« Un projet [de budget] qui s’inscrit dans l’objectif de baisse de la dépense publique et de réduction du déficit » à l’horizon 2020. C’est de cette manière que la ministre des Solidarités et de la Santé et le ministre de l’Action et des Comptes publics ont présenté, le 28 septembre, le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2018. Afin de poursuivre le rétablissement des comptes sociaux en 2018, le PLFSS prévoit de réduire de 3 milliards d’euros le déficit cumulé du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse. Ainsi, à la fin de l’exercice, il devra atteindre 2,2 milliards d’euros (contre 5,2 milliards en 2017). S’il est un projet « de responsabilité », ce texte « dense, qui fait des choix », est aussi un projet « de transformation et de solidarité » en faveur des usagers, a indiqué Agnès Buzyn. Le texte devrait être adopté en conseil des ministres le 11 octobre, pour être ensuite discuté en commission à l’Assemblée nationale à compter du 17 octobre.Retour sur les principales mesures qui concernent les secteurs sanitaire et médico-social.
Le gouvernement propose au Parlement de voter un objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) de 195,2 milliards d’euros (contre 182,3 milliards cette année), en progression de 2,3 %.
Le sous-objectif de l’ONDAM « établissements de santé » progresserait de 2 %. Ces établissements devraient percevoir également le produit de l’augmentation de 2 € du forfait journalier hospitalier, qui doit passer de 18 € à 20 €. Pour les séjours en psychiatrie, le montant ne devrait augmenter que de 1,5 €, passant de 13,5 € à 15 €. S’agissant du secteur médico-social, 22 milliards d’euros devraient être consacrés, en 2018, au financement des structures accueillant des personnes âgées en perte d’autonomie ou des personnes handicapées. Ce montant correspond à une augmentation de 2,6 % du sous-objectif de l’ONDAM médico-social par rapport à 2017, soit 515 millions d’euros supplémentaires.
Pour atteindre cet objectif, la maîtrise de l’évolution des dépenses doit se poursuivre. Les économies attendues en 2018 s’élèvent à 4,1 milliards d’euros et ont trait, notamment, à la structuration de l’offre de soins et au contrôle et à la lutte contre la fraude. Sur ce point, un plan d’appui à la transformation de notre système de santé 2018-2022 doit prochainement être élaboré afin d’organiser les différents axes de la maîtrise des dépenses.
Axe central de la nouvelle stratégie nationale de santé qui doit être fixée d’ici à la fin de l’année(1), la prévention se traduit dans deux mesures du PLFSS :
→ l’augmentation progressive du prix du paquet de cigarettes à 10 € en 2020, avec une première hausse prévue dès mars 2018 (+ 1 €) ;
→ le passage de 3 à 11 vaccins obligatoires à compter du 1er janvier 2018. Cette obligation vaccinale devrait conditionner, pour les enfants nés à partir de cette date, « l’entrée et le maintien dans toute école, garderie, colonie de vacances ou autre collectivité d’enfants et ce à compter du 1er juin 2018 », précise le projet de loi.
Conformément à l’engagement gouvernemental en faveur de l’inclusion des personnes en situation de handicap, rappelé lors du Comité interministériel du handicap du 20 septembre dernier(2), une partie des 22 milliards d’euros dédiés au financement du secteur médico-social doit permettre « d’améliorer l’accompagnement des personnes handicapées afin de favoriser leur inclusion dans la cité ». Sur la période 2017-2021, une enveloppe de 180 millions d’euros devrait ainsi être consacrée, pour moitié, à la « transformation de l’offre afin de favoriser l’accompagnement des personnes en milieu ordinaire (pôles de compétences et de prestations externalisées, accompagnement à domicile “hors les murs”, accueil temporaire, projets innovants…) ». Dans ce contexte, « 2028 places seront créées en 2018 dont 707 dans le cadre de l’achèvement des créations prévues par le troisième plan “autisme”, dans l’attente des résultats de la concertation sur le quatrième plan “autisme” »(3).
Dans la continuité de la démarche « une réponse accompagnée pour tous »(4), le gouvernement souhaite renforcer la capacité du secteur à trouver des solutions rapides et adaptées aux situations critiques dans le champ du handicap. Le PLFSS prévoit ainsi une enveloppe supplémentaire de 15 millions d’euros pour prévenir les départs en Belgique. Il entend, par ailleurs, généraliser le dispositif d’orientation permanent(5) dans l’ensemble des départements à compter du 1er janvier 2018. Rappelons que ce dispositif consiste, pour la maison départementale des personnes handicapées, à élaborer une orientation au regard des besoins et des aspirations de la personne handicapée, tels qu’ils sont exprimés dans son projet de vie, et non plus au regard de l’offre disponible en établissement.
Afin de renforcer l’offre disponible pour accueillir les personnes âgées en perte d’autonomie et d’adapter cette offre à l’évolution des besoins, un encadrement soignant plus important est jugé nécessaire par les pouvoirs publics. A cette fin, il est prévu de créer 4 525 places supplémentaires en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), 693 places d’accueil de jour et 482 places d’hébergement temporaire.
