Tous les indicateurs l’affirment : le décrochage scolaire ne cesse de baisser depuis dix ans. C’est ce qu’il ressort d’un dossier publié récemment par le Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco), à la suite d’une conférence de comparaisons internationales organisée en novembre dernier en partenariat avec le Centre international d’études pédagogiques et le Centre de recherche en éducation de Nantes(1). En 2016, environ 450 000 jeunes âgés de 18 et 24 ans ne sont pas diplômés ou ont au plus le diplôme national du brevet, soit une baisse d’environ 100 000 jeunes par rapport à 2006, selon les chiffres de l’Insee.
Cette tendance à la baisse ne doit toutefois pas faire oublier certaines réalités, comme un écart renforcé entre les situations des diplômés et non-diplômés qui trouvent du travail. Il apparaît ainsi que les premières expériences professionnelles des jeunes non diplômés se concentrent dans les secteurs de construction, de l’industrie, du commerce et de l’hébergement-restauration. Par rapport aux autres jeunes, « ils occupent plus souvent des emplois précaires (contrats à durée déterminée et missions d’intérim) et à temps partiel ». Enfin, le décrochage scolaire peut produire des effets durables sur les carrières des personnes notamment en matière de salaire, relève le Cnesco.
Les données relayées par le Conseil font apparaître des inégalités territoriales marquées entre académies et au sein des académies. Le décrochage scolaire reste ainsi très présent dans les académies du nord (Lille, Amiens), d’Ile-de-France (Créteil) et du sud-est (Corse, Montpellier, Aix-Marseille). A l’inverse, les académies de l’ouest de la France (Rennes, Nantes) sont bien moins touchées. Par ailleurs, « la baisse globale du décrochage scolaire s’est parfois faite au détriment des territoires les plus en difficulté ».
Le dossier apporte également un éclairage sur les profils des jeunes en situation de décrochage scolaire. Par exemple, 10,1 % des hommes de 18 à 24 ans sont des sortants précoces, contre 7,5 % des femmes. Cette meilleure réussite scolaire des filles pourrait être attribuée « à la différenciation genrée des rôles sociaux, souvent renforcée par la socialisation scolaire, et qui prépare davantage les filles au respect et à l’intériorisation des normes de l’école ». Le milieu socio-économique se révèle également déterminant sur le risque de décrochage scolaire. En effet, « les personnes nées pauvres ont trois fois plus de risque de sortir de l’école sans diplôme que les autres », indique le Cnesco.
En conclusion de ce dossier, le Cnesco formule une série de préconisations. Selon lui, des actions visant les élèves les plus à risque dans la période de pré-décrochage doivent être menées « en urgence ». Cela doit notamment passer par une sensibilisation des équipes enseignantes ou la création de liens avec les familles les plus éloignées de l’école pour les impliquer davantage dans la scolarisation de l’enfant.
A plus long terme, le Conseil préconise la mise en place d’un dispositif de prévention à l’intention de tous les élèves. Par exemple, « le décrochage étant très lié aux orientations subies, notamment en voie professionnelle, chaque élève, quelle que soit son origine sociale, doit pouvoir faire des choix d’orientation de manière la plus éclairée possible, dans un processus d’apprentissage tout au long de la vie ».
Enfin, il est impératif de favoriser le retour en formation des « décrocheurs ». Ici, la difficulté majeure est de pouvoir identifier les jeunes concernés malgré la création du « système interministériel d’échange d’informations relatives au décrochage scolaire ». Il est notamment proposé de renforcer et de distribuer sur l’ensemble du territoire l’offre de rescolarisation, et notamment celles de structures de retour à l’école du ministère de l’Education nationale (micro-lycées, structures scolaires expérimentales, etc.).
(1) Disponible sur