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Résidence alternée de l’enfant : la proposition de loi reste en suspens

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Des députés plaident pour faire de la résidence alternée le principe en cas de séparation des parents. Leur texte, controversé, n’a été débattu qu’en partie et son avenir reste incertain.

La discussion fut passionnée, mais inachevée, car elle n’a pas pu se prolonger après 1 heure du matin. Elle avait pourtant commencé peu avant 20 heures. Et le texte, qui ne compte que trois articles, tient sur une page. Dans la nuit du 30 novembre au 1er décembre, les députés n’ont même pas examiné la moitié des amendements à la proposition de loi « relative à la résidence de l’enfant en cas de séparation des parents », déposée par Philippe Latombe (La République en marche, Vendée). « Habilement joué de la part du groupe [LREM qui a fait durer le débat [… afin de pouvoir lever la séance avant le vote » d’un texte « qui divisait la majorité », a raillé sur Twitter Pierre-Henri Dumont (Les Républicains, Pas-de-Calais). La proposition de loi a reçu le soutien de certains députés LREM et Modem, mais a essuyé des critiques de toutes parts.

Caractère « symbolique »

Le texte vise, selon son exposé des motifs, à « moderniser l’encadrement [de l’intervention du juge aux affaires familiales, JAF, en instaurant le principe général de résidence des enfants chez chacun de leurs parents, afin de traduire leur égalité, cela toujours dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant ». Il prévoit de modifier le code civil (articles 373-2-1 et 373-2-9), en disposant notamment qu’en cas d’intervention du JAF, « la résidence de l’enfant est fixée au domicile de chacun des parents selon les modalités de fréquence et de durée déterminées par accord entre les parents ou par le juge ». « A titre exceptionnel, le juge peut fixer la résidence de l’enfant au domicile de l’un des parents. Dans ce cas, il statue sur les modalités du droit de visite de l’autre parent », toujours selon la proposition. Actuellement, le code civil prévoit déjà que « la résidence de l’enfant peut être fixée [par le juge en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l’un d’eux », mais sans en faire le principe général.

Ce texte revêt donc surtout un caractère « symbolique », ont argué ses défenseurs, comme le gouvernement. « Il ne peut s’agir ici de généraliser la garde alternée, de la rendre obligatoire, ou même de l’ériger en modèle positif », a insisté Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre de l’Intérieur, devant les députés. Quelques jours avant, Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, avait défendu la proposition de loi, tout en assurant « qu’en cas de violences [de la part d’un des conjoints, bien évidemment la résidence alternée [devrait tomber ». Des députés comme Anne-Christine Lang (LREM, Paris) ont au contraire dénoncé un texte qui pourrait « être utilisé contre les femmes et contre l’intérêt de l’enfant » par des pères « toxiques » si les décisions de résidence partagée étaient prononcées plus fréquemment(1). La proposition de loi « ne brasse pas l’ensemble des questions posées », a aussi déploré George Pau-Langevin (Nouvelle Gauche), tandis que pour la communiste Elsa Faucillon, elle « comporte par son imprécision de nombreux dangers ».

Hors de l’hémicycle, le débat est engagé depuis plusieurs semaines. Par exemple, un collectif de 11 associations féministes(2) a signé dans Le Monde du 30 novembre une tribune contre le texte, avertissant du risque d’une « garde alternée automatisée » qui « relégue [rait l’intérêt supérieur de l’enfant au second plan ». Ces organisations fustigent un texte dans lequel « rien [… ne prévoit de renforcer l’équilibre domestique entre les femmes et les hommes ». « La seule urgence valable serait de garantir le versement des pensions alimentaires et de durcir les sanctions en cas de non-versement de celles-ci, car c’est là que se situe le véritable dysfonctionnement de la loi » en vigueur, analysent-elles.

Rendez-vous en mai

L’Union nationale des associations familiales (UNAF) a soutenu la proposition de loi, tout en proposant des « améliorations ». Elle demande notamment « l’alignement du code de la sécurité sociale, s’agissant du partage entre les deux parents des allocations familiales, et du code général des impôts, s’agissant du partage de part de quotient familial pour enfant à charge, sur le nouveau principe inscrit dans le code civil de la double résidence de l’enfant ».

L’examen de la proposition de loi ne devrait reprendre que le 17 mai 2018, lors de la prochaine « niche » centriste. Si le texte ne devait pas poursuivre son parcours parlementaire, comme une précédente proposition incluant ce sujet en 2014, le gouvernement ou LREM pourrait éventuellement l’inscrire dans un ensemble plus vaste. « Nous réfléchissons à une démarche plus globale sur le droit de la famille, avec d’autres points, comme le statut du beau-parent », a déclaré Caroline Abadie (LREM, Isère).

Notes

(1) Selon les dernières données détaillées disponibles, qui remontent à 2012, les décisions de résidence alternée représentent 17 % du total des décisions définitives des juges aux affaires familiales, contre 71 % en faveur d’une résidence chez la mère et 12 % chez le père.

(2) Fédération nationale solidarité femmes, Planning familial, Collectif féministe contre le viol, FIT Une femme un toit, Collectif Georgette-Sand, Les Effrontées, SOS Les mamans et les enfants, Abandon de famille-tolérance zéro, Alliance des femmes pour la démocratie, Femmes égalité, Osez le féminisme.

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