Fruit de plus de un an de travail, la première norme relative au métier de médiateur social a été rendue publique le 13 décembre dernier au cours d’un après-midi de présentation organisée dans les locaux du Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET). Il s’agit d’une « étape importante dans la reconnaissance du métier de médiateur social », a déclaré à cette occasion la secrétaire générale du CGET, Muriel Domenach. Hasard du calendrier, quelques jours plus tard, un pas de plus a été fait vers cette reconnaissance avec l’adoption définitive par le Parlement de la loi « égalité et citoyenneté », qui inscrit la profession de médiateur social dans le code de l’action sociale et des familles(1).
La démarche a vu le jour en juin 2015 au sein d’une commission « médiation sociale » animée par l’Afnor (Association française de normalisation), qui a réuni tous les deux mois, sous la présidence du CGET et du secrétariat général du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR), les différents acteurs concernés : réseaux de médiation sociale(2), collectivités territoriales, bailleurs sociaux, acteurs de la formation et de la santé… Un an et demi après, elle a abouti à la publication par l’Afnor de la norme XP X60-600 intitulée « Cadre du métier de médiation sociale – Qualité des activités de médiation sociale – Lignes directrices »(3).
Cette norme répond à « un besoin de clarification de la définition du métier de médiateur social, de ses conditions d’exercice et de son articulation avec les autres métiers du travail social », expliquent le CGET, le CIPDR et l’AFNOR dans un communiqué commun du 6 décembre annonçant son prochain lancement. Elle vise à promouvoir la culture de la médiation sociale auprès de l’ensemble des parties prenantes, et à faciliter la reconnaissance du métier de médiateur social et sa professionnalisation. En effet, explique l’AFNOR sur son site Internet, « en quelques années, les fonctions liées à la médiation sociale se sont développées et [se sont étendues] à des secteurs comme le travail, la santé, les transports ou encore l’éducation. La médiation sociale compte aujourd’hui environ 12 000 emplois dont 4 000 postes d’adultes-relais. Mais malgré ce développement florissant, poursuit-elle, les médiateurs sociaux souffrent d’un manque de reconnaissance professionnelle. Même si la médiation sociale a fait l’objet de réflexions, notamment sur sa définition, il n’y avait jusqu’à présent aucun document de référence pour encadrer ce métier et délivrer des lignes directrices communes. »
La norme est destinée à toutes les structures de médiation sociale, aux partenaires financiers, aux commanditaires et aux prescripteurs d’action de médiation sociale (Etat, collectivités territoriales, bailleurs sociaux…). Elle ne couvre pas les médiations institutionnelles (pénale et familiale) ni les médiations conventionnelles exercées dans les domaines notamment de la consommation et des conflits du travail, précise le texte.
Il s’agit d’une norme expérimentale. Les acteurs socio-économiques concernés vont en évaluer la pertinence et l’applicabilité pendant trois ans. A l’issue de cette période, la commission de normalisation décidera soit de la réviser, soit de la prolonger, soit de la supprimer. Cette norme est, en outre, d’application volontaire. Les dispositifs de médiation sociale peuvent donc choisir ou non de s’y référer. Mais, « référencée dans un contrat, elle s’impose aux parties », indique le texte.
La norme pose des exigences sur le cadre du métier de médiateur social, sur sa mise en œuvre et son organisation, ainsi que sur le suivi de ses activités. « Il ne s’agit pas de rigidifier des pratiques qui ont fait la preuve de leur pertinence et dont l’intérêt réside le plus souvent dans leur inventivité, leur faculté d’adaptation et leur non assujettissement à des normes institutionnelles », est-il écrit en introduction du document, mais d’offrir « une série de points de repère aux intervenants pour guider leurs pratiques, à leurs employeurs, ainsi qu’aux pouvoirs publics ».
Le texte fournit notamment un cadre déontologique qui fixe un certain nombre de principes afin de garantir, d’une part, le processus de médiation sociale (libre consentement des différentes parties, indépendance du médiateur social, discrétion et confidentialité…) et, d’autre part, la posture de médiateur social (position de tiers, responsabilisation et autonomie des personnes en médiation sociale…). En ce qui concerne les modalités d’intervention de la médiation sociale, la norme décrit plusieurs lignes d’action – assurer une présence active de proximité, prévenir et gérer les situations conflictuelles, lever les incompréhensions entre les personnes et les institutions, faciliter la concertation entre les habitants et les institutions… – qui s’organisent autour des deux principes fondateurs de l’activité, à savoir : « aller vers l’usager » et « faire avec » les personnes et non à leur place. En matière d’organisation, la norme aborde notamment les questions de la contractualisation avec les commanditaires, l’organisation de la structure de médiation sociale ainsi que le suivi de l’activité et l’évaluation de son utilité sociale. Enfin, en annexe, elle clarifie le processus de la médiation.
Cette norme va servir de base à la création d’une nouvelle certification, en cours de préparation. Les organismes de médiation sociale qui le souhaitent pourront ainsi bientôt s’engager dans une démarche de certification qui permettra de garantir la conformité de leurs prestations aux exigences fixées par la norme et constituera un gage de professionnalisme. Ils devront pour cela solliciter un audit de l’AFNOR, avait indiqué la secrétaire d’Etat à la ville en clôturant, en octobre dernier, la « journée nationale d’échange des acteurs de proximité intervenant dans les quartiers populaires pour les jeunes »(4). « L’Etat appuiera les structures qui le demandent afin qu’elles puissent bénéficier de cette norme, et ce, dès 2017 », avait ajouté Hélène Geoffroy, précisant que cet appui serait également financier : « L’Etat, à travers le Commissariat général à l’égalité des territoires, prendra sa part dans les coûts générés », avait-elle ainsi assuré.
(2) Dont France médiation et la Fédération des associations de médiation sociale et culturelle d’Ile-de-France.
(3) La norme peut être achetée au prix de 48,55 € hors taxe sur