L’accompagnement des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer devrait aussi être renforcé, avec la création de :
→ 206 places dans les pôles d’activité de soins adaptés et 272 places en unité d’hébergement renforcé – avec 15 millions d’euros au titre des mesures nouvelles 2018 ;
→ 30 équipes spécialisées Alzheimer, dont cinq dès 2018, afin de « réduire les distances d’accès et obtenir une meilleure couverture territoriale ».
Le PLFSS entend, en outre, poursuivre la réforme du financement des EHPAD malgré les nombreuses défiances à son égard(6). Les moyens des établissements devraient être renforcés grâce à une enveloppe de 100 millionsd’euros, consacrée à l’amélioration du taux d’encadrement, de la qualité des accompagnements et des conditions de travail des personnels.
Enfin, dans la continuité de ce que propose la mission « flash »(7), 10 millions d’euros devraient être dédiés à la première tranche d’un plan progressif d’extension du dispositif expérimental des astreintes de nuit dans les EHPAD, afin de pallier les sous-effectifs importants dans ces structures, en particulier la nuit.
« Dans un objectif de recherche d’efficience et de meilleure adéquation entre l’offre et les besoins dans le secteur médico-social », il est aussi prévu d’harmoniser les dispositions relatives aux contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) des EHPAD et des autres établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS), de supprimer l’opposabilité des conventions collectives de travail aux ESSMS signataires d’un CPOM et d’introduire la caducité partielle des autorisations délivrées aux structures.
Dans le cadre de la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, près de 50 millions d’euros devraient être consacrés, en 2018, au renforcement des dispositifs facilitant l’accès aux soins et la prise en charge des patients précaires, notamment les personnes migrantes, au sein des établissements de santé. Objectif : conforter le rôle des permanences d’accès aux soins en santé.
Les crédits alloués aux établissements de santé pour la prise en charge des patients précaires devraient également être « revus à la hausse » afin d’accompagner leur forte croissance et de répondre aux besoins spécifiques de certains territoires particulièrement confrontés à ce phénomène, notamment les départements d’outre-mer.
Le PLFSS pour 2018 prévoit une revalorisation progressive du minimum vieillesse de 100 € par mois. Ainsi, le montant de l’allocation de solidarité pour les personnes âgées devra être porté à 903 € par mois en 2020, contre 803 € actuellement. Il augmentera de 30 € au 1er avril 2018, puis de 35 € au 1er janvier 2019 et 35 € au 1er janvier 2020. En outre, les dates de revalorisation des pensions de retraite et du minimum vieillesse, fixées depuis 2014 au 1er octobre et au 1er avril, seront alignées au 1er janvier, à partir de 2019.
Le soutien aux familles les plus fragiles constitue l’une des grandes priorités de la politique familiale du gouvernement. « Ciblant l’enjeu de la garde d’enfant », le PLFSS pour 2018 prévoit de majorer de 30 % le montant plafond du complément de libre choix du mode de garde, afin d’aider financièrement les parents qui élèvent seuls leurs enfants en bas âge et recourent à un assistant maternel, une garde à domicile ou une micro-crèche. L’aide mensuelle pourrait ainsi augmenter jusqu’à 250 € par mois.
Par ailleurs, les parents isolés qui ne perçoivent pas de pension alimentaire bénéficieront également d’un soutien en 2018. Le montant de l’allocation de soutien familial, fixé à 109,7 € par mois, sera revalorisé de 6 € le 1er avril 2018, selon le projet de loi.
Enfin, les conditions de ressources et les montants de l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant seront alignés sur ceux, plus bas, du complément familial, pour les enfants nés ou adoptés à partir du 1er juillet 2018, ajoute le texte.
« Dans un objectif de recherche d’efficience et de rationalisation dans le pilotage des politiques publiques », le PLFSS pour 2018 prévoit le transfert de l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements sociaux et médico-sociaux au sein de la Haute Autorité de santé au 1er avril 2018. Cette réforme vise à « favoriser une politique d’évaluation de la qualité transversale aux champs sanitaire, social et médico-social », tout en préservant les spécificités de chaque secteur.
Comme l’avait déjà annoncé le président de la République lors de la campagne présidentielle, les actifs devraient bénéficier d’un allégement de leurs cotisations sociales :
→ dès le 1er janvier 2018, les salariés pourront constater une baisse de 2,25 points des cotisations salariales qu’ils acquittent, soit les deux tiers de la baisse totale prévue ;
→ à compter du 1er octobre 2018, ils bénéficieront du tiers restant.
Dans un même temps, la contribution sociale généralisée (CSG) sera augmentée de 1,7 point. Cette hausse ne devrait concerner que les retraités percevant un revenu fiscal de référence au moins égal à 14 375 € par part, « excluant ainsi de cette hausse les 40 % des retraités ayant les revenus les plus faibles ». L’augmentation de la CSG devrait, par ailleurs, être compensée dès 2018 par la réduction d’un tiers du montant de la taxe d’habitation au profit de 80 % des foyers.
(4) Voir notamment ASH n° 2997 du 10-02-17, p. 41.
(5) Voir notamment ASH n° 2934 du 20-11-15, p. 8.
(6) Voir notamment ASH n° 3022 du 25-08-17, p. 5 et n° 3016 du 23-06-17, p. 16.