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L’expérimentation « territoires zéro chômage de longue durée »

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Les 10 territoires retenus pour mener l’expérimentation viennent d’être rendus publics. L’occasion de faire le point sur ce dispositif dont l’objectif est de favoriser l’embauche en CDI de chômeurs de longue durée dans des entreprises de l’économie sociale et solidaire soutenues financièrement par l’Etat et les collectivités et positionnées sur des activités non concurrentielles.

Inspirée par une initiative de l’association ATD quart monde(1) et portée par le député (PS) Laurent Grandguillaume, la loi du 29 février 2016 relative à l’expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée – mieux connue sous l’appellation « territoires zéro chômage de longue durée » – prévoit de tester pendant 5 ans, dans 10 territoires volontaires, l’embauche de demandeurs d’emploi de longue durée en contrat à durée indéterminée (CDI) par des entreprises de l’économie sociale et solidaire (ESS) conventionnées, pour exercer des activités complémentaires à celles qui sont déjà présentes sur le territoire et répondant à des besoins non satisfaits. Les personnes ainsi recrutées bénéficient d’un accompagnement et, le cas échéant, d’actions de formation correspondant à leur projet professionnel.

La mise en œuvre du dispositif a été précisée par un décret du 27 juillet 2016 et les 10 territoires sélectionnés pour mener l’expérimentation ont été rendus publics le 21 novembre dernier par la ministre du Travail et de l’Emploi. Tout est donc quasiment prêt pour que l’expérimentation puisse commencer. Ne manquent plus que les conventions que doivent signer les entreprises recruteuses, dénommées « entreprises à but d’emploi » par le « manuel d’expérimentation » élaboré par ATD quart monde, Emmaüs France, la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (FNARS), le Pacte civique et le Secours catholique, qui ont porté le projet(2). Les premières signatures sont attendues avant la fin de l’année(3).

L’expérimentation est mise en place avec le concours financier de l’Etat et celui – volontaire – des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et d’organismes publics et privés « susceptibles de tirer un bénéfice financier de ces embauches, avec pour objectif que ce bénéfice soit supérieur au coût du dispositif », énonce l’article 1er de la loi. Les dotations des différents participants sont versées à un fonds dédié – le Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée –, chargé notamment de verser une contribution aux entreprises employeurs. Le mode de financement prévu est ainsi quelque peu différent de celui imaginé à l’origine par les parlementaires. La philosophie de la proposition de loi initiale reposait en effet sur la réallocation, « à budgets constants », des dépenses directes et indirectes liées au chômage dont auraient bénéficié les personnes recrutées et qui seraient devenues mécaniquement « sans objet », ces dernières ayant retrouvé un emploi. L’argent jusqu’alors alloué par les différents acteurs pour accompagner les demandeurs d’emploi, au travers notamment des allocations servies aux chômeurs – revenu de solidarité active, aide au retour à l’emploi, allocation de solidarité spécifique… –, des aides au logement via le Fonds de solidarité pour le logement, des contrats aidés ou encore des formations, devait ainsi servir à financer une partie des salaires de ces personnes. Mais « calculer de façon théorique les économies réalisées par le retour à l’emploi, secteur par secteur, pour les réaffecter ensuite aux entreprises conventionnées, aurait été trop compliqué dans une période où chacun s’arqueboute sur ses budgets », a expliqué Laurent Grandguillaume aux ASH(4). « On estime que la réallocation des coûts liés au chômage et à la privation d’emploi devrait permettre de couvrir environ 70 % du coût d’un poste à temps plein payé au SMIC », indique le « manuel d’expérimentation ». Vérifier la validité de ce calcul sera tout l’enjeu de l’expérimentation… Et le mécanisme de la réaffectation des coûts et manques à gagner dûs à la privation d’emploi ne pourra donc être mis en œuvre que dans un second temps, si l’expérimentation se révèle concluante, ce qui permettra d’envisager sa généralisation via une seconde loi.

