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Aide aux victimes : le projet de fusion de deux administrations inquiète

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L’annonce d’un rapprochement entre le secrétariat général à l’aide aux victimes (SGAV), placé sous l’autorité du Premier ministre, et le service de l’accès au droit et à la justice et de l’aide aux victimes (Sadjav), rattaché au ministère de la Justice, a soulevé la colère d’associations et de personnalités. Reste à savoir si ce projet sera maintenu malgré le départ du gouvernement de François Bayrou, l’ex-garde des Sceaux, annoncé le 21 juin. Le SGAV a été créé par un décret du 8 février 2017(1), à l’initiative de Juliette Méadel, alors secrétaire d’Etat à l’aide aux victimes. Or, le ministère a déclaré vouloir le fusionner avec le Sadjav pour « garantir aux victimes et à leurs proches une action efficace et un guichet unique », a annoncé l’ancien ministère de la Justice dans un communiqué le 16 juin, à l’issue de rencontres avec une partie des associations concernées. Actuellement, le SGAV est chargé de la coordination interministérielle, tandis que le Sadjav assure « la prise en charge opérationnelle » de l’aide aux victimes, a rappelé la Chancellerie.

Cette décision a été suivie le jour même d’une salve de critiques. La FNATH (Association des accidentés de la vie) a, dans un communiqué, prêté au gouvernement « une vision étriquée et méprisante » de l’aide aux victimes, pointant un choix « fait sans aucune concertation ». Elle voyait dans le secrétariat général l’occasion de mettre en place « une vision globale » pour « toutes les victimes », et pas seulement celles du terrorisme. « Le rattachement au ministère de la Justice constitue une erreur », juge-t-elle, faisant valoir que l’accompagnement des victimes inclut « des problématiques qui sont liées à la prise en charge des soins, au maintien en emploi, à la politique du handicap… qui relèvent d’autres ministères que celui de la Justice ».

Détricotage

Le secrétariat général « était justement le guichet unique », où les victimes peuvent être aidées dans leurs différentes démarches administratives (santé, justice, impôts), a décrit auprès de l’AFP Caroline Langlade, présidente de Life for Paris, association fondée après les attentats du 13 novembre 2015. D’après elle, le SGAV « fonctionnait bien, il fallait juste [lui] donner les moyens financiers et humains pour bosser ». « On détricote ce qui avait été construit précédemment. C’est un retour à l’état antérieur, qui avait prouvé sa complète inefficacité. C’est très choquant », a regretté Georges Salines, le président de l’association 13 novembre : fraternité et vérité. « Il va falloir des mois » avant que le nouveau système soit opérationnel, a pour sa part déploré Françoise Rudetzki, fondatrice de l’association SOS attentats.

Ce projet de réforme mécontente aussi les anciens président et rapporteur de la commission d’enquête parlementaire sur les attentats de 2015 et 2016 : Georges Fenech (Les Républicains), qui a perdu son siège de député le 18 juin, et Sébastien Pietrasanta (Parti socialiste), qui ne s’est pas représenté aux élections législatives. Nier la « dimension pluridisciplinaire » des victimes d’actes de terrorisme est un « recul » de leur protection, a assuré le premier, tandis que le second a accusé l’exécutif de « marcher sur la tête ». La commission d’enquête avait recommandé la création d’une « administration dédiée » à l’aide aux victimes.

Convocation du comité interministériel

Le ministère de la Justice, pour sa part, s’est défendu de vouloir piloter seul l’aide aux victimes. Il a affirmé vouloir « renforcer » sa « dimension interministérielle », notamment en matière « de composition des équipes [et] de moyens alloués ». Il a déclaré vouloir « cumuler » les moyens humains et financiers des deux instances, « capitaliser » sur l’expérience de chacune, « mobiliser l’ensemble des acteurs de manière efficace et réactive » et « assurer un accompagnement durable de toutes les victimes ». François Bayrou comptait convoquer « prochainement » le comité interministériel de l’aide aux victimes, créé lui aussi par le décret du 8 février, qui ne s’est pas encore réuni.

Dans une tribune adressée le 16 juin au gouvernement, une trentaine de professionnels de santé et de la recherche, dont le neuropsychiatre Boris Cyrulnik et le directeur de recherche au CNRS Denis Peschanski, ainsi que plusieurs associations, ont réclamé plus généralement « des moyens en proportion des enjeux considérables » liés à l’aide aux victimes, jugeant que ceux actuellement à disposition sont « insuffisants pour anticiper les conséquences de prochaines attaques ».

Notes

(1) Voir ASH n° 2998 du 17-02-17, p. 38.

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