Les contrats aidés « sont, en période de crise, le seul moyen d’accès à l’emploi pour les personnes qui en sont le plus éloignées ». Et sans eux, « beaucoup d’associations, mais aussi de collectivités locales ou d’entreprises, ne pourraient mener à bien leurs activités ». L’avertissement est lancé par sept organisations (Fédération des acteurs de la solidarité, APF, ATD Quart-monde, Coorace, Emmaüs France, Secours catholique, Uniopss). Dans un communiqué du 24 août, elles dénoncent « un coup de massue pour l’emploi des plus précaires ». Tout aussi préoccupé, le Mouvement associatif, qui revendique plus de 600 000 associations représentées, a lui aussi demandé au gouvernement, le 29 août, de surseoir à sa décision et d’ouvrir une concertation.
La limitation de ces emplois subventionnés est prévue dès le second semestre. « Près de 310 000 contrats aidés » seront « disponibles au total pour l’année 2017 », écrit la direction générale de l’emploi et de la formation professionnelle (DGEFP) dans une instruction adressée le 18 août aux préfets, divulguée par l’AFP. Le 24 août, le Premier ministre, Edouard Philippe, a revu ce chiffre à 320 000 lors d’une interview sur BFM TV et RMC. Certes, cela représente plus d’emplois que ceux déjà annoncés dans le cadre du budget 2017 (280 000 prévus initialement, chiffre porté à 293 000 en juillet). Mais cela reste loin des 459 000 contrats signés en 2016. Ensuite, en 2018, le nombre de contrats devrait passer sous la barre des 200 000, a laissé entendre le chef du gouvernement. Selon lui, les emplois aidés sont « une politique publique qui ne produit pas de bons résultats pour le retour à l’emploi », et se révèle « très onéreuse ». Il entend « consacrer des moyens non pas à financer des contrats aidés » mais plutôt à « financer des formations individualisées qui permettent un retour durable à l’emploi ». Cependant, « on va essayer de faire en sorte […] que l’utilisation des contrats aidés dans l’Education nationale et les outre-mer soit préservée », a-t-il nuancé.
« Si le secteur sanitaire et social semble constituer une priorité dans les prochains arbitrages du gouvernement, d’autres secteurs », comme « l’animation, l’éducation, le sport, le tourisme social et l’aide […] à domicile, seront durement touchés » par cette restriction des contrats, se désole l’Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire (UDES), dans un communiqué du 28 août. Tout en défendant les emplois d’avenir(1), destinés aux 16-25 ans, elle convient qu’il faudrait « faire évoluer le positionnement des CUI-CAE [contrats d’accompagnement dans l’emploi] afin de les rendre plus efficaces dans la lutte contre le chômage ». Elle plaide pour leur rénovation, à travers « une programmation pluriannuelle des enveloppes », « l’assurance d’un haut niveau de prise en charge et d’une ambition » en matière « de formation et d’accompagnement du titulaire du contrat » et « une réflexion sur les contours (ciblage, durée, niveau de financement) de ces contrats en lien avec l’évolution des modèles socio-économiques des associations ».
La Fédération hospitalière de France (FHF), elle, compte faire connaître sa position lors de son université d’été, les 5 et 6 septembre à Paris. Elle évalue actuellement le recours des établissements de la fonction publique hospitalière aux emplois aidés, et les effets que leur limitation pourrait avoir. Ce secteur compte environ 25 000 CUI-CAE ou emplois d’avenir, partagés en deux moitiés entre le sanitaire et le médico-social, a précisé le président de la FHF, Frédéric Valletoux, lors d’une conférence de presse le 29 août. Tout en concédant que les emplois aidés sont « peut-être d’une efficacité variable » dans le sanitaire, il a fait état de « remontées toutes très inquiètes » d’adhérents de la FHF dans le médico-social, en particulier au sein des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).
A très court terme, une grande partie des craintes portent sur l’Education nationale. A la Réunion, des élus ont repoussé de cinq jours la rentrée scolaire, qui a eu lieu le 22 août dans certaines communes, à cause de leurs difficultés – finalement levées – à recruter pour des postes en contrat aidé. Dans le Calvados, la maire de Valorbiquet menaçait, le 28 août, de repousser la rentrée d’une semaine si elle n’obtenait pas les cinq contrats qu’elle réclamait pour les trois écoles de cette ville de 2 500 habitants. Le même jour, l’Association des maires de France (AMF), qui avait déjà interpellé le gouvernement début août(2), lui a encore demandé « solennellement » de « prendre les mesures adéquates pour le bon déroulement de la rentrée ». Edouard Philippe a promis, le 30 août, une concertation à ce sujet avec les élus locaux.
Quant à l’Unapei (Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis), elle a exprimé sa préoccupation sur l’accompagnement des élèves handicapés. En réponse, le ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer, a promis la création à la rentrée de 8 068 emplois supplémentaires (en équivalent temps plein) auprès des élèves handicapés, portant le total à 61 462. L’ensemble représentera « plus de 80 000 accompagnants » (dont une partie à temps partiel), répartis entre 50 000 AVS (auxiliaires de vie scolaire, en contrat aidé) et 30 000 AESH (accompagnants des élèves en situation de handicap, sous contrat de droit public), selon un communiqué du ministère (voir ce numéro, page 6). Jean-Michel Blanquer a par ailleurs assuré qu’outre-mer, lorsqu’il y aurait des restrictions de contrats aidés, ce seraient « des diminutions faibles », « de façon à tenir compte des spécificités de ces territoires ».
(2) Dans un courrier adressé au Premier ministre le 23 août, Jean-Patrick Gille, président de l’Union nationale des missions locales, plaide pour le maintien des emplois d’avenir – Voir