I. les Territoires et les entreprises participants

A. Les territoires

L’article 1er de la loi du 29 février 2016 prévoit que l’expérimentation est menée sur, au plus, 10 territoires couvrant chacun tout ou partie de la superficie d’une ou plusieurs collectivités territoriales, EPCI ou groupes de collectivités territoriales volontaires. Cette expérimentation « est, pour les collectivités concernées, complémentaire des politiques publiques en faveur du développement économique et de la lutte contre le chômage », précise la loi. « Autrement dit, l’expérimentation ne remettra pas en cause les dispositifs existants », et notamment les structures d’insertion par l’activité économique, assure Anne Emery-Dumas, rapporteure (PS) de la loi au Sénat : « Il ne s’agit pas d’ajouter une nouvelle strate aux millefeuilles de la politique de l’emploi, mais de tester un nouvel outil, qui pourra, il est vrai, entraîner à terme une révision profonde des dispositifs actuels s’il se révèle efficace » (Rap. Sén. n° 266, Emery-Dumas, décembre 2015, page 25).

La liste des territoires autorisés à mettre en œuvre l’expérimentation, fixée, après appel à projets(5), sur proposition du fonds dédié à l’expérimentation (voir page 61), a été rendue publique le 21 novembre 2016 par le ministère du Travail et de l’Emploi. Elle doit encore être entérinée par arrêté ministériel (loi du 29 février 2016, art. 3). Les 10 territoires concernés, qui sont aussi bien urbains que ruraux, sont :

→ Colombelles (Calvados) ;

→ Colombey-les-Belles (Meurthe-et-Moselle) ;

→ Jouques (Bouches-du-Rhône) ;

→ Mauléon (Deux-Sèvres) ;

→ la métropole de Lille (Nord) ;

→ la communauté de communes Nièvre et Forêts (Nièvre) ;

→ le XIIIe arrondissement de Paris ;

→ Pipriac (Ille-et-Vilaine) ;

→ Thiers (Puy-de-Dôme) ; le quartier Saint-Jean à Villeurbanne (Rhône).

B. Les entreprises et les types d’activité

1. Les conditions à remplir pour les entreprises

A Faire partie du champ de l’ESS

Les entreprises qui peuvent embaucher dans le cadre de l’expérimentation sont les entreprises qui remplissent les conditions pour faire partie du champ de l’ESS, telles qu’elles ont été définies par la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire (but social autre que le seul partage des bénéfices, lucrativité encadrée, gouvernance démocratique et participative…) (loi du 29 février 2016, art. 1er). Pour mémoire, les coopératives, les mutuelles, les fondations et les associations appartiennent de plein droit, du fait de leur nature juridique, au champ de l’ESS. En revanche, à l’instar des entreprises d’insertion, les sociétés commerciales qui souhaitent se prévaloir de cette appartenance doivent remplir les critères définis par la loi du 31 juillet 2014(6).

Dans le « manuel d’expérimentation », ces entreprises sont dénommées « entreprises à but d’emploi ». Elles sont soit déjà existantes, soit à créer « une fois les ressources humaines et les emplois attendus identifiés sur le territoire », explique le « manuel d’expérimentation ».

B Conclure une convention

Les entreprises doivent être conventionnéespar le Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée créé par la loi (voir page 61). La convention est conclue pour la durée de l’expérimentation, c’est-à-dire 5 ans (loi du 29 février 2016, art. 4 et décret du 27 juillet 2016, art. 18).

Chaque convention doit préciser la part de la rémunération des salariés embauchés prise en charge par le fonds, compte tenu de la durée de travail prévue dans leur contrat de travail et des conditions de son éventuelle dégressivité en fonction de l’évolution de la situation économique de l’entreprise. Elle doit aussi prévoir la fraction de l’indemnité de licenciement prise en charge par le fonds et due si l’expérimentation n’est pas reconduite au bout de 5 ans ou si elle est interrompue avant ce terme (voir page 60). La convention fixe également les conditions à respecter pour bénéficier du financement du fonds, notamment les engagements de l’entreprise sur le contenu du poste proposé, les conditions d’accompagnement et les actions de formation envisagées pour le bénéficiaire du contrat (loi du 29 février 2016, art. 4).

