Contrairement à ce qu’indique son titre, cet ouvrage ne traite pas de « crises » familiales et conjugales, et pas non plus de « conflits » conjugaux ou parentaux, terme parfois substitué dans le texte à celui de « violences » : c’est bien de « femmes battues » qu’il est question ici, pour reprendre le vocabulaire ayant cours à la fin des années 1970. Un vocabulaire également utilisé par Martine Bodénant au début de son propos, quand elle resitue son itinéraire dans le temps. L’auteure a en effet exercé de 1978 à 2011 comme éducatrice spécialisée dans un centre d’hébergement d’urgence destiné aux femmes victimes de violences au sein du couple, accompagnées de leurs enfants. Compte rendu d’une longue expérience professionnelle, ce récit est aussi le témoignage d’une lente maturation personnelle et d’un changement de regard sur les mères accueillies. « Mais qu’est-ce qu’elles veulent », celles qui arrivent précipitamment et repartent souvent aussi vite, puis refont surface quelques mois plus tard ? Les réponses à cette question, ou du moins les éléments de compréhension permettant de mieux entendre les histoires singulières des femmes concernées, viendront petit à petit grâce au travail de supervision qui sera mené sans discontinuer dans l’institution à partir de 1986. Au départ plus que dubitative sur l’intérêt de telles séances, Martine Bodénant se fait vite l’ardente avocate d’un savoir acquis « par petites touches, […] au cours d’analyses de situations concrètes ». Un savoir qui la conduira à porter une grande attention aux enfants, et à s’interroger aussi sur la façon de faire exister leurs pères.
Crises familiales et conjugales. Quel accompagnement ?
Martine Bodénant – Ed. érès – 15 €