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La cité en ébullition

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Quand son petit ami lui propose de « fuir cette putain de cité et tous ces gens qui nous déterminent et nous empêchent d’être libres », Karima rétorque : « Tu ne pourras pas te débarrasser d’elle comme ça. Une enfance dans la cité, c’est une plaie qu’on garde à vie. » Le ton est posé. Les contes noirs du chien de la casse, référence ironique aux Contes du chat perché qui dépeignaient le quotidien de deux fillettes à la campagne, se veulent une vision désabusée, moderne et urbaine de la jeunesse de banlieue, qui a perdu l’innocence qui pouvait exister dans les histoires de Marcel Aymé. A travers sept histoires indépendantes, Remedium, auteur de romans graphiques engagés, aborde des thèmes différents autour d’un personnage principal, la cité. Chaque conte est fondé sur un fait réel ayant pour cadre la cité des Tilleuls, au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis). On grince des dents en lisant dans les cases en noir et blanc le récit d’Alex, devenu guetteur à 9 ans. A 11 ans, il vend directement de la drogue et devient vite une référence. Il arrête l’école dès le collège – « je gagne plus en une semaine qu’un prof en un mois » – mais se met à goûter lui-même « ses plats », augmentant à chaque fois la dose et devenant « un carencé du rail, une épave à la psyché fragile ». Il y a aussi la triste histoire de Shahinese qui, après l’AVC de sa mère, est placée en famille d’accueil, dont elle s’échappe pour se mettre en ménage avec un apprenti proxénète – la semaine de ses 15 ans, elle reçoit ses premiers clients, « qui salivaient de bouyave une mineure ».

La cité (cette fois, une HLM des Hauts-de-Seine) est aussi au cœur de la BD de Gilles Rochier La petite couronne. Celui-ci s’est inspiré, comme dans TMLP(1), de sa vie et de celle de ses copains en banlieue. Mais la succession d’histoires, des petits sketchs plutôt drôles, met en scène deux pères de famille désœuvrés. Ils parlent de petits deals, de problèmes d’argent, de kebabs et de bières. Avec, comme trame, la recherche de l’achat d’un flingue. Les échanges entre les deux protagonistes sont croustillants : « Faut que je trouve un boulot. – Tu sais faire quoi, toi ? – Bah, pas grand-chose, à part faire à bouffer pour huit mômes, changer les couches, préparer un sac de piscine… – T’as qu’à faire nourrice ! – J’y ai pensé… Mais vu que vous allez vous foutre de ma gueule jusqu’à la fin de mes jours, je préfère encore aller bosser à l’usine. – T’es au courant qu’il n’y a plus d’usine ? – Ça va pas être simple encore, cette histoire. »

Notes

(1) Voir ASH n° 2709 du 13-05-11, p. 43.

Les contes noirs du chien de la casse

Remedium – Ed. Des ronds dans l’O – 15 €

La petite couronne

Gilles Rochier – Ed. 6 pieds sous terre – 16 €

Culture

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