Plus précisément, la convention doit comporter, notamment (décret du 27 juillet 2016, art. 10 et 17) :

→ l’identification de l’entreprise et ses caractéristiques générales ;

→ les éléments attestant de son appartenance au champ de l’économie sociale et solidaire ;

→ le nombre et le contenu des emplois proposés ;

→ le calendrier prévisionnel annuel des embauches ;

→ l’organisation du travail au sein de l’entreprise ;

→ les taux de la contribution au développement de l’emploi appliqués aux embauches effectuées, c’est-à-dire les taux de l’aide versée à l’employeur pour chaque embauche (voir page 60) ;

→ le nombre maximal de salariés exprimé en équivalents temps plein couverts par la contribution ;

→ les modalités de régularisation sur l’année des montants versés par rapport aux montants effectivement dus, calculés sur la base des justificatifs produits par l’employeur ;

→ le cas échéant, les conditions et les modalités de la dégressivité de la subvention annuelle ;

→ les modalités de prise en charge de la fraction de l’indemnité de licenciement si l’expérimentation n’est pas reconduite au bout de 5 ans ou si elle est interrompue avant ce terme (voir page 60) ;

→ le cas échéant, les actions de formation professionnelle ou de validation des acquis de l’expérience nécessaires à la réalisation du projet professionnel des personnes embauchées ;

→ les modalités d’accompagnement, en lien avec Pôle emploi, des personnes embauchées ;

→ les informations à communiquer au fonds, pour réaliser le suivi et le bilan de l’expérimentation, et au comité scientifique chargé de son évaluation (voir page 64) ;

→ les modalités de suivi, de contrôle et d’évaluation de la convention.

Un avenant à la convention assorti d’une annexe financière fixe, pour chaque année civile ou si nécessaire pour chaque semestre, les engagements de l’employeur et le montant de la subvention à verser par le fonds pour l’année considérée, compte tenu du bilan établi par l’employeur pour l’année précédente (décret du 27 juillet 2016, art. 18).

2. Les activités concernées

Les entreprises autorisées à participer à l’expérimentation peuvent embaucher des chômeurs de longue durée uniquement pour des activités économiques pérennes et non concurrentes de celles qui sont déjà présentes sur le territoire (loi du 29 février 2016, art. 1er).

En clair, il s’agit d’activités qui répondent à des besoins non satisfaits sur le territoire « car peu rentables » et jugées « utiles » par les acteurs locaux (habitants, entreprises, institutions), explique le « manuel d’expérimentation ». Elles sont identifiées par les entreprises conventionnées et le comité de pilotage local de l’expérimentation (voir page 63), avec les demandeurs d’emploi eux-mêmes et en collaboration avec l’ensemble des acteurs locaux, « à partir des compétences des personnes privées d’emploi du territoire » et de leurs aspirations. Exemplesd’activités fournis par le manuel :

→ recyclage-réemploi : collecte en porte-à-porte de déchets là où les services n’interviennent pas, formation à l’autoréparation, mise en place d’une ressourcerie… ;

→ animation sports-loisirs-culture : bibliothèque itinérante, aide à l’organisation de fêtes et d’événements locaux, animations touristiques, jardin partagé… ;

→ services aux collectivités, entreprises et associations : renfort d’encadrement dans les cantines, conciergerie d’entreprise, livraisons… ;

→ services à la personne : aide aux devoirs, accompagnement aux courses, aide au jardinage, soutien aux personnes âgées, isolées ou handicapées… ;

→ agriculture : conduite d’engins agricoles, maraîchage, développement de circuits courts de commercialisation de fruits et légumes…

II. Le public éligible et les conditions d’emploi

A. Les demandeurs d’emploi concernés

Peuvent être embauchés dans le cadre de l’expérimentation les demandeurs d’emploi qui sont (loi du 29 février 2016, art. 2) :

→ inscrits à Pôle emploi, quel que soit le motif pour lequel leur éventuel précédent contrat de travail a pris fin ;

→ privés d’emploi depuis plus de 1 an malgré l’accomplissement d’actes positifs de recherche d’emploi ;

→ domiciliés depuis au moins 6 mois dans l’un des territoires participant à l’expérimentation.

D’après le « manuel d’expérimentation », 100 à 200 personnes devraient être concernées dans chaque territoire, soit au total près de 2 000 personnessur l’ensemble des 10 territoires participant à l’expérimentation.

