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La FHF alerte sur les déshabilitations « contraintes » à l’aide sociale en EHPAD

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Réaffirmant « son attachement au principe du service public médico-social », la Fédération hospitalière de France dénonce les pratiques de certains départements qui conduisent à des déshabilitations partielles à l’aide sociale des établissements accueillant des personnes âgées.

Lors de son conseil d’administration du 29 mars, la Fédération hospitalière de France (FHF) a adopté à l’unanimité une motion dans laquelle elle dénonce des pratiques « visant à la déshabilitation partielle à l’aide sociale, la différenciation des tarifs “hébergement” entre les résidents en EHPAD [établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes] au titre de l’aide sociale et à titre payant, le retrait de prestations jusqu’alors incluses dans le tarif “hébergement” pour les résidents à l’aide sociale, à l’image de l’entretien du linge personnel ». L’organisation pointe, dans certains départements, des « tentations de pratiquer des déshabilitations plus ou moins contraintes, à seule fin de régulation budgétaire ».

Helen de Balbine, adjointe au responsable du pôle « autonomie » de la FHF, rappelle que ce mouvement a commencé début 2016 dans le Nord : « Le département a adressé un courrier à tous les établissements en leur proposant d’opter soit pour une baisse des tarifs “hébergement” de 3 %, soit pour une déshabilitation partielle à l’aide sociale. » Sur la soixantaine d’adhérents de la FHF, un tiers a choisi de conserver l’habilitation à 100 %, un autre tiers a accepté une déshabilitation partielle de plus de 50 % et un dernier tiers est allé au contentieux. C’est le cas du groupe hospitalier de Loos-Haubourdin, qui compte un EHPAD de 195 places. Selon sa directrice, Séverine Laboue, le courrier du conseil départemental s’apparente à un « ultimatum » : « Il fallait se décider en huit jours. Ceux qui ont accepté la déshabilitation partielle ont eu l’impression de le faire avec un pistolet sur la tempe. La question elle-même est scandaleuse, car cela revient à mettre en cause l’égalité d’accès au service au sein même du service public. » Elle a introduit un recours contentieux devant le tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale de Nancy, le 9 juin 2016, mais ce n’est que le 14 février dernier qu’elle a reçu le mémoire en défense du département. Entretemps, la perte du budget « hébergement » s’est élevée à 150 000 € sur l’exercice 2016.

Risque de sélection

Cette pression à la déshabilitation prend des formes variables : si, dans le Nord, il s’agit d’une pratique institutionnalisée, d’autres départements le font de manière plus détournée. L’un d’eux « propose aux établissements qui accueillent moins de 50 % de bénéficiaires de l’aide sociale de mettre en place, par voie de convention, une double tarification : un tarif “aide sociale à l’hébergement” et un autre pour les personnes qui ne peuvent pas prétendre à l’aide sociale, explique Helen de Balbine. Ce n’est pas à proprement parler de la déshabilitation, mais les conséquences sont les mêmes, puisque cela conduit à une augmentation des tarifs pour ceux qui ne sont pas à l’aide sociale. » Avant de pointer le risque de « sélection » des usagers, en fonction de leurs revenus : « Cela questionne les principes d’accessibilité et d’uniformité. S’il y a une double tarification, comment garantir qu’on va prendre l’usager qui a l’aide sociale et pas l’autre ? Il faut des garanties », poursuit la représentante de la FHF.

Autre inquiétude : que la négociation entre les établissements et le département dans le cadre des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) soit l’occasion de remettre en cause l’habilitation à 100 %. « Nous nous interrogeons sur le fait que ce qui a été fait de manière ponctuelle jusqu’alors pourrait devenir une pratique de plus en plus courante, précise Helen de Balbine. Les établissements sont dans des situations où l’on va les pousser à trouver des marges de manœuvre financière, notamment par ce biais. »

La FEHAP (Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés non lucratifs) a également mis ses adhérents en garde contre ces pratiques, qu’elles émanent du Nord ou des Pyrénées-Atlantiques, du Gard ou de l’Essonne, pour ne citer qu’eux. « Nous avons été relativement fermes sur ce sujet et avons invité nos établissements à ne pas tendre vers la déshabilitation, dans le respect des valeurs d’accessibilité et d’intérêt collectif portées par le secteur privé non lucratif », témoigne Julien Moreau, directeur du secteur social et médico-social à la FEHAP. S’y ajoutent des arguments plus techniques, notamment l’impact d’une déshabilitation sur le plan de la fiscalité et sur l’accès à certaines subventions publiques.

Pour autant, la FEHAP déconseille la voie contentieuse : « Nous recommandons à nos adhérents d’être dans la coconstruction de réponses, poursuit Julien Moreau. Dans le Nord, aucun n’a fait le choix de la déshabilitation, mais chacun a négocié de façon individualisée avec le département. Aux établissements pour qui le maintien de l’habilitation à 100 % devient complexe, nous proposons d’engager une démarche de conventionnement à l’aide sociale, d’un an, renouvelable tacitement pendant cinq ans. » Dans ce cadre, différents tarifs sont fixés, selon que l’usager peut ou non prétendre à l’aide sociale.

Plus tranchée, la FHF, en réaffirmant « son attachement au principe du service public médico-social », rappelle son opposition à ces « pratiques conduisant à un recul contraint et subi des places accessibles aux personnes relevant de l’aide sociale et à un traitement inéquitable sur le territoire ». Et « les conséquences statutaires, juridiques et fiscales induites par ces mouvements de déshabilitation n’étant pas à ce jour toutes mesurées », elle demande au ministère des Affaires sociales et de la Santé et à la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie) de réaliser une analyse des conséquences de ces politiques et de mettre en place un observatoire sur l’accès des établissements. Elle a par ailleurs lancé une enquête nationale afin d’objectiver l’ampleur de ce phénomène.

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