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« Le contexte pédagogique a une forte influence sur l’expression des potentiels »

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Depuis 2014 et jusqu’à janvier prochain, cinq établissements(1) médico-sociaux participent à l’étude Polyscol. Danièle Toubert-Duffort, maître de conférences en psychologie clinique et responsable du projet, dresse un premier bilan de cette recherche-action pilotée par l’INS-HEA(2).
Quel est l’objet de Polyscol ?

Polyscol étudie l’adéquation entre l’offre de scolarisation des établissements et les besoins des jeunes polyhandicapés. La création des unités d’enseignement en 2009 a amené les professionnels à proposer des réponses à la question de la scolarisation. Compte tenu du peu d’expertise en la matière, j’ai défendu l’idée de développer une action de recherche. C’est pourquoi l’INS-HEA a déposé ce projet avec ses partenaires institutionnels : le CESAP [Comité d’études, d’éducation et de soins auprès des personnes polyhandicapées], l’APF-Handas [Association des paralysés de France, avec laquelle l’association Handas a fusionné en 2011] et le Centre de ressources multihandicap.

Pourquoi avoir fait le choix d’une recherche-intervention ?

On suppose que les chercheurs impliqués ont peu d’expertise sur la question et qu’ils vont devoir apprendre des professionnels. D’où le choix de mener, en parallèle d’une recherche classique en psychologie, une recherche-intervention. On a participé, aux côtés des équipes, à la mise en œuvre de la scolarisation, depuis l’évaluation des potentiels d’apprentissage jusqu’à la mise en place d’un projet pédagogique adapté. Notre étude s’est intéressée à deux axes en particulier : les mécanismes d’apprentissage de l’enfant et l’organisation des équipes pour répondre à la question de la scolarisation.

Quels enseignements tirez-vous de l’observation des capacités d’apprentissage des enfants ?

On a travaillé à partir de l’outil d’évaluation P2CJP, profil de compétences cognitives du jeune polyhandicapé (voir encadré page 23). On se rend compte que le polyhandicap recouvre des réalités bien différentes, avec une grande hétérogénéité du profil des jeunes : certains manifestent une réelle intention de communiquer ; pour d’autres, celle-ci est plus difficile à déceler. Beaucoup d’enfants montrent une sensibilité et trouvent des moyens singuliers d’exprimer leurs désirs ou leurs affinités avec un camarade (mimiques, raidissements corporels, vocalises). On peut penser qu’ils se constituent en tant que personne avec des préférences différentes de celles du camarade ou au contraire identiques. Comme tout enfant, le jeune polyhandicapé est capable d’entrer, à sa manière, dans l’univers fictionnel des contes, si l’histoire est simplifiée, jouée et symbolisée. On note aussi que le contexte pédagogique a une forte influence sur l’expression des potentiels d’apprentissage.

Vous avez mené des entretiens avec certains enfants. Qu’attendiez-vous ?

On voulait vérifier quelles traces mnésiques les enfants avaient conservées de la classe. Grâce à l’APF-Handas, qui nous a aidés à construire notre démarche d’entretien en envisageant pour chaque enfant des moyens de communication adaptés à ses possibilités (à l’aide de supports visuels, de pictogrammes), nous avons recueilli des témoignages, en revenant sur ce qu’ils avaient vécu dans le cadre scolaire : du plaisir, du déplaisir… Globalement, les enfants ont tous repéré le lieu et les acteurs de la classe. Ils témoignent d’acquis, ils sont capables de catégoriser, de repérer des rituels.

Vous avez observé les processus mobilisés par les équipes encadrantes. Qu’en ressort-il ?

L’implication des familles et le travail pluridisciplinaire font partie des principes de tous les établissements. On constate des démarches communes aux enseignants : tous utilisent des rituels d’accueil et de fin. Le temps scolaire est pensé dans la continuité des autres temps. Il ressort aussi des entretiens que nous avons menés avec les enseignants la nécessité de prêter des compétences à un enfant sans s’arrêter à ce qu’il montre à un moment donné. C’est à ce prix qu’il progresse. Et la dynamique collective permet de soutenir cette idée. Pour les enseignants, cela demande de l’énergie et des ajustements incessants de leurs pratiques et de leurs conceptions sur l’enfant.

Ces éléments donneront-ils lieu à la rédaction d’un guide de bonnes pratiques ?

Non, ce n’est pas possible. On fera toutefois une synthèse des démarches les plus adaptées et des conditions requises pour favoriser l’apprentissage.

Notes

(1) L’IMP (institut médico-pédagogique) Les Amis de Laurence (géré par l’association Notre-Dame-de-Joye) à Paris, l’EME (externat médico-éducatif) Les Cerisiers (CESAP) à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine), l’IME (institut médico-éducatif) Albertine-Lelandais (Les Papillons blancs de Lille) à Villeneuve-d’Ascq (Nord) et, pour l’APF, les IME (instituts d’éducation motrice) Christian-Dabbadie à Villeneuve-d’Ascq et Les Chemins de traverse à Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis).

(2) Institut national supérieur de formation et de recherche pour l’éducation des jeunes handicapés et les enseignements adaptés.

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