Sollicitée par le gouvernement dès 2014, et encore plus après les attentats qui ont touché la France à partir de janvier 2015, la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) a formé près de 20 000 personnes à la lutte contre la radicalisation, en lien avec le secrétariat général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (SG-CIPDR), indique son dernier rapport d’activité, récemment rendu public(1).
« Dans le cadre de ces formations très complètes à destination tant des fonctionnaires nationaux et territoriaux que des travailleurs sociaux, des associations de prévention ou familiales, des éducateurs et en général des publics confrontés à cette problématique, la Miviludes présente le processus de radicalisation (les facteurs et les mécanismes à l’œuvre) dont la compréhension est nécessaire au développement d’une politique de prévention », explique son président, Serge Blisko, en avant-propos. Il ajoute que la mission « participe depuis 2015 à de nombreuses formations décentralisées en région ou en département et aussi à des formations spécifiques destinées à des administrations particulières (Ecole nationale de la magistrature, protection judiciaire de la jeunesse, rectorats…) ».
Ce sont ainsi 74 formations qui ont été délivrées en 2015 et 55 sur le premier semestre 2016, à Paris et en région, auprès d’agents publics, d’associations et de professionnels « susceptibles d’intervenir dans la prévention ou la prise en charge des personnes en voie de radicalisation », précise le rapport, soit, donc, près de 20 000 personnes touchées. S’y ajoutent 35 sessions de sensibilisation et de formation aux risques de dérives sectaires menées en 2015 et 28 début 2016, « à destination des magistrats, des officiers de police et de gendarmerie et des enquêteurs, des référents de la protection judiciaire de la jeunesse et de l’Education nationale ». Pour répondre à une demande croissante, la Miviludes a aussi collaboré à la réalisation de « supports de formation facilement utilisables et de qualité professionnelle », là aussi en partenariat avec le SG-CIPDR. Et, pour se rapprocher du monde universitaire, elle a signé une convention de recherche avec l’université Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines.
Une démarche qui nécessite d’ailleurs « un relèvement des crédits de fonctionnement en 2017 », alerte la Miviludes, en indiquant que le travail supplémentaire, « particulièrement lourd », lié à la prévention de la radicalisation « s’est fait à effectif constant », tandis que son budget de fonctionnement chutait « pour la cinquième année consécutive », passant de 130 000 € en 2011 à 80 000 € en 2016. Cette baisse mécanique de sa dotation est liée à la sous-consommation des crédits alloués à ses tâches habituelles du fait, justement, de son implication dans la lutte contre la radicalisation. Une situation qui « ne pourra perdurer, car la Miviludes a atteint les limites où elle ne peut plus à la fois répondre aux sollicitations liées à son expertise sur la radicalisation violente et remplir ses missions premières d’observation, de lutte et d’information sur les dérives sectaires ». D’autant que la finalité première de la mission – détecter, analyser, mettre au jour les dérives sectaires – « a continué et s’est même amplifiée tant la fragmentation des liens sociaux et familiaux, la remise en question de nombreux secteurs de la vie sociale (médecine, éducation, formation) parfois légitime, ouvrent malheureusement une porte d’entrée à des nombreux charlatans, marchands d’illusions et véritables prédateurs qui s’attaquent aux plus vulnérables de nos concitoyens », souligne Serge Blisko.
Certes, le nombre des demandes enregistrées par le secrétariat de la Miviludes a légèrement baissé en 2015 (2 160 contre 2 337 en 2014), mais pour mieux remonter en 2016 (2 500 prévues). Le principal secteur de préoccupation demeure la santé (39 % des sollicitations). Puis viennent les demandes concernant le champ du travail et de la formation professionnelle (21 %), et celles adressées au pôle « sécurité » de la mission (21 %), motivées par des enjeux immédiats de sécurité des personnes, l’urgence d’une intervention ou l’intérêt potentiel qu’il peut y avoir à partager des informations avec les services locaux de sécurité et les services d’enquêtes spécialisés.
(1) Rapport annuel 2015 – Disp.