En application de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine(1), un décret fixe les modalités de désignation des établissements et des personnes morales habilités à concevoir, réaliser ou communiquer des documents adaptés aux personnes handicapées, conformément à l’exception « handicap » au droit d’auteur. Pour rappel, cette exception consiste dans l’autorisation de reproduire librement, sans contrepartie financière, des œuvres imprimées sur des supports adaptés aux publics empêchés, du fait de leur handicap, de lire ou de comprendre une œuvre compte tenu de sa forme. Selon un récent rapport d’inspections(2), les organismes concernés sont majoritairement de statut associatif et se répartissent entre établissements et services médico-sociaux pour les enfants souffrant de déficiences visuelles (37 %), associations à vocation nationale ou de proximité, universités et bibliothèques.
Le décret précise aussi les conditions dans lesquelles la Bibliothèque nationale de France (BNF) organise son activité d’organisme dépositaire d’œuvres. Depuis l’entrée en vigueur de la loi, le dépôt des fichiers numériques auprès d’elle est en effet obligatoire pour les éditeurs de livres scolaires et, pour les autres œuvres, sur demande des personnes morales ou des établissements figurant sur la liste des organismes habilités.
Les ministres chargés de la culture et des personnes handicapées doivent fixer, par arrêté, la liste des personnes morales et des établissements habilités à concevoir, réaliser ou communiquer des documents adaptés en vue de leur consultation par des personnes atteintes d’un handicap. Cette liste distingue :
→ les organismes qui peuvent assurer la reproduction et la représentation d’une œuvre sans contrepartie financière ;
→ parmi les organismes visés ci-dessus, ceux qui sont agréés en vue de demander la mise à disposition des fichiers numériques déposés par les éditeurs auprès de la Bibliothèque nationale de France ;
→ parmi les organismes agréés, ceux qui sont autorisés à recevoir et à mettre des documents adaptés à la disposition d’un organisme établi dans un autre Etat, en vue de leur consultation par des personnes atteintes d’une déficience qui les empêche de lire.
Les organismes sont inscrits sur la liste pendant cinq ans.
Les deux ministres peuvent décider du retrait de l’autorisation, du retrait de l’agrément ou de la radiation de la liste, à la demande de l’organisme concerné ou lorsque celui-ci ne remplit plus les conditions à cette fin.
Une commission chargée de l’exception « handicap », placée auprès des ministres, doit, entre autres, instruire et émettre un avis sur les demandes déposées par les organismes en vue d’une inscription sur la liste, de la délivrance de l’agrément et de l’autorisation, ainsi que sur leurs retraits et les radiations de la liste.
Les habilitations des organismes délivrées avant le 1er mars 2017 – date d’entrée en vigueur du décret – restent valables jusqu’à leur terme et, au plus tard, jusqu’au 1er mars 2019.
Pour être inscrit sur la liste, la personne morale ou l’établissement doit, à l’appui de sa demande adressée à la commission par lettre recommandée avec demande d’avis de réception :
→ donner toute information relative, notamment, à son organisation, son fonctionnement et ses comptes financiers ;
→ indiquer le nombre et la qualité de ses adhérents ou de ses usagers, préciser parmi eux ceux qui sont atteints d’une ou plusieurs déficiences des fonctions motrices, physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques et empêchées, du fait de ces déficiences, d’accéder à l’œuvre dans la forme sous laquelle l’auteur la rend disponible au public ;
→ justifier de son activité de conception, de réalisation ou de communication de documents adaptés au bénéfice de ces personnes ;
→ préciser les moyens utilisés pour contrôler l’usage des œuvres (consultation strictement personnelle de l’œuvre par les personnes physiques atteintes d’une déficience qui les empêche de lire).
Pour être agréé, l’organisme doit notamment donner, en sus des informations demandées au titre de l’inscription sur la liste, des renseignements sur les conditions de conservation et de sécurisation des fichiers numériques transmis par la Bibliothèque nationale de France ainsi que sur les modalités d’adaptation de ces fichiers aux besoins de lecture des personnes intéressées.
Pour être autorisé, l’organisme doit indiquer, outre les informations demandées au titre de l’inscription sur la liste et au titre de l’agrément, le contenu envisagé des conventions signées entre lui et d’autres organismes en vue de préciser les conditions de mise à disposition des documents adaptés et les mesures prises par l’organisme destinataire de ces documents. Il doit aussi faire part des mesures prises par ce dernier pour garantir une consultation exclusive des documents adaptés par les personnes atteintes d’un handicap.
Le silence gardé par l’administration pendant plus de six mois sur une demande vaut acceptation de la demande.
L’éditeur doit transmettre à la Bibliothèque nationale de France le fichier numérique d’une œuvre dans un délai de 45 jours suivant la demande qui lui en est faite par celle-ci. Les personnes morales et les établissements inscrits sur la liste doivent, quant à eux, transmettre à la BNF les fichiers numériques des documents adaptés qu’ils ont réalisés, dès lors qu’ils les mettent à la disposition des personnes handicapées.
Le décret précise aussi les caractéristiques des livres scolaires soumis à l’obligation de dépôt. Sont concernés : les manuels et leur mode d’emploi, ainsi que les cahiers d’exercices et de travaux pratiques qui les complètent ou les ensembles de fiches qui s’y substituent, régulièrement utilisés dans le cadre de l’enseignement primaire, secondaire et préparatoire aux grandes écoles ainsi que les formations au brevet de technicien supérieur, et conçus pour répondre à un programme préalablement défini ou agréé par les ministres intéressés.
(2) « Les structures ayant une activité d’adaptation des œuvres au bénéfice des personnes en situation de handicap » – IGAS-IGAC-IGAENR – Décembre 2016 – Disp. sur