Afin d’identifier des « leviers d’action pour promouvoir l’exercice du droit de vote des personnes en situation de handicap à travers les aides humaines », Handéo, via son observatoire national des aides humaines, a réalisé une enquête auprès d’établissements et services médico-sociaux (ESMS), dont les premiers résultats ont été publiés dans une « note d’avancement » qui présente les premières remontées de terrain arrêtées au 4 mai. Ce document se fonde sur les réponses de 189 ESMS qui accompagnent des personnes en situation de handicap et qui ont réalisé une action de sensibilisation ou d’accompagnement en lien avec les pratiques de vote.
Au-delà de la privation, juridique ou sociale, du droit de vote, Handéo revient sur les autres contraintes qui entravent son exercice. L’une d’elles tient au fait que le principe d’accessibilité universelle n’est pas appliqué au matériel de vote et aux programmes. Par exemple, les courriers envoyés aux électeurs ne sont pas traduits en FALC (langage « facile à lire et à comprendre ») ni en braille, de nombreux meetings ne sont pas traduits en langue des signes… Lorsque la personne a le droit de vote et qu’elle est inscrite sur les listes électorales, les problèmes de compréhension sont les premières difficultés que font remonter les ESMS, ce qui conduit certaines structures « à renoncer à sensibiliser ou à accompagner les personnes au vote », relève Handéo. Autre frein : l’inscription sur les listes. « Les troubles de la volition[1] que l’on retrouve dans le handicap psychique et/ou cognitif ou le passage à la majorité demandent de pouvoir anticiper l’inscription sur les listes électorales et de s’assurer de la validité de la carte d’identité de la personne », écrit Handéo.
Pour l’accessibilité physique, « le trajet du domicile de la personne au bureau de vote peut être problématique » (itinéraire mal desservi ou dangereux). « L’accompagnement peut s’avérer également difficile pour certains ESMS qui ne sont pas ouverts les week-ends », pointe Handéo, tandis que l’accessibilité des bureaux de vote n’est pas toujours respectée. En ce qui concerne le choix du bulletin, l’absence de photo « peut gêner le choix des candidats, en particulier pour les personnes ayant une déficience intellectuelle », tout comme l’absence de bulletin en braille peut être une limite pour les personnes avec une déficience visuelle. Pour ces dernières, « des solutions compensatoires peuvent être mises en place » : recourir à une tierce personne, classer les bulletins dont les noms auront été préalablement énoncés, demander à placer les bulletins par ordre alphabétique… Enfin, les personnes en fauteuil peuvent rencontrer des difficultés pour déposer leur bulletin dans l’urne. Des témoignages font part de deux postures chez les organisateurs de scrutin : ceux qui aident les personnes à glisser leur bulletin dans l’urne et « ceux qui ne savent pas qu’une personne “infirme” peut se faire assister et refusent de toucher l’urne ou d’aider la personne ».
Dans le cadre d’un travail de terrain plus large, « une enquête complémentaire sur les besoins en aides humaines des personnes en situation de handicap pour faciliter les pratiques de vote paraîtra fin 2017 », précise Handéo. L’association souhaite apporter des informations pratiques aux personnes handicapées sur les conditions de recours à des auxiliaires de vie dans le cadre d’un accompagnement à l’exercice du droit de vote. L’objectif est aussi de « mettre en évidence les pratiques, le savoir-faire, les compétences acquises et le souci éthique des auxiliaires de vie dans leur accompagnement des personnes handicapées à la participation à une élection » et de proposer des solutions et des bonnes pratiques face aux différentes difficultés ou restrictions liées aux types de handicap.
(1) Les troubles de la volition désignent l’impossibilité d’agir par incapacité à vouloir et décider.