Entre 2002 et 2010, David Grand, sociologue et formateur en travail social, s’est immergé plusieurs mois successivement dans trois centres d’hébergement pour personnes sans domicile de la région lyonnaise. De cette longue fréquentation de résidents, l’auteur rapporte une moisson de « chroniques ethnographiques », sorte de journal de bord où il relate ses observations et étonnements. Ce choix de restituer un matériau, si ce n’est brut, du moins peu élaboré part d’une double conviction. D’une part, celle que les hébergés ne sont pas des « idiots culturels » mais « des informateurs, voire, mieux, des “coexperts” […], à condition de se mettre à l’écoute de leurs préoccupations et questionnements », d’où l’intérêt de rendre compte de leur expérience sans trop d’apprêts. D’autre part, celle que les lecteurs aussi sont intelligents et capables de se faire leur propre opinion, sans qu’on leur dise quoi penser. Toutefois, même si le chercheur n’a pas la « vérité révélée », lui seul, qui connaît les trois structures d’hébergement, est en mesure d’en confronter les modes de fonctionnement et de pointer leurs atouts et inconvénients respectifs au regard du soutien apporté aux hébergés. Appropriation des lieux, relations entre les usagers, effets de la vie collective et voies de sortie de l’hébergement sont parmi les thèmes principaux de cette analyse comparative. David Grand en tire un certain nombre d’enseignements pour les acteurs des politiques publiques et du travail social, dont l’élément central est la nécessité, pour les hébergés, de disposer d’un espace privatif leur offrant sécurité et intimité. Autrement dit, un véritable abri.
L’hébergement social des SDF. Ethnographie de l’expérience vécue des hébergés
David Grand – Ed. L’Harmattan – 20 €