Quelques jours après avoir assisté, le 8 septembre, au ministère de la Cohésion des territoires, à une réunion de présentation du plan quinquennal « logement d’abord » prévu par le gouvernement, les acteurs de l’hébergement et du logement attendaient de pied ferme des précisions, notamment chiffrées, lors des annonces publiques sur le sujet. Lors de son déplacement à Toulouse, le 11 septembre, Emmanuel Macron, accompagné du ministre de la Cohésion des territoires, Jacques Mézard, a en effet confirmé le lancement, en 2018, du plan, l’un des axes de la stratégie globale pour le logement dont la présentation, initialement prévue pour le 13 septembre en conseil des ministres, a finalement été reportée. L’objectif, rappelé aux associations au début du mois de juin par Richard Ferrand, alors ministre : favoriser un accès durable au logement des personnes à la rue ou hébergées, afin que leur parcours d’insertion soit ainsi favorisé au lieu d’être un préalable. « Nous sommes satisfaits que l’Etat valide la logique que l’on porte depuis longtemps, en reprenant beaucoup d’éléments issus de la contribution de la fédération. Néanmoins, nous avons des interrogations sur la méthode et le budget » prévus pour sa mise en œuvre, commente Florent Guéguen, directeur général de la Fédération des acteurs de la solidarité et porte-parole du Collectif des associations unies pour une nouvelle politique du logement des personnes sans abri et mal logées.
« Le président annonce une vraie dynamique, considérée comme un changement de philosophie », estime aussi Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé-Pierre et porte-parole du collectif, présent à la table ronde organisée à la mairie de Toulouse. « Mais nous avons attiré l’attention sur l’importance de la production d’une offre accessible et sur le fait qu’on ne peut pas déconnecter la politique du “logement d’abord” du reste de la politique du logement. Le plan prévoit un volet “prévention”, or les APL [aides personnalisées au logement] font partie des dispositifs de protection des ménages ». Sur ce point, les craintes s’accroissent après la révélation par plusieurs sources de la volonté du gouvernement, dans le projet de loi de finances pour 2018, de baisser les APL des allocataires du parc HLM jusqu’à 50 euros. « L’objectif que nous nous fixons, c’est de faire en sorte que pour ceux qui touchent les APL dans le logement social, il y ait une baisse des loyers exactement identique à la baisse des APL versées aux locataires du parc HLM », a répondu le Premier ministre, Edouard Philippe, interrogé sur le sujet le 13 septembre sur France 2. L’Union sociale pour l’habitat a de nouveau alerté du risque économique encouru par les organismes HLM en cas de baisse globale des loyers. Et a demandé à être reçue « sans délai » par le chef de l’Etat.
Emmanuel Macron a réaffirmé l’objectif de créer, pendant le quinquennat, 40 000 places supplémentaires en intermédiation locative et 10 000 places en pension de famille, ce qui devrait contribuer à réduire le nombre de nuitées hôtelières. « A été annoncée une augmentation de 10 % du BOP [budget opérationnel de programme] 177[hébergement, parcours vers le logement et insertion des plus vulnérables] dans la prochaine loi de finances, mais sans précision sur sa ventilation », ajoute Christophe Robert. Dans un premier temps de transition, les crédits de l’hébergement ne devraient pas entrer en concurrence avec ceux du logement accompagné.
Alors que les acteurs associatifs estiment les besoins en logement très social PLAI (prêt locatif aidé d’intégration) à 60 000 constructions supplémentaires par an, soit un doublement de la production annuelle, le chef de l’Etat a annoncé que celle-ci serait portée à 40 000 logements supplémentaires par an dès 2018 et sur l’ensemble du quinquennat. Outre que ce chiffre reste en deçà de l’effort demandé, « il risque de ne pas être atteint sans une revalorisation des aides à la pierre », fait valoir Florent Guéguen. Si le président de la République a évoqué, à Toulouse, un chantier pour valoriser le travail social, sur lequel il devrait s’exprimer mi-octobre, aucun élément n’a été livré sur l’évolution des moyens de l’accompagnement. « Pourtant une clé de réussite de la réforme », souligne pour sa part Florent Guéguen. Le 8 septembre, plusieurs groupes de travail ont été annoncés, notamment sur l’accompagnement social – avec l’idée de créer des plateformes territoriales, de développer l’« aller vers », le recours aux travailleurs pairs – et sur l’accompagnement au changement du secteur de l’accueil, de l’hébergement et de l’insertion. Une stratégie qui devrait impliquer un travail technique et financier, mais aura aussi, si elle est engagée, « un impact structurel sur le travail social et l’accompagnement dans le logement, dans un processus de désinstitutionnalisation », pronostique le directeur général de la Fédération des acteurs de la solidarité.
Reste aussi à savoir comment les collectivités territoriales seront mobilisées. Le gouvernement a prévu une mise en œuvre accélérée du « logement d’abord » dans 15 territoires volontaires, dont Toulouse, et d’articuler les démarches locales et nationale. Lors de la présentation faite aux acteurs de l’hébergement et du logement le 8 septembre, une conférence nationale a été annoncée pour novembre.