L’accueil, c’est dans la tête, pourrait-on dire à la lecture de cet ouvrage. On pourrait aussi lui appliquer cette formule du psychanalyste Jean Oury : « L’accueil ne se limite pas à un lieu ou un espace qui seraient dévolus à ce moment : il doit être partout. » Cela semble effectivement décrire la philosophie et la pratique du service d’éducation spéciale et de soin à domicile (Sessad) d’un quartier périphérique de Nice (Alpes-Maritimes), où exercent Brigitte Beudin-Guillaume et Lara Montagnac, respectivement comme cadre de direction et psychologue clinicienne. Les auteures témoignent ainsi de l’importance – et de la subtilité – d’une posture d’accueil, qui ne relève pas tant d’une fonction ou d’un diplôme que « d’une aptitude à être et d’une disponibilité à l’autre ». Un accueil « nomade » d’enfants et d’adolescents présentant une symptomatologie psychotique, ainsi que de leur entourage familial – essentiellement maternel – aussi bien que géographique. En effet, avec des lieux d’intervention dans le « dedans » (le service), mais aussi le « dehors » (le domicile, l’école, la rue…), les professionnels du Sessad transportent également leur cadre de travail dans la tête afin d’aller auprès de l’enfant où qu’il soit, c’est-à-dire aussi l’accompagner vers un « extérieur parfois effrayant ». Pour que ce milieu de vie ne soit pas trop pathogène, il ne faut pas se contenter de donner des soins aux jeunes pris en charge, insistent les auteures, mais aussi « travailler sur et dans l’environnement qui accueille ces enfants », et donc contribuer à y pacifier les relations existantes. Bref, faire du care à grande échelle.
Aux frontières des territoires de l’ordinaire. Une institution soignante au cœur d’un quartier « sensible »
Brigitte Beudin-Guillaume et Lara Montagnac – Ed. L’Harmattan – 23,50 €