Le juge des référés du Conseil d’Etat a estimé, dans une ordonnance rendue le 25 août, que le département de l’Isère a porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale d’un mineur isolé étranger en refusant de pourvoir à son hébergement.
Cette affaire concernait un ressortissant angolais âgé de 16 ans entré seul en France au mois de juillet dernier, sans famille connue et dépourvu de toutes ressources. Il était depuis contraint de vivre dans la rue. Il s’était présenté à plusieurs reprises à l’Association départementale d’accueil des travailleurs étrangers de l’Isère, chargée par le département d’organiser l’accueil d’urgence et l’évaluation des mineurs isolés. L’association ne s’étant pas acquittée de cette mission, l’intéressé avait alors saisi le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble qui avait enjoint au président du conseil général d’organiser l’accueil provisoire d’urgence du jeune homme. Le département a fait appel de cette décision.
Dans son ordonnance, le juge des référés du Conseil d’Etat a rappelé qu’en matière d’hébergement d’urgence, une obligation particulière pèse sur le département « en faveur de tout mineur dont la santé, la sécurité ou la moralité sont en danger ». En conséquence, un refus d’accès au dispositif d’hébergement et d’évaluation, opposé par l’autorité départementale à une personne se disant mineur isolé, est « susceptible, en fonction de la situation sanitaire et morale de l’intéressé, d’entraîner des conséquences graves caractérisant une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ».
Dans cette affaire, le Conseil d’Etat a relevé que la minorité de l’intéressé n’est pas mise en doute par le département et que sa vulnérabilité est attestée par les pièces du dossier. Si le département ne conteste pas ces éléments, il se prévaut, en revanche, du fait que la forte croissance du nombre de mineurs isolés étrangers se présentant chaque année ne lui permet pas de satisfaire toutes les demandes. La Haute Juridiction administrative rejette cet argument.
Le Conseil d’Etat relève que, si le département fait état d’une augmentation sensible des moyens consacrés en 2017 à cette mission – à hauteur de 9,5 millions d’euros – alors que le nombre de places d’hébergement dédiées à cet accueil d’urgence atteint environ 300, cette collectivité, dont le budget pour 2017 s’établit à plus de 1,5 milliard d’euros, n’apporte pas d’élément permettant d’établir que l’augmentation de ses capacités d’hébergement et l’accélération des procédures d’évaluation, en vue de respecter les obligations qui pèsent sur elle, excéderaient ses moyens dans une mesure qui justifierait son refus d’exercer cette responsabilité. La Haute Juridiction retient en outre que le coût des cinq premiers jours de prise en charge et d’évaluation de chaque mineur lui est remboursé par le Fonds national de la protection de l’enfance. L’appel est donc rejeté.