B. La durée du contrat et le salaire

Selon l’article 1er de la loi du 29 février 2016, les salariés recrutés dans le cadre de l’expérimentation doivent être embauchés en CDI, « avec tous les droits qui s’y rattachent », précise l’appel à candidatures lancé pour sélectionner les territoires expérimentateurs(7). « Cela étant, ils sont considérés comme disponibles sur le marché du travail, c’est-à-dire ayant vocation, autant que possible, à évoluer vers un emploi en entreprise classique, ajoute le document. A ce titre, l’éventuelle recherche d’emploi se fait sur le temps de travail. »

Les personnes recrutées doivent être rémunérées au moins, au moment du recrutement, au niveau du SMIC (9,67 €/heure depuis le 1er janvier 2016) (loi du 29 février 2016, art. 1er et 4).

Le contrat de travail peut être suspendu, à la demande du salarié, pour lui permettre d’accomplir soit une période d’essai afférente à une offre d’emploi visant une embauche en contrat à durée indéterminée ou à durée déterminée d’au moins 6 mois, soit un contrat à durée déterminée de moins de 6 mois. En cas d’embauche à l’issue de cette période d’essai, le contrat sera rompu sans préavis. L’aide attribuée pour cet emploi par le fonds n’est pas versée pendant la période de suspension du contrat de travail (loi du 29 février 2016, art. 4).

Si l’expérimentation n’est pas reconduite au terme des 5 ans prévus ou si elle est interrompue avant ce terme par une décision du Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée, les entreprises peuvent rompre tout ou partie des contrats de travail. Ce licenciement, qui reposera sur un motif économique et sur une cause réelle et sérieuse, sera prononcé selon les modalités d’un licenciement individuel pour motif économique. Le fonds versera alors à l’entreprise la fraction du montant de l’indemnité de licenciement fixée par la convention qu’il aura signée avec elle (voir page 59). Dans tous les autres cas, le licenciement interviendra dans les conditions du droit commun (loi du 29 février 2016, art. 6).

III. l’aide versée aux entreprises

L’embauche de personnes dans le cadre de l’expérimentation ouvre droit, pour l’entreprise à but d’emploi conventionnée, à une aide financière dénommée « contribution au développement de l’emploi », attribuée par l’association gestionnaire du Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée. Cette contribution ne peut pas être attribuée lorsque l’employeur n’est pas à jour du versement de ses cotisations et contributions sociales (décret du 27 juillet 2016, art. 10).

A. Le montant

Le montant de la contribution au développement de l’emploi est fixé en proportion du SMIC. Il ne peut excéder 113 % du SMIC brut par heure travaillée, dans la limite de la durée légale hebdomadaire du travail qui est fixée à 35 heures par semaine (décret du 27 juillet 2016, art. 11).

A titre indicatif, en 2016, le SMIC horaire brut étant fixé à 9,67 €, le montant maximal de l’aide s’élève donc à 10,93 € par heure travaillée, soit 1 657,75 € par mois pour 35 heures de travail par semaine (10,93 € x 151,67 heures).

La convention conclue entre l’entreprise recruteuse et le Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée peut moduler le montant de la contribution en fonction (décret du 27 juillet 2016, art. 11) :

→ des caractéristiques socio-économiques du territoire ;

→ du type d’activités exercées par les personnes embauchées ;

→ de la part que prennent les recettes de l’entreprise résultant de la vente de biens et services dans la couverture des charges liées à ces activités.

En outre, la convention ou ses avenants financiers annuels peuvent prévoir une dégressivité du montant annuel de l’aide pour tenir compte de l’évolution de la situation économique de l’entreprise, appréciée notamment au regard de l’évolution de son chiffre d’affaires, de sa marge brute et de sa masse salariale (décret du 27 juillet 2016, art. 12).

(A noter) L’Etat contribue au financement de la contribution au développement de l’emploi à hauteur d’un montant égal au minimum à 53 % et au maximum à 101 % du SMIC horaire brut, appliqué au nombre prévisionnel de personnes embauchées en équivalents temps plein, dans la limite des crédits disponibles. Ce taux est fixé annuellement par arrêté ministériel. Les autres personnes morales participant à l’expérimentation peuvent compléter ce montant selon des modalités précisées dans les conventions qu’elles signent à cet effet avec le fonds (voir page 59).

