont un salarié doit bénéficier au cours de chaque période de 24 heures peut être réduite – mais pas à moins de 8 heures – ou tout simplement supprimée.
Pour la fédération de Force ouvrière, « ces dispositions hors la loi sont de graves atteintes aux droits des salariés » du secteur social et médico-social et de l’aide à domicile, lesquels deviendraient « taillables et corvéables à merci ». A ce titre, elle « refuse toute expérimentation préfigurant une généralisation » et demande le « retrait immédiat » de l’article 29.
(3) Articles L. 3121-13 à L. 3121-26, L. 3122-6 et L. 3122-7, L. 3122-17 et L. 3122-18, L. 3122-24 et L. 3131-1 à L. 3131-3 du code du travail.