« Faire société » : c’est autour de ce projet en forme de slogan que la Fédération des APAJH (associations pour adultes et jeunes handicapés) interpelle les candidats aux élections présidentielle et législatives d’avril et mai prochains. Le 14 mars, l’organisation, par la voix de son président, Jean-Louis Garcia, a lancé son « pacte handicap » pour la période 2017-2022. Elle y décline dix actes sur lesquels elle demande aux candidats de s’engager. Ce document s’appuie en partie sur la « charte pour l’accessibilité universelle » que la fédération a adoptée en juin 2014(1). « Nous avons décliné tout ce qui nous semble important et y avons ajouté deux axes en cours d’élaboration, le premier et le dernier », a expliqué Jean-Louis Garcia.
Le premier concerne le respect de la laïcité, « principe fondateur [qui] garantit à chacun dans ses différences de prendre sa place dans la communauté nationale » et qui « suppose le respect des règles définies par le cadre républicain », détaille le pacte. L’autre ajout, l’acte no 10, prône le respect de la protection sociale. « Certains propos entendus dans la campagne véhiculent une vision dangereuse pour les plus vulnérables, notamment pour les personnes en situation de handicap », a expliqué Jean-Louis Garcia, rappelant que « depuis 1947, la Sécu permet à chacun de se soigner, qu’il soit riche ou pas. Il ne faut pas raboter cela ».
L’APAJH demande aux candidats de s’engager à lancer une réflexion pour créer un revenu universel d’existence pour tous, indépendant des questions d’emploi, une proposition que la fédération portait déjà en 2012. « Mais cette fois-ci, ce sujet s’est invité dans la campagne », a glissé Jean-Louis Garcia. L’APAJH ne se situe cependant pas dans la même approche que celle de Benoît Hamon. Rappelant qu’il n’y a « pas de vie décente sans ressources décentes », elle signale que le montant de l’AAH (allocation aux adultes handicapés), actuellement de 808 € par mois, reste inférieur au seuil de pauvreté, la fédération prenant comme référence le seuil de 840 €, c’est-à-dire équivalent à 50 % du revenu médian, sachant que depuis 2008 l’INSEE retient un seuil de 60 % du revenu médian, soit 1 008 € par mois en 2016. « Pourquoi un revenu universel d’existence ? Parce qu’il y aura toujours des personnes en situation de handicap qui ne travailleront jamais, soit parce qu’elles ont des handicaps très lourds, soit parce qu’elles sont en situation de très grande vulnérabilité psychique,a détaillé Jean-Louis Garcia. Ce revenu universel d’existence ne serait donc pas lié à la question du rapport au travail, nous préférons parler de “dignité par les ressources”. »
Le pacte reprend également des revendications de l’APAJH en matière d’accès au logement, au droit de vote, à l’emploi et à la formation, aux soins… Dans le domaine de l’emploi, Jean-Louis Garcia rappelle que la loi « El Khomri », dans le collimateur de plusieurs candidats à la présidentielle, « comporte un certain nombre de mesures utiles pour les personnes en situation de handicap, qu’il faudra conserver ». L’association réitère ses constats sur l’accès aux soins ordinaires, les obstacles dans ce domaine étant encore nombreux. Par exemple, les personnes qui ne peuvent pas communiquer normalement ne peuvent pas expliquer, lorsqu’elles se rendent à l’hôpital, où elles ont mal, tandis qu’une femme en fauteuil roulant ne peut pas aujourd’hui faire une mammographie.
D’autres revendications portent sur une plus grande mixité des publics dans le sport, la culture, les loisirs et les médias. Ou sur le droit de choisir sa vie intime et sexuelle, l’APAJH jugeant indispensable de « lever [ce] tabou » en favorisant l’écoute des attentes des personnes en situation de handicap et l’exercice de leur libre choix de vie : « Avec les accompagnements nécessaires, le droit de la personne en situation de handicap d’avoir une sexualité épanouie doit être satisfait. »
Toujours dans une logique d’accessibilité universelle, l’APAJH a conçu un site accessible à tous les types de handicaps (