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Contrats aidés : l’heure des comptes dans le secteur social et médico-social

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La contre-offensive contre la réduction du nombre de contrats aidés continue de prendre de l’ampleur. « Non, Monsieur Macron, les contrats aidés ne sont pas inutiles », répond une pétition lancée le 7 septembre par la Fédération des acteurs de la solidarité(1) pour demander au gouvernement de revenir sur sa décision et de « mettre en place une concertation ambitieuse pour améliorer la qualité de ces outils de lutte contre l’exclusion ». Au 13 septembre, le texte avait recueilli près de 18 000 signatures.

Plutôt que de conduire « une centaine de milliers de nos concitoyens au chômage » par une chute drastique du nombre de contrats aidés,la situation socio-économique impose d’augmenter leur volume et d’améliorer leur qualité, plaident la trentaine de premiers signataires, dont des personnalités du secteur de la solidarité, de la recherche et du monde syndical. Le texte appelle le gouvernement à s’inspirer de l’expertise développée par les acteurs associatifs – notamment de l’insertion par l’activité économique, du secteur adapté et protégé – pour renforcer l’efficacité de la formation en l’articulant à un accompagnement personnalisé et une situation de travail.

Inquiétudes dans l’aide à domicile

Malgré les instructions données aux préfets, selon lesquelles l’action sociale et médico-sociale figure parmi les champs préservés(2), les acteurs de ce secteur sont inquiets. Dans un communiqué du 7 septembre, les quatre fédérations de la branche – Adessadomicile, l’ADMR (fédération pour l’aide à domicile en milieu rural), la Fnaafp (Fédération nationale des associations de l’aide familiale populaire)/CSF et l’UNA (Union nationale des associations de soins et services à domicile) – expliquent que, « encouragées par les pouvoirs publics dans cette voie pendant des années, les structures de [leurs] réseaux ont recours aux contrats aidés tant pour le personnel d’intervention à domicile que pour le personnel administratif ». Elles soulignent que « la remise en cause soudaine et non concertée de ces dispositifs, dans un contexte économique précaire, suscite de grandes inquiétudes et représente une réelle mise en danger pour de nombreuses structures et les personnes qu’elles accompagnent ». Ne pouvant, à court terme, transposer ces contrats non renouvelés ou supprimés en contrat de droit commun, elles expliquent que des services seront contraints « soit à ne plus accomplir leur mission, laissant des milliers de personnes fragilisées sans accompagnement, soit à les faire payer plus en augmentant leur reste à charge ». Cette coupe pourrait aussi entraîner des fermetures, « avec les conséquences dramatiques que cela peut engendrer ».

Parcours d’insertion

Guillaume Quercy, président de l’UNA, illustre la situation très concrètement : « Les 22 services adhérents UNA de Dordogne interviennent auprès de 8 000 personnes. Ils employaient à ce jour 139 salariés en contrat aidé, dont une cinquantaine devraient s’arrêter à la rentrée. Ce sont 50 personnes qui se retrouvent sur le carreau ! Que dirait-on s’il s’agissait d’un plan social dans une entreprise ? » Les quatre fédérations soulignent que « cette remise en cause est d’autant plus regrettable que, dans la branche, les salariés recrutés dans le cadre de contrats aidés bénéficient systématiquement de formations qualifiantes ou professionnalisantes (plus de 7 500 personnes formées en 2016 pour la branche du domicile), notamment grâce à un taux conventionnel de contribution à la formation professionnelle deux fois supérieur au taux légal ». Et ils se voient fréquemment proposer une embauche à l’issue de ce premier contrat. « Dans les structures UNA de l’Orne, 70 % des personnes en contrat aidé deviennent ensuite des salariés comme les autres. Dans le Lot-et-Garonne, 20 % des contrats aidés prennent d’emblée la forme d’un CDI, et 90 % des autres sont pérennisés dans leur emploi », abonde Guillaume Quercy. Catherine Humbert, directrice de l’Uriopss (Union régionale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux) Alsace, partage le même constat : « Le secteur social et médico-social, au financement pourtant contraint et instable, parvient malgré tout à jouer le jeu des parcours d’insertion », fait-elle valoir. Une enquête « flash » menée par l’Uriopss montre qu’à la date du 12 septembre, 37 répondants (sur 70 personnes morales adhérentes) avaient identifié 308 contrats d’accompagnement dans l’emploi (CAE) en cours. Et parmi ces 37 répondants, 20 ont fait déboucher une part de leurs CAE sur des CDD, CDI, formations longues ou contrats d’apprentissage au cours des deux dernières années.

La Fnadepa (Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées) appelle aussi le gouvernement à suspendre sa décision « en l’attente de solutions pérennes et efficaces », témoignages à l’appui : 92 % des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ayant répondu à une enquête menée auprès de ses adhérents – soit plus d’un millier de directeurs – « ont recours à ce type de contrats, en majorité pour des postes de logistique (agent d’entretien, d’hôtellerie, de service, aide cuisine), auxquels il faut ajouter notamment les agents participant à l’animation et au maintien du lien social, tous indispensables au bon fonctionnement d’une structure et concourant à la qualité de vie des personnes âgées dépendantes ». Dans un contexte déjà difficile pour le secteur, la fédération s’inquiète des effets de ces nouvelles restrictions sur les équipes et l’accompagnement des personnes âgées.

« Moratoire »

De son côté, le RTES (Réseau des collectivités territoriales pour une économie solidaire) « accueille favorablement » l’annonce de la mission confiée à Jean-Marc Borello(3) sur les contrats aidés, tout en estimant qu’il « serait bienvenu qu’elle s’accompagne d’un moratoire sur la suppression des contrats aidés ». Le réseau considère en outre que les critères d’évaluation de ces contrats ne devraient pas être limités « au simple retour à l’emploi » et gagneraient à inclure « les impacts sociaux (réinsertion sociale, confiance en soi, développement de capacités…) ». Le Mouvement associatif a pour sa part réagi aux instructions données aux préfets en dénonçant l’incitation qui leur est faite de recourir notamment au service civique pour compenser la diminution des contrats aidés. « C’est une confusion inacceptable, s’insurge le Mouvement associatif. Le service civique est destiné à favoriser l’engagement des jeunes, et non à pourvoir des emplois qui ne peuvent être financés. »

Notes

(1) Accessible sur http://bit.ly/2gG4Q3E.

(2) Dans une lettre adressée aux préfets le 6 septembre par les ministres de la Cohésion des territoires, du Travail et de l’Education nationale, il est indiqué que font partie des priorités « les secteurs d’urgence en matière sanitaire et sociale, qui s’entend comme les actions portées par le secteur associatif, telles que l’aide alimentaire, l’accompagnement social ou l’hébergement, notamment médicalisé, des jeunes enfants et des personnes dépendantes, sans abri ou atteintes d’un handicap », et qu’une « priorité sera accordée aux renouvellements de contrat en cours ».

(3) Voir ASH n° 3024 du 8-09-17, p. 6.

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