B. Les modalités de versement et les règles de cumul

Le versement à l’entreprise de la contribution au développement de l’emploi intervient sur production d’une attestation de l’employeur justifiant le nombre d’heures de travail effectuées par les salariés participant à l’expérimentation (décret du 27 juillet 2016, art. 10).

Cette contribution ne peut pas être cumulée pour une même embauche avec une autre aide à l’insertion ou à l’emploi financée par l’Etat au titre d’un même salarié (décret du 27 juillet 2016, art. 10).

Si l’expérimentation n’est pas reconduite au terme des 5 ans prévus ou si elle est interrompue avant ce terme par une décision du fonds, les entreprises recevront une notification de ce dernier signifiant la fin de l’aide financière (loi du 29 février 2016, art. 6).

IV. le financement et le pilotage de l’expérimentation

Le financement du dispositif est assuré par un fonds national spécifique – dénommé « Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée » –, chargé aussi, notamment, de conventionner les entreprises participantes. Le pilotage du dispositif est donc effectué au niveau national via ce fonds, mais aussi au niveau local grâce à des comités locaux de pilotage.

A. Le fonds de financement

1. Ses missions

Le Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée est chargé de financer une fraction du montant de la rémunération des personnes embauchées – via le versement à l’employeur d’une contribution au développement de l’emploi (voir page 61) – ainsi qu’une fraction du montant de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement versée si l’expérimentation n’est pas reconduite au bout de 5 ans ou si elle est interrompue avant ce terme par une décision du fonds (loi du 29 février 2016, art. 3).

Il doit aussi élaborer un cahier des charges fixant les critères que doivent respecter les collectivités territoriales, les établissements publics de coopération intercommunale ou les groupes de collectivités territoriales couverts par l’expérimentation. C’est au vu de ce cahier des charges et du projet de programme d’actions établi par le comité local chargé du pilotage de l’expérimentation (voir page 63) que la liste des territoires retenus pour mener l’expérimentation a été élaborée (voir page 58) ainsi que celle des collectivités territoriales, des EPCI et des groupes de collectivités territoriales y participant (loi du 29 février 2016, art. 3).

Le fonds est en outre chargé de signer des conventions avec les entreprises de l’ESS qui veulent participer à l’expérimentation (loi du 29 février 2016, art. 3).

2. Son financement

Pour lui permettre d’assurer son fonctionnement et de verser les aides financières aux entreprises, le Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée reçoit des dotations financières de l’Etat, des collectivités territoriales, des EPCI, des groupes de collectivités territoriales et des organismes publics et privés volontaires (Pôle emploi…) (loi du 29 février 2016, art. 5 ; décret du 27 juillet 2016, art. 15).

Le projet de loi de finances pour 2017 prévoit que la participation financière de l’Etat à ce dispositif s’élèvera l’an prochain à 14,93 millions d’euros. Participation à laquelle s’ajoutera donc celle, volontaire, des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale et d’organismes publics et privés.

Dans ce cadre, le fonds doit signer avec chaque collectivité territoriale, établissement public de coopération intercommunale ou groupe de collectivités territoriales participant à l’expérimentation une convention d’objectifs et de moyens qui (loi du 29 février 2016, art. 5 ; décret du 27 juillet 2016, art. 1er et 2) :

→ précise leur engagement à respecter le cahier des charges qu’il a élaboré ;

→ fixe les conditions de leur participation volontaire au financement de l’expérimentation et définit l’affectation de cette participation.

L’Etat et Pôle emploi sont également cosignataires de ces conventions (loi du 29 février 2016, art. 5).

Le fonds doit aussi signer une convention d’objectifs et de moyens avec l’Etat et chacun des organismes publics et privés participant à l’expérimentation, afin de fixer le montant de leur contribution à son financement et de définir l’affectation de cette contribution (loi du 29 février 2016, art. 5 ; décret du 27 juillet 2016, art. 1er et 2).

