L’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA) et les organisations de salariés avaient déjà tenu, ces derniers mois, des positions proches pour dénoncer les conditions de travail dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dependantes (EHPAD), en particulier lors de la grève de Foucherans, dans le Jura(1). Cette fois, l’association et cinq syndicats (CFDT, CFTC, CGT, FO et UNSA) cosignent un « appel des professionnels au président de la République » qu’ils devaient envoyer le 19 octobre à Emmanuel Macron. Il lui demandent un rendez-vous pour l’« alerter » sur l’accompagement des personnes âgées « tant à domicile qu’en établissement », lit-on dans ce texte.
Même si les organisations ont déjà été reçues par les services du Premier ministre, Edouard Philippe, ou de la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, « nous avons décidé d’interpeller le plus haut niveau de l’Etat », car la situation des salariés et des personnes âgées accompagnées « devient inextricable », a expliqué aux ASH le président de l’AD-PA, Pascal Champvert. « Il y a eu des mouvements sociaux au printemps, puis cet été, et actuellement il y en a de nouveau quelques-uns. C’est un malaise permanent », observe-t-il. Pour l’AD-PA, « il est important de dire que ce que vivent les salariés, les directeurs le vivent aussi ». « Au quotidien, nous ne sommes pas toujours d’accord sur tout, mais dans ce moment de gravité, il faut savoir taire nos différences d’analyses sur tel ou tel point », a poursuivi Pascal Champvert.
Dans leur appel, les organisations réitèrent des constats maintes fois formulés : « Les personnes âgées sont insuffisamment accompagnées dans les actes de la vie quotidienne, les familles s’épuisent et les professionnels sont au bord de la rupture », résument les organisations, soulignant que « les financements n’ont pas suivi l’augmentation du nombre de personnes âgées ». Ou encore que la fréquence des accidents du travail est trois fois plus importante que la moyenne dans le secteur de l’aide et des soins à la personne, avec une sinistralité en hausse de 45 % en dix ans(2).
Du côté des préconisations, les organisations réclament en premier lieu de « mettre fin à l’application de la réforme de la tarification », qui risque de « réduire les budgets de nombreux établissements avec des conséquences en matière de réductions d’effectifs ». Alors qu’Agnès Buzyn a annoncé, le 17 octobre, « une enveloppe pour appuyer les EHPAD les plus en difficulté en 2018 » (voir ce numéro, page 6), Pascal Champvert « attend d’en savoir un peu plus ». Mais il juge que « si l’enveloppe sert bien à suspendre la baisse de moyens pour les établissements » perdants de la réforme, « ce sera positif ». Les organisations appellent aussi à « maintenir et pérenniser tous les postes, notamment ceux occupés jusque-là par les contrats aidés », ou encore à améliorer les « ratios de personnel » par résident.
S’agissant de l’aide à domicile, les signataires appellent à « réorganiser le financement » des services « pour que la pérennisation du secteur ne se fasse plus au détriment des conditions de travail des salariés ». Plus largement, ils invitent à « mettre en place un financement pérenne et solidaire de l’aide à l’autonomie prenant en compte les besoins humains » et à « engager une large réflexion sur le regard que porte notre société sur le vieillissement, les personnes âgées et les salariés à leur service ».
« Nous verrons ce que fera l’Etat » de ce courrier avant d’envisager d’autres actions conjointes, a exposé Pascal Champvert. Il compte privilégier le dialogue avec le gouvernement, encore « récemment installé », en espérant qu’il pourra « désamorcer quelques bombes posées par ses prédécesseurs ».