C’est avec un « esprit de pragmatisme » que le Conseil économique, social et environnemental (CESE) s’est emparé de la question « urgente » des déserts médicaux. L’instance a publié, le 13 décembre, un avis(1) dans lequel elle souligne que cette problématique constitue « une opportunité pour repenser l’organisation des soins autour du patient ». Il vient ainsi « nourrir » le plan d’action relatif au renforcement de l’accès territorial aux soins, lancé par la ministre de la Santé en octobre dernier(2). Dans ce cadre, Sylvie Castaigne et Yann Lasnier, les rapporteurs de l’avis, formulent dix recommandations ayant vocation « soit à compléter le plan ministériel par des mesures nouvelles, soit à décliner opérationnellement des mesures qui y figurent ». Focus sur quelques-unes de ces préconisations qui contiennent « des mesures à effet immédiat mais aussi des mesures de moyen et long terme de nature à améliorer structurellement le parcours de soins ».
Selon le CESE, il est tout d’abord nécessaire de renforcer les soins de santé de premier recours. Les soins de santé primaires, portés par la médecine générale, constituent le « premier contact entre le patient et le système de santé sur un territoire ». Or, note le conseil, la médecine générale est le « parent pauvre » de l’organisation du système sanitaire. Cette situation ne permettant pas de faire face à l’enjeu du vieillissement et à l’augmentation des maladies chroniques, le conseil propose de valoriser les soins de premier recours « en changeant le regard sur la médecine générale ». A cette fin, il préconise de renforcer la formation en soins primaires pendant les études de médecine, ou encore d’améliorer les conditions d’exercice en favorisant le développement du travail en exercice collectif et coordonné (maisons de santé, centres de santé…). Il s’agit aussi, selon l’instance, de sensibiliser et d’associer les usagers et les patients à l’organisation du système de santé « pour une meilleure appropriation des parcours de soins ». Le conseil estime en effet indispensable d’informer les personnes sur « l’importance du premier échelon des soins » et sur le « choix de l’échelon le plus pertinent de recours aux soins ».
« Une des causes principales de l’existence des déserts médicaux réside dans la baisse d’attractivité de certains territoires. » A partir de ce constat, le CESE propose, entre autres, de repositionner les agences régionales de santé (ARS) comme échelon de pilotage opérationnel des structures regroupées, lesquelles peuvent recevoir un appui pour leur installation ainsi que des rémunération supplémentaires de la part de l’agence. Les ARS doivent assurer un rôle de coordination des acteurs pour élaborer un projet local de santé. Elles doivent aussi simplifier le cahier des charges pour la création des lieux d’exercice regroupé.
Observant que la plupart des aides financières à l’exercice médical sont « inefficaces », le conseil propose de les soumettre à évaluation dans les zones sous-denses. Objectif : mieux les cibler en supprimant celles qui sont « porteuses d’un effet d’aubaine excessif », en les concentrant sur un petit nombre d’incitations « à effets avérés » et les rendant réversibles, « en fonction de leur efficacité et surtout de l’évolution du zonage retenu des territoires sous-denses ».
Le CESE entend développer la télémédecine en :
→ conventionnant les actes de télémédecine via des mécanismes innovants de rémunération forfaitaire et transversale ;
→ finançant ces nouvelles dépenses par une baisse du nombre, voire des tarifs, des séjours hospitaliers, des consultations et des transports sanitaires auxquels la télémédecine peut se substituer.
Autre piste pour « compenser les insuffisances de la présence médicale » sur le territoire : confier aux autres professionnels du soin des tâches dévolues normalement aux médecins (suivi des maladies chroniques, surveillance de certains traitements, réalisation de certains actes…). Pour cela, l’instance propose de « mieux répartir les tâches » entre eux, en concevant des « modèles simplifiés et nationaux de protocole de coopération » et en attribuant légalement l’exercice de « nouveaux métiers en santé de niveau intermédiaires » aux professionnels paramédicaux.
(1) Disponible sur