3. Sa composition et son fonctionnement

Le Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée est dirigé par Patrick Valentin, responsable du réseau « emploi-formation » d’ATD quart monde.

Sa gestion est confiée à une association, créée en juillet dernier et dénommée « Expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée », dont le conseil d’administration est composé comme suit (loi du 29 février 2016, art. 3) :

→ 2 représentants de l’Etat ;

→ 1 représentant de chaque organisation syndicale de salariés représentative sur le plan national et interprofessionnel ;

→ 1 représentant de chaque organisation professionnelle d’employeurs représentative sur le plan national et interprofessionnel, ainsi que 1 représentant de chaque organisation professionnelle d’employeurs représentative sur le plan national multiprofessionnel ;

→ 1 représentant du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE) ;

→ 1 représentant du Conseil national de l’insertion par l’activité économique (CNIAE) ;

→ 1 représentant de Pôle emploi ;

→ 1 député et 1 sénateur ;

→ 1 représentant du Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire ;

→ 1 représentant de chaque comité local de pilotage de l’expérimentation ;

→ 3 personnalités qualifiées désignées par arrêté(8) ;

→ 1 représentant de l’Association des régions de France, 1 représentant de l’Assemblée des départements de France, 1 représentant de l’Assemblée des communautés de France et 1 représentant de l’Association des maires de France ;

→ 1 représentant des missions locales désigné par arrêté(8) ;

→ 1 représentant de l’association « Alliance Villes Emploi ».

Le conseil d’administration se réunit au moins 2 fois par an (décret du 27 juillet 2016, art. 6).

Le bureau de l’association est composé de 8 membres parmi lesquels figurent (décret du 27 juillet 2016, art. 7) :

→ le président, en la personne de Louis Gallois, également président de la FNARS ;

→ le vice-président ;

→ 1 représentant de l’Etat ;

→ 1 représentant des collectivités territoriales ;

→ le représentant de Pôle emploi ;

→ le représentant du CNIAE ;

→ le représentant du CNLE.

Un commissaire du gouvernement désigné par le ministre chargé de l’emploi assiste de droit aux séances de toutes les instances de délibération et d’administration de l’association. Toutes les délibérations et décisions doivent lui être transmises par tout moyen conférant date certaine à cette transmission S’il estime qu’une délibération du conseil d’administration ou qu’une décision prise par une autre instance de l’association gestionnaire est contraire aux dispositions régissant les missions et la gestion du fonds, il peut s’opposer, par décision motivée, à sa mise en œuvre dans un délai de 15 jours ou, lorsque l’urgence lui est signalée, de 5 jours ouvrés à compter de la réception de la délibération ou de la décision en cause (loi du 29 février 2016, art. 3 ; décret du 27 juillet 2016, art. 9).

(A noter) La liste des membres du conseil d’administration et du bureau de l’association gestionnaire du Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée est disponible sur son site Internet http://etcld.fr.

B. Le comité local de pilotage

Les collectivités territoriales, les établissements publics de coopération intercommunale ou les groupes de collectivités territoriales participant doivent mettre en place un comité local chargé de piloter l’expérimentation dans le territoire habilité, d’en suivre le déploiement et de collecter toutes les données nécessaires au fonds pour assurer le suivi et établir le bilan de l’expérimentation. Il doit aussi déterminer les modalités d’accompagnement des personnes embauchées en lien avec les acteurs du service public de l’emploi (loi du 29 février 2016, art. 3 ; décret du 27 juillet 2016, art. 21).

1. Sa composition

Le comité local de pilotage et d’appui à l’expérimentation est au minimum composé des représentants (décret du 27 juillet 2016, art. 20) :

→ des collectivités territoriales ou de leurs groupements parties prenantes à l’expérimentation désignés par leurs assemblées respectives ;

→ du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi ;

→ de Pôle emploi ;

→ des entreprises conventionnées par le fonds.

Sont également membres du comité local des demandeurs d’emploi de longue durée embauchés dans le cadre de l’expérimentation (décret du 27 juillet 2016, art. 20).

