Le Conseil d’Etat a jugé, le 8 novembre, que les autorités de l’Etat peuvent prendre en charge, à titre exceptionnel, les mineurs non accompagnés lorsque le département est dans l’impossibilité d’exercer sa mission au titre de l’aide sociale à l’enfance (ASE).
La Haute Juridiction administrative était saisie par plusieurs associations de soutien aux étrangers d’une requête tendant à l’annulation de la circulaire du ministre de la Justice du 1er novembre 2016 relative à la mise en œuvre exceptionnelle d’un dispositif national d’orientation des mineurs non accompagnés dans le cadre des opérations de démantèlement de la Lande de Calais(1). Ces mêmes associations demandaient également l’annulation de la décision par laquelle le gouvernement a décidé la création et l’ouverture des centres d’accueil et d’orientation pour mineurs isolés.
Le Conseil d’Etat rappelle qu’il incombe en principe aux départements, en vertu des dispositions du code de l’action sociale et des familles, de prendre en charge l’hébergement et de pourvoir aux besoins des mineurs confiés au service de l’ASE ainsi que, en cas d’urgence, de procéder à leur accueil provisoire lorsque leur représentant légal est dans l’impossibilité de donner son accord, en vue d’évaluer leur situation, et notamment leur état d’isolement, afin, le cas échéant, de saisir l’autorité judiciaire. De ce fait, « une obligation particulière » pèse sur les autorités départementales lorsqu’un mineur privé de la protection de sa famille est sans abri et que sa santé, sa sécurité ou sa moralité est en danger.
Il rappelle ensuite qu’il appartient « aux autorités titulaires du pouvoir de police générale, garantes du respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine, de veiller, notamment, à ce que le droit de toute personne à ne pas être soumise à des traitements inhumains ou dégradants soit garanti et de prendre toute mesure en ce sens »(2).
Les Hauts Magistrats administratifs en concluent que « la compétence de principe du département en matière d’aide sociale à l’enfance ne fait pas obstacle à l’intervention de l’Etat, au titre de ses pouvoirs de police, pour la prise en charge, à titre exceptionnel, des mineurs, dès lors qu’une telle intervention est nécessaire, lorsqu’il apparaît que, du fait notamment de l’ampleur et de l’urgence des mesures à prendre, le département est manifestement dans l’impossibilité d’exercer sa mission de protection des mineurs ».
En l’occurrence, la Haute Juridiction relève que le nombre des mineurs isolés présents sur le site de la Lande au moment du démantèlement était évalué à plus de 1 500 et que « la prise en charge de ces mineurs excédait manifestement les capacités d’accueil du service de l’ASE du Pas-de-Calais ». En conséquence, le Conseil d’Etat estime que le gouvernement a pu légalement mettre en place, dans l’intérêt de l’enfant, des centres d’accueil et d’orientation pour mineurs isolés « dont les modalités d’organisation et de fonctionnement étaient en adéquation avec les circonstances particulières de leur création ».