Dans les sciences expérimentales, le savant se défend d’interagir avec son sujet d’étude. Le principe des recherches-action, recherches collaboratives et autres est très différent : plutôt que de se faire le plus discrets possible, les chercheurs associent les sujets de leur enquête à la réalisation de celle-ci. La méthodologie de ces « recherches avec » et leurs effets sur les personnes qui y participent et sur le type de connaissances produites sont au cœur des contributions réunies par Gilles Monceau, professeur en sciences de l’éducation, coordonnateur de cet ouvrage. Ainsi, dans la démarche qui vise à croiser des savoirs entre des parents de milieux défavorisés et des enseignants dont rend compte Patricia Bessaoud-Alonso, chercheuse en sciences de l’éducation, le dispositif a principalement mis en lumière « la frontière quasiment infranchissable entre les discours des parents et des professionnels ». Néanmoins, si l’objectif de rapprocher les protagonistes a pour partie échoué, ce travail a permis des « micro-changements » chez certains acteurs. Evoquant une recherche collaborative effectuée avec des collégiens et des enseignants sur le « désarrimage scolaire », Laurence Gavarini, professeure en sciences de l’éducation, fait aussi part d’un « ratage » partiel. Mais, selon elle, cet échec est en lui-même une réussite car il a mis à jour le mal-être et le déficit généralisé de liens dans le collège, soit justement « un matériau recelant quelques-uns des nœuds du décrochage des adolescents et des équipes ». De quoi alimenter, peut-être, une nouvelle étude.
Enquêter ou intervenir ? Effets de la recherche socio-clinique
Sous la direction de Gilles Monceau – Champ social éditions – 17 €