Dans la lignée du rapport qu’il avait remis au gouvernement, en février 2016, sur la mise en œuvre du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale de janvier 2013(1), le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE) a rédigé une nouvelle contribution à ce suivi portant sur 2016(2), en passant en revue toutes les actions de la feuille de route 2015-2017(3) pour en dresser, comme l’année dernière, un bilan mitigé assorti de toute une série de recommandations.
« Force est de constater que, malgré les efforts déployés, le plan pluriannuel n’a pas créé une dynamique telle que la pauvreté a reculé dans notre pays », note en effet le président de l’instance, Etienne Pinte, en avant-propos de ce document. « Les chiffres sont têtus », poursuit-il, en rappelant que, selon l’INSEE, « 8,8 millions de personnes, soit 14,3 % de la population, vivent sous le seuil de pauvreté à 60 % » du revenu médian(4). Certes, nuance l’ancien député (UMP) des Yvelines, « il est indéniable qu’il y a eu des avancées et ce rapport s’attache à les distinguer mais, globalement, les résultats sont, sur certains points, encore trop timides et, dans tous les cas, ils doivent être confortés ».
C’est le cas, en premier lieu, des politiques relatives au logement et à l’hébergement – abordées après un rappel des six « grands principes » qui structurent l’approche du gouvernement (objectivité, non-stigmatisation, participation, « juste droit », décloisonnement et accompagnement). Parmi les points de vigilance mis en avant par le CNLE, figurent toujours « l’urgence de la mise en place de solutions de substitution à l’hébergement hôtelier », ainsi que la concrétisation du dispositif de garantie universelle des loyers, prévu par la loi « ALUR » du 24 mars 2014 et dont le CNLE ne peut que constater la non-application, demandant « a minima l’élargissement du dispositif Visale aux chômeurs de longue durée » (5). Par ailleurs, pour pérenniser l’appel à projets « 10 000 logements HLM accompagnés » lancé en 2014(6), il propose d’établir une programmation annuelle prévoyant des objectifs quantitatifs et les moyens correspondants dans le budget de l’Etat, à hauteur d’une enveloppe annuelle de 35 millions d’euros.
Sur l’accès aux droits, le CNLE évoque, entre autres, la domiciliation en demandant « à l’Etat de rappeler à ses opérateurs, aux organismes de protection sociale, aux bureaux des étrangers [des] préfectures, aux banques, que le respect du droit à la domiciliation ainsi qu’à l’ouverture et au renouvellement des autres droits avec une attestation de domiciliation à jour doit être effectif sur l’ensemble du territoire national et par conséquent [de] les former à l’application et à l’évolution des dispositions relatives à la domiciliation ».
Concernant l’accès à la santé et aux soins, le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale se soucie notamment du sort des mineurs non accompagnés, en réclamant une nouvelle fois, « avec force », « l’interdiction pure et simple des tests osseux » ainsi que « l’application d’un principe de minorité à l’égard de ceux qui se présentent comme tels et la prévalence de l’intérêt supérieur de l’enfant pour guider toute décision juridique ». Quant à la santé des étrangers en situation irrégulière, elle doit entrer dans le droit commun, estime l’instance qui réaffirme son vœu de voir l’aide médicale de l’Etat intégrée dans la protection maladie de base et complémentaire (comprenant la protection universelle maladie, la couverture maladie universelle complémentaire et l’aide au paiement d’une complémentaire santé).
Dans le dernier chapitre, enfin, relatif à la famille, à l’enfance et à la réussite éducative, et qui balaie un large périmètre, le rapport plaide, en particulier, pour « un effort conséquent et réel pour continuer d’augmenter les places disponibles dans les EAJE [établissements d’accueil du jeune enfant], en direction des quartiers prioritaires ». Il prône, par ailleurs, « un accompagnement jusqu’à 21 ans » des jeunes sortant de l’aide sociale à l’enfance « afin de permettre une réelle autonomisation à cet âge, en particulier au travers des contrats jeunes majeurs », sans oublier « un soutien financier des jeunes jusqu’à 25 ans afin de réduire le nombre de situations de précarisation en fonction de la situation du jeune (en formation, en études…) ».
(2) Contribution au suivi du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale – Mars 2017 – Disp. sur
(4) Le revenu médian est le revenu qui divise la population en deux parties égales : 50 % a un revenu supérieur et 50 % un revenu inférieur.
(5) Sur le dispositif Visale, voir ASH n° 2944 du 22-01-16, p. 8.