Le décalage d’un an des revalorisations de fonctionnaires liées au protocole sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations (PPCR), annoncé en octobre pour des raisons budgétaires(1), avait déjà suscité des protestations syndicales. Cette fois, ce sont quatre associations de travailleurs sociaux qui s’élèvent contre l’un des effets de cette mesure : le report du reclassement en catégorie A de certains travailleurs sociaux de la fonction publique.
Des décrets parus les 10 et 11 mai, spécifiques à la filière sociale des fonctions publiques d’Etat et territoriale, avaient acté une série de revalorisations dans le cadre du protocole PPCR, incluant le passage en catégorie A, à compter du 1er février 2018, des agents jusqu’ici en catégorie B(2). Or, le gouvernement a décidé de reporter ces reclassements d’un an, au 1er février 2019. Ce point figure dans deux projets de décrets soumis à concertation en octobre, mais pas encore publiés. L’un concerne les dispositions statutaires des agents, l’autre les dispositions indiciaires.
L’Association nationale des assistants de service social (ANAS), la Fédération nationale des éducateurs de jeunes enfants (FNEJE), France ESF (qui représente les conseillers et techniciens en économie sociale et familiale) et l’Organisation nationale des éducateurs spécialisés (ONES) expriment leur colère dans un communiqué commun diffusé dimanche 5 novembre. Toutes ces associations se disent « déçues de cette décision qui reporte (encore) la reconnaissance attendue depuis plusieurs décennies » par les travailleurs sociaux.
« Face à la crise de sens que traverse le secteur social […], les professionnels sont en attente de signaux positifs reconnaissant le niveau des missions exercées, leur engagement et la qualité du travail mené chaque jour auprès des personnes accompagnées », déclarent les quatre organisations. « Alors que le caractère central de l’accompagnement dans la politique d’insertion et de lutte contre la pauvreté a été rappelé le 21 septembre dernier par le Premier ministre [qui a rencontré les associations à ce sujet], le chemin vers la reconnaissance et la valorisation des professionnels du travail social semble rester difficile », constatent-elles.
« Nous ne manquerons pas de relayer les appels à mobilisations » des syndicats contre le report des mesures liées au PPCR, assurent-elles. Lesdits syndicats ont d’ailleurs exprimé vivement leur mécontentement, le 6 novembre, en boycottant une réunion du Conseil commun de la fonction publique au cours de laquelle les projets de décrets devaient être examinés.
« Les collègues ressentent une certaine injustice » car les revalorisations semblaient enfin acquises, a expliqué aux ASH le président de l’ANAS, Joran Le Gall. « Même si nous ne sommes pas des syndicats, nous nous sommes dit qu’il fallait marquer le coup » par une prise de position des quatre associations, a-t-il poursuivi. D’autant que le gel pourrait durer : « Rien ne dit qu’il n’y aura pas un nouveau report au-delà de 2019. On est vraiment dans une sorte de brouillard. »
Le président de l’ONES, Jean-Marie Vauchez, se montre lui aussi « très mécontent » de la décision de l’exécutif… mais pas vraiment étonné. Le gouvernement de Bernard Cazeneuve ayant pris les décrets sur la catégorie A juste avant de démissionner, après l’élection présidentielle, « c’était une sorte de coup de pied de l’âne au gouvernement suivant », et « l’Etat demandait aux départements de se débrouiller avec ces revalorisations qui requièrent d’importants financements », a-t-il observé. Il dit craindre, lui aussi, que ce report soit « le premier mais probablement pas le dernier ».