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Le débat relancé sur le rôle des aides au logement

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Pointées dans le discours de politique générale du Premier ministre, début juillet, comme un dispositif coûteux et insuffisamment efficace, également dans le collimateur de la Cour des comptes, les aides au logement subiront bien un coup de rabot dès cette année. Une décision décriée par les acteurs du secteur, de la lutte contre les exclusions, les syndicats, les représentants des étudiants et plusieurs élus, qui dénoncent une décision inique à l’égard des plus fragiles.

Il n’est cette fois pas question, au contraire des réformes engagées sous le quinquennat Hollande, de modification de barème ou de base de calcul(1), mais d’une réduction de 5 € pour tous les allocataires. Un décret devrait paraître prochainement pour la mise en œuvre, dès le 1er octobre, de ce projet rendu public par le gouvernement le 22 juillet et qui figure parmi les mesures d’économies pour 2017. Précision apportée par l’équipe gouvernementale : cet « ajustement » ne devrait pas entraîner la diminution du nombre d’allocataires, grâce à une révision du seuil de versement, qui doit passer de 15 € à 10 €. Quant aux intentions du gouvernement pour 2018, le ministre de la Cohésion des territoires, Jacques Mézard, a seulement indiqué qu’une « réforme globale des aides personnelles au logement » serait adoptée dans le cadre du projet de loi « logement » qui devrait être finalisé cet automne(2).

« Les aides sont des soins »

« Oui, Monsieur le président, nous sommes à 5 € près », a vivement réagi la CNL (Confédération nationale du logement) dans une pétition, accompagnée de la diffusion de faux billets de 5 € pour symboliser l’argent retenu dans le portefeuille des locataires modestes. Cette somme peut « représenter une journée de “reste pour vivre”, c’est-à-dire ce qu’il reste à une personne lorsqu’elle a assumé ses dépenses contraintes », s’est également alarmée l’Union sociale pour l’habitat, tandis que Jean-Louis Deroussen, président du conseil d’administration de la Caisse nationale des allocations familiales, déplorait, le 25 juillet sur RTL, que la caisse n’avait « pas été consultée » sur ce projet. « Les aides sont des soins ; les restreindre alors qu’elles sont un minimum pour ne pas sombrer est un déni des situations de pauvreté », s’est insurgé pour sa part Bernard Devert, président fondateur de l’association Habitat et Humanisme.

Contestation du CNLE

Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé-Pierre, qui plaide pour une revalorisation des aides au logement, a aussitôt demandé à être reçu par le gouvernement. Comme la fondation, la CLCV (Consommation, logement, cadre de vie) rappelle l’érosion du caractère solvabilisateur de cette prestation : « En 1977, on pouvait toucher une aide au logement avec des revenus inférieurs à 1,7 SMIC, alors qu’à ce jour cette même aide est octroyée à des ménages dont les revenus sont inférieurs à 1,02 SMIC. De la même façon, le loyer moyen des allocataires a progressé de 35 % depuis 2000, alors que le loyer plafond des aides n’a progressé que de 17 %. » L’évolution du budget consacré à l’aide personnalisée au logement (APL), à l’allocation de logement familiale (ALF) et à l’allocation de logement sociale (ALS) – soit 6,5 millions de foyers allocataires au total à la fin 2015 – est due à « une augmentation notable du nombre de bénéficiaires, liée à la montée dramatique de la précarité dans notre pays », souligne l’association de consommateurs. Parmi ceux qui réfutent l’argument selon lequel ces aides favorisent la hausse des loyers, DAL (Droit au logement) réitère son vœu de voir généraliser l’encadrement de ces derniers.

Dans une lettre adressée le 24 juillet au Premier ministre, Etienne Pinte, président du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE), et Jérôme Vignon, président de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale, lui demandent de reconsidérer son choix. « Relativement aux montants dépensés, les APL ont un impact sur la réduction du taux de pauvreté supérieur à celui de l’ensemble des minima sociaux, dû à leur concentration sur les populations d’âge actif et les familles monoparentales, défendent-ils. En comparaison de la plupart des minima sociaux, notamment du RSA [revenu de solidarité active] et de la prime d’activité, les APL affichent un taux de recours élevé, de l’ordre de 80 %, du fait de leur attribution effectuée le plus souvent d’office par les caisses d’allocations familales, au vu des niveaux de ressources et en lien avec l’attribution du RSA et du fait qu’elles ne sont pas ressenties comme « stigmatisantes ». » Les deux signataires invitent aussi le gouvernement à expliciter devant le CNLE « comment il compte conduire une politique publique du logement plus efficace ».

Notes

(1) Voir ASH n° 2980 du 21-10-16, p. 38, sur la prise en compte du patrimoine, et n° 2969 du 15-07-16, p. 46, sur la dégressivité au-delà d’un certain montant de loyer.

(2) Le ministère a annoncé, le 4 août, ouvrir une concertation auprès « des collectivités territoriales et des acteurs du logement, de la construction et de l’aménagement » sur ce projet de texte.

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