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L’IGAS pointe les faiblesses du recours aux soins palliatifs à domicile

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« Le système de soins est globalement aveugle lorsqu’il s’agit d’évaluer l’efficacité et la qualité des prises en charge palliative hors des structures hospitalières. » Or, « le risque d’une absence ou d’une insuffisance de soins palliatifs existe pour plus de 75 % personnes en nécessitant et est plus important au domicile ». C’est ce qui ressort d’un rapport de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) relatif aux soins palliatifs et à la fin de vie, publié le 15 novembre(1).

En complément du plan national 2015-2018 pour le développement des soins palliatifs et l’accompagnement de fin de vie(2) et de la loi du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie(3), l’IGAS s’est attachée à évaluer les conditions de prise en charge de la fin de vie à domicile, tant du point de vue de l’efficacité des soins pour le patient que de leur effectivité pour le système de santé.

Un faible recours aux soins palliatifs à domicile

L’acceptabilité du domicile comme lieu de fin de vie a considérablement évolué grâce aux progrès de la médecine palliative, des modes de prise en charge ambulatoires et du développement de l’offre d’hébergement pour les personnes âgées, indique le rapport. L’IGAS observe ainsi une volonté croissante de mourir chez soi. Pourtant, en 2013, seuls 38 % des décès annuels ont eu lieu au domicile. A un mois du décès, la majorité des Français résidaient encore à leur domicile, note le rapport. « C’est donc seulement dans leurs derniers jours de vie que près de 160 000 personnes (environ 30 % des décès) vont devoir quitter leur domicile et être transférées à l’hôpital, dans un mouvement qui va dépasser l’offre capacitaire en lits spécialisés et conduire ces personnes à mourir, pour la majorité, dans des services classiques, voire pour certaines dans les couloirs des urgences », déplore l’IGAS.

L’institutionnalisation de notre système de soins explique pour partie cette tendance, indique le rapport. En effet, bien que la législation permette de bénéficier de soins à domicile, elle n’implique pas une obligation pour les pouvoirs publics d’organiser en toutes circonstances ces services au domicile, précise-t-il.

Autre élément expliquant le faible taux de soins palliatifs à domicile : une « qualité décevante de certaines prises en charge à domicile ». Les cadres d’intervention se sont notamment multipliés et juxtaposés en autant de structures proposant aux malades leurs propres modalités de prise en charge, explique le rapport. « Alors que les patients privilégient le maintien d’interlocuteurs connus et choisis, cette juxtaposition d’acteurs au domicile offre un cadre instable au gré de la succession des intervenants, généralement incompréhensible pour le malade et l’entourage. » En outre, de nombreux patients doivent organiser leur propre parcours de soins en s’appuyant sur un réseau « informel », en cas de carence du médecin traitant ou des équipes mobiles de soins palliatifs (EMSP), note l’IGAS. Enfin, la délivrance d’un soin à domicile la nuit, les week-ends ou pendant les périodes de congés est compliquée et repose sur l’intervention de dispositifs d’urgence qui peut aboutir, faute d’alternatives, à « une hospitalisation pas toujours appropriée ou souhaitée », relève encore l’inspection.

Les pistes d’amélioration

Les médecins traitants ont un rôle essentiel à jouer dans la prise en charge des patients en fin de vie, mais « vouloir [en] faire des pivots de l’ensemble de la prise en charge palliative semble un objectif trop ambitieux », tempère l’inspection générale des affaires sociales. Elle recommande donc de prioriser les tâches de coordination des médecins généralistes sur la détection des situations de fin de vie et l’accompagnement pré-agonique. En appui du médecin traitant, les rapporteurs préconisent de renforcer l’implication des infirmières libérales et des services de soins infirmiers à domicile, ainsi que l’intervention des médecins coordonnateurs.

Le processus de recours à l’hôpital doit également être amélioré afin de mieux utiliser les moyens spécialisés, préconise l’IGAS. Le taux d’utilisation moyen des « lits identifiés de soins palliatifs » est insuffisant (50 %) et les EMSP ont une activité extra-hospitalière limitée (7 %) malgré la possibilité qui leur est laissée d’intervenir en appui du domicile, déplore l’inspection. En outre, les rapporteurs proposent d’anticiper et de programmer le recours à l’hôpital pour éviter des prises en charge en urgence qui sont « souvent préjudiciables tant pour le patient […] que pour l’hôpital qui va mobiliser en aveugle des coûteux moyens ».

En outre, le droit à bénéficier de soins palliatifs engage une amélioration de l’approche qualitative. Pour ce faire, l’IGAS suggère de diffuser un référentiel d’indicateurs de résultats, qui permettront de calibrer l’action des pouvoirs publics. L’évaluation de la qualité des soins pourrait s’effectuer selon trois axes complémentaires :

→ l’appropriation personnelle du patient sur les conditions de prise en charge ;

→ le point de vue des personnels soignants et des aidants ;

→ l’analyse quantitative basée sur des indicateurs cliniques objectifs (nombre de décès à l’hôpital en dehors d’un lit programmé…).

Une logique du tout à domicile à éviter

Vivre une fin de vie à domicile nécessite une implication des aidants. Or, en majorité, ces derniers rapportent un besoin de répit. En effet, 92 % d’entre eux déclarent une charge lourde. Dans ce contexte, la fatigue des aidants contribue à dégrader la qualité du maintien à domicile, le risque d’hospitalisation non programmé étant ainsi accru, indique l’IGAS.

Par ailleurs, la prise en charge à domicile ne permet pas nécessairement de « maîtriser les dépenses », souligne le rapport. En effet, une journée de prise en charge en soins palliatifs s’établit à 372 € à l’hôpital, contre 308 € en hospitalisation à domicile, somme à laquelle il faut ajouter d’autres dépenses sanitaires, sociales, d’hébergement et de prestations de services, note l’IGAS.

Notes

(1) Rapport disponible sur www.igas.gouv.fr.

(2) Voir ASH n° 2937 du 11-12-15, p. 9.

(3) Voir ASH n° 2946 du 5-02-16, p. 36.

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