Pour que ce comité puisse exercer un « pilotage fort », il doit être « présidé par un élu et doté d’un directeur qui en est l’animateur », précise l’exposé des motifs de la proposition de loi initiale. Sa composition n’est pas fixée par la loi et le décret du 27 juillet 2016 n’en donne qu’une composition minimale « afin de laisser aux acteurs locaux la possibilité de l’adapter à leurs besoins et spécificités », ont expliqué les rapporteurs du texte au Sénat (Rap. Sén. n° 266, Emery-Dumas, décembre 2015, page 27).

2. Ses missions

Le comité local de pilotage et d’appui à l’expérimentation est chargé (loi du 29 février 2016, art. 3 ; décret du 27 juillet 2016, art. 21) :

→ de coordonner l’action des acteurs locaux participant à l’expérimentation ;

→ d’établir un état de la situation socio-économique du territoire en termes de chômage de longue durée et d’activités économiques existantes ;

→ de déterminer, en lien avec Pôle emploi, la liste des demandeurs d’emploi volontaires pour participer à l’expérimentation, et d’identifier leurs compétences ainsi que leurs projets professionnels ;

→ d’informer et d’accueillir l’ensemble des demandeurs d’emploi de longue durée volontaires ;

→ d’organiser, avec Pôle emploi, les modalités d’accompagnement des demandeurs d’emploi participants et d’identifier leurs besoins de formation ;

→ de recenser les activités répondant à des besoins non satisfaits, adaptées aux compétences des demandeurs d’emploi participant à l’expérimentation, non concurrentes des activités économiques existantes et ne se substituant pas aux emplois privés ou publics déjà présents sur le territoire ;

→ d’élaborer un programme d’actions, approuvé par le fonds, ayant pour objet de promouvoir la création d’entreprises conventionnées ou le conventionnement d’entreprises existantes pour l’embauche de chômeurs de longue durée éligibles à l’expérimentation ;

→ d’assurer le suivi de la mise en œuvre de l’expérimentation et de ses résultats.

Le comité de pilotage local doit communiquer au comité scientifique (voir page 64) toutes les informations nécessaires à l’évaluation de l’expérimentation, et à l’association gestionnaire du fonds les informations nécessaires à la réalisation du bilan de l’expérimentation (décret du 27 juillet 2016, art. 21).

Les modalités de fonctionnement du comité de pilotage local doivent être approuvées par le Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée (loi du 29 février 2016, art. 3 ; décret du 27 juillet 2016, art. 21).

V. La Durée et l’évaluation de l’expérimentation

A. La durée

L’expérimentation va durer 5 ans, à partir du 1er juillet 2016, soit jusqu’au 30 juin 2021 (loi du 26 février 2016, art. 1er et 8). Les 10 territoires habilités pour la mettre en œuvre ont été désignés le 21 novembre dernier (voir page 58).

B. L’évaluation

1. Par le fonds d’expérimentation

Au plus tard 18 mois avant le terme de l’expérimentation, le Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée devra en dresser le bilan dans un rapport rendu public adressé au Parlement et au ministre chargé de l’emploi (loi du 29 février 2016, art. 1er).

2. Par un comité scientifique

Au plus tard 12 mois avant le terme de l’expérimentation, un comité scientifique devra réaliser l’évaluation de l’expérimentation afin de déterminer les conditions appropriées pour son éventuelle généralisation. Ce comité sera composé de personnalités reconnues pour leurs compétences académiques et de représentants des services des études et des statistiques des personnes publiques intéressées. Ses membres, qui siégeront à titre bénévole, doivent encore être nommés par arrêté ministériel (loi du 29 février 2016, art. 1er ; décret du 27 juillet 2016, art. 23).

L’évaluation qu’il réalisera devra mesurer les effets de l’expérimentation sur les formations suivies par les personnes recrutées ainsi que sur la situation globale des territoires en matière d’emploi, de qualité de vie, d’inégalités et de développement durable. En particulier, elle s’attachera à déterminer l’impact de l’expérimentation sur ces différents aspects, en comparant l’évolution constatée sur ces dimensions par rapport à une situation où l’expérimentation n’aurait pas été mise en place. Le comité scientifique utilisera à cette fin tous les instruments d’observation adaptés de nature quantitative ou qualitative. Il devra, en outre, tenir compte des nouveaux indicateurs de richesse définis par une loi du 13 avril 2015(9) (loi du 29 février 2016, art. 1er ; décret du 27 juillet 2016, art. 24).

