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Prévention de la radicalisation : un rapport pointe l’indispensable rôle des collectivités

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Les sénateurs Jean-Marie Bockel (UDI) et Luc Carvounas (PS) ont présenté, le 11 avril, leur rapport d’information sur les collectivités territoriales et la prévention de la radicalisation(1). Fruit de plusieurs mois de travaux, ce volumineux document s’applique à démontrer la nécessité d’une meilleure implication des collectivités territoriales aux côtés des services de l’Etat dans la lutte contre les phénomènes de radicalisation. En 21 préconisations, il dit aussi comment procéder : à travers des « stratégies territoriales de prévention de la radicalisation » et en s’appuyant « sur les acquis de plusieurs décennies de coproduction de la sécurité et de la prévention de la délinquance dans les territoires ». Une coproduction qui s’organise au niveau de la commune ou de l’intercommunalité, en articulation avec le conseil départemental pour ses compétences sociales et l’Etat régalien.

De la prévention « primaire » à la prévention « tertiaire »

Si les collectivités sont, aux yeux des deux sénateurs, légitimes à intervenir dans cette politique aux côtés de l’Etat – qui, notent-ils, les sollicite d’ailleurs de manière croissante depuis 2014 –, c’est d’abord parce qu’elles ont une connaissance du territoire et de la population souvent plus fine que lui. Mais aussi parce qu’elles sont les premières confrontées aux difficultés liées au communautarisme et aux risques de radicalisation. Sans parler des attentats, la pression communautariste « peut s’exercer de manière diffuse ou très organisée : mixité, horaires de certains services publics, tenue vestimentaire, exigences alimentaires mais également tentative de mainmise sur certaines structures », précisent les rapporteurs. Enfin, au-delà de la récolte d’informations, à travers leurs compétences, les collectivités peuvent agir à différents degrés dans la prévention.

En premier lieu, elles doivent contribuer au travail de détection et de signalement des cas de radicalisation et des réseaux. Cela implique que les élus et les agents bénéficient « d’une formation adéquate leur permettant de repérer des signaux mêmes faibles », sans tomber dans leur surinterprétation. Des progrès ont été faits dans ce domaine, mais Luc Carnouvas et Jean-Marie Bockel jugent que « le nombre de personnels formés doit encore progresser et les formations elles-mêmes évoluer vers davantage de précision et de rigueur ». Ils insistent par ailleurs sur la nécessité d’élargir la détection des cas de radicalisation, d’abord focalisée sur les adolescents, aux jeunes enfants via les services de protection maternelle et infantile, aux personnes âgées ou handicapées – à propos desquelles, signalent-ils, un nombre croissant d’abus de faiblesse ou de pressions en lien avec la radicalisation leur a été signalé – ou encore aux personnes chargées d’accueillir des enfants (familles d’accueil, assistantes maternelles…).

Les études recensées par les deux élus sur le processus individuel qui mène à une radicalisation, puis éventuellement à un passage à l’acte violent, montrent qu’il n’existe pas un seul facteur mais une variété d’éléments qui, ensemble, créent un contexte favorable : le milieu familial, le niveau d’éducation, une situation de mal-être social lié à une insertion socio-économique difficile, un éventuel déséquilibre psychique, une pratique délinquante, la proximité avec des groupes religieux radicalisés… Partant de ce constat, les collectivités ont un rôle essentiel à tenir dans la prévention primaire (ou générale), à travers leurs politiques en matière d’éducation, de culture, d’emploi, de loisirs…, et de promotion des valeurs de la République. Lecontrôle des subventions aux associations peut constituer, selon les auteurs, un autre levier d’action pour s’assurer du respect de ces valeurs.

Jean-Marie Bockel et Luc Carvounas jugent que les collectivités peuvent également trouver une place dans les actions de « prévention secondaire » dirigées vers des groupes ou des populations en voie de radicalisation ou qui présentent un risque de radicalisation. Les illustrations sont diverses : stages de rupture à destination de jeunes sous emprise mentale, stages de citoyenneté à l’intention d’individus cherchant encore leur positionnement dans la société, actions menant à une autre approche des questions religieuses… Mais, parmi les éléments à mettre en place impérativement, insistent-ils, figurent surtout le contrôle de la déscolarisation et celui de l’ouverture et du fonctionnement des écoles hors contrat. Enfin, rien n’empêche les collectivités de participer – mais dans un cadre bien défini par l’autorité judiciaire qui en est le maître d’œuvre – à des programmes de « prévention tertiaire » destinés aux personnes déjà radicalisées, en fournissant des locaux, des financements, des opportunités de formation sur le terrain…

Pour une meilleure évaluation

Quoi qu’il en soit, le rapport recommande une évaluation des actions qui ont d’ores et déjà été menées – et qui le seront ultérieurement – par l’Etat et par des collectivités territoriales en termes de prévention et/ou de prise en charge des individus en voie de radicalisation. Objectif : nourrir une réflexion sur les méthodes à adopter et établir un « guide de bonnes pratiques labellisées ». Les auteurs ont, pour leur part, déjà relevé un nombre important d’initiatives communales, intercommunales et départementales qu’ils estiment exemplaires et auxquelles ils consacrent une partie de leur rapport.

Notes

(1) Rapport d’information n° 483, disponible sur www.senat.fr.

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