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Caroline Bloy-Denel

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Lorsqu’ils parlent d’elle, les enfants malentendants de l’établissement lui attribuent le nom-signé « Celle qui regarde dans les yeux »(1). Certains de ses collègues, eux, lui trouvent un air de la Joconde. C’est dire si Caroline Bloy-Denel, la directrice du centre Augustin-Grosselin (institut d’éducation sensorielle qui accueille à Paris 65 jeunes de 3 à 20 ans déficients auditifs avec ou sans handicaps associés) de la Fondation Léopold-Bellan, a un regard particulier, à la fois direct et mystérieux. Cette quadragénaire – dont les livres de chevet, sur le management associatif, sont signés Jean-Louis Laville, Henry Mintzberg et Karl Palanyi – est devenue directrice d’établissement il y a seulement trois ans et demi. Pour autant, cette juriste en droit du travail de formation n’était pas étrangère au secteur social et médico-social : elle a travaillé pendant dix ans au sein du Snasea, jusqu’à sa fusion avec le SOP pour former le Syneas(2). Elle y a exercé en tant que conseil juridique auprès des adhérents, puis responsable du pôle « formation professionnelle », et enfin responsable de la vie régionale. Un poste qui l’a fait voyager à travers la France et l’a « confrontée aux structures de l’intérieur », explique-t-elle. « C’est à ce moment-là que j’ai attrapé le virus ! »

L’envie d’évoluer

Plusieurs rencontres l’ont marquée : le directeur d’une Sauvegarde de l’enfance à Metz, « à la fois humain et ferme, qui m’a donné envie de diriger des équipes », ou encore le directeur général de l’hygiène sociale de Franche-Comté, « qui a su faire face à des difficultés importantes ». Ils sont devenus des exemples à suivre.

L’ancien directeur général du Snasea qui l’avait recrutée, Didier Tronche, a fortement encouragé son ex-collaboratrice dans cette voie : « Caroline Bloy-Denel a des qualités relationnelles remarquables, une autorité naturelle et sait prendre de la distance pour apprécier les choses. Lors des visites dans les établissements, elle avait également un bon contact et une empathie avec les usagers. Quand elle a eu envie d’évoluer professionnellement, je lui ai suggéré de postuler à l’Executive Master “dirigeant associatif” de Sciences Po. » Un master II que la jeune femme entame en 2013 et au cours duquel elle s’intéresse de près à la vie de Léopold Bellan, homme politique en situation de handicap dont la fondation développa dès 1884 des activités culturelles pour les plus défavorisés.

Un regard neuf sur la surdité

Elle postule au centre Augustin-Grosselin après le départ à la retraite de sa directrice. Une première expérience qui relève du défi pour cette mère de famille qui ne maîtrisait pas la langue des signes (LSF). « Finalement, cela a été un atout de ne pas être initialement concernée par la surdité : c’est un monde clivé entre ceux qui souhaitent la LSF et ceux qui préfèrent l’oralisation. Ma neutralité a permis d’apaiser certaines tensions. » D’abord dubitatives, ses équipes – 42 salariés dont des éducateurs spécialisés, des AMP, mais aussi des orthophonistes et des professeurs Capejs(3) – l’ont finalement bien accueillie, appréciant son « regard neuf sur les choses » et sa motivation à suivre les cours de LSF dispensés en interne. Chez cette femme qu’ils qualifient de « tonique », les cadres de l’établissement apprécient le fait qu’elle leur accorde sa confiance. Elle-même désigne son management comme participatif : « Les professionnels détiennent des ressources qui ne demandent qu’à être valorisées. J’ai mis en place de nombreux espaces de discussion interprofessionnels, avec pour objectif de faire émerger des projets pour améliorer la prise en charge dans le centre. »

La « prospective » est en effet le maître-mot de Caroline Bloy-Denel. Parmi les propositions qui devraient voir le jour, la création d’un self-service qui servirait également de lieu de formation pour les jeunes. « Elle a beaucoup d’enthousiasme et rien ne lui fait peur, affirme l’un de ses collaborateurs. Elle va vite et monte des projets qui parfois nous bousculent. Mais ça tombe bien, car le monde des sourds bouge aussi très vite. »

Notes

(1) Les personnes sourdes attribuent des « noms-signés » qui révèlent d’un individu une particularité physique ou de sa personnalité.

(2) Devenu Nexem depuis sa fusion avec la Fegapei – Voir ASH n° 2989 du 23-12-16, p. 16.

(3) Certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement des jeunes sourds.

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