Le comité scientifique devra aussi procéder à une analyse coût-bénéfice de l’expérimentation. Il évaluera notamment l’impact, global et territoire par territoire, de l’expérimentation sur les finances des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale et des organismes publics ou privés participants. Il aura pour cela accès à tous les documents comptables et financiers de gestion du Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée (loi du 29 février 2016, art. 1er).

Son rapport devra être remis au Parlement et au ministre chargé de l’emploi (loi du 29 février 2016, art. 1er).

Ce qu’il faut retenir

Participants et activités. Sur 10 territoires volontaires choisis après appel à projets, des entreprises de l’économie sociale et solidaire conventionnées vont pouvoir, pendant 5 ans, embaucher des demandeurs d’emploi au chômage depuis plus de 1 an pour exercer des activités économiques pérennes et non concurrentes de celles déjà existantes au niveau local, et correspondant à des besoins non satisfaits.

Conditions d’emploi. Les personnes sont embauchées en contrat à durée indéterminée et rémunérées au moins au niveau du SMIC. Elles bénéficient d’un accompagnement et, le cas échéant, d’actions e formation.

Aide financière. L’entreprise perçoit une aide financière qui ne peut excéder 113 % du SMIC brut par heure travaillée, dans la limite de la durée légale hebdomadaire. Cette aide peut être modulée selon plusieurs critères, tels que les caractéristiques socio-économiques du territoire. Elle est financée via un fonds dédié alimenté par l’Etat et, de façon volontaire, par les autres acteurs participant à l’expérimentation, en particulier les collectivités locales.

Pilotage. L’expérimentation est pilotée, au niveau national, par le fonds qui la finance et, sur chaque territoire, par un comité de pilotage local.

Textes applicables

• Loi n° 2016-231 du 29 février 2016, J.O. du 1-03-16.

• Décret n° 2016-1027 du 27 juillet 2016, J.O. du 28-07-16.

• Arrêté du 13 juillet 2016, NOR : ETSD1619151A, J.O. du 16-07-16. • Arrêté du 29 juillet 2016, NOR : ETSD1621556A, J.O. du 30-07-16.

Préparation de la généralisation de l’expérimentation

Au-delà de la liste des 10 territoires retenus pour mettre en œuvre l’expérimentation, dévoilée le 21 novembre dernier (voir page 58), l’association gestionnaire du Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée a également approuvé une liste complémentaire de 4 territoires « dont la qualité de dossier a été reconnue lors de l’instruction », a fait savoir le ministère du Travail et de l’Emploi dans un communiqué. A cette occasion, les services de Myriam El Khomri ont également salué la mise en place d’une seconde association, nommée « Territoires zéro chômeur de longue durée » et présidée par le député (PS) Laurent Granguillaume, l’un des parlementaires qui a porté la loi du 29 février 2016. Cette association, a précisé le ministère, « aura pour objectif de préparer les territoires aujourd’hui non retenus pour une seconde phase ouverte à tous les territoires volontaires si l’expérimentation est concluante ».

Notes

(1) Voir ASH n° 2924 du 11-09-15, p. 26.

(2) Manuel disponible sur www.zerochomeurdelongue duree.org.

(3) Voir ASH n° 2987 du 9-12-16, p. 25.

(4) Voir notre décryptage « Territoires zéro chômage de longue durée : un projet dans les starting-blocks » – ASH n° 2977 du 30-09-16, p 28.

(5) Le cahier des charges de l’appel à projets, disponible sur le site Internet du Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée (http://etcld.fr), a été approuvé par l’arrêté du 29 juillet 2016, NOR : ETSD1621556A, paru au Journal officiel du 30 juillet 2016.

(6) Voir ASH n° 2887 du 12-12-14, p. 51.

(7) Appel à candidatures disponible sur http://etcld.fr, le site Internet du Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée.

(8) Arrêté du 13 juillet 2016, NOR : ETSD1619151A, J.O. du 16-07-16.

(9) Voir ASH n° 2905 du 10-04-15